Le carnisme ordinaire

Tcharls

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Je crée ce sujet pour évoquer le carnisme quotidien, pas les grosses remarques carnistes du bingo ou d'autres encore que certains cerveaux géniaux créent tous les jours, mais pour les petits signes discrets, banalisés, tellement rabachés qu'ils en deviennent ordinaires, et contre lesquels on aimerait se révolter sans qu'on nous réponde "oh mais c'est bon c'est pas méchant, t'es relou à voir le mal partout".

Deux exemples pour commencer :

Je viens de commencer un bouquin.
Ca se passe au Japon, et il y a une scène dans une poissonnerie. L'auteure décrit tous les poissons, entiers ou découpés, qui sont censés faire saliver le lecteur. Je sais que ces pages ont été écrites avec l'intention de donner envie de manger, de faire partager l'envie de la personne présente dans le magasin, de créer une connivence entre lecteur et personnage, exactement comme quand moi je lis les recettes ou les menus que vous postez ici qui me font saliver. Sauf que là, en lisant ça l'autre soir sur mon pouf, ça me dégoutait. Je faisait la grimace en pensant à des bouts de cadavres sanguinolants. Echec.

2ème exemple :

Hier matin à la radio, j'écoute d'une oreille distraite une chroniqueuse sur France Cul'.
A un moment, elle parle de bouffe, plus précisément de viande, et elle se met à citer plein de termes qui désignent des parties du corps des animaux une fois dans l'assiette : non pas "ventre, pattes, cou", mais "filet, bavette" etc. (style Journal des femmes :facepalm: ). Là, tous les gens chez eux devant leur tasse de chicorée, et même l'animateur de l'émission en direct, font ou sont censés faire : "hmmm miam miam, il est tôt, mais quand même ça fait envie, un bon rumsteck, houlàlà je salive". Tandis que moi, j'éteints parce que ça me fout la gerbe.

(dans ce deuxième exemple, la chroniqueuse était un peu plus engagée carniste. Elle déplorait que les jeunes de maintenant ne connaissent plus la "bonne" viande de noter chère tradition, et vas'y que je me justifie (sans qu'on m'ait rien demandé) : je mange peu de viande, mais je l'achète chez le meilleur boucher de Paris, alors certes oui c'est cher, mais les animaux viennent d'un abattoir respecteux des animaux... (faudra m'expliquer le truc...))

Mais même sans cette plaidoirie carniste, ce qui m'a frappé, c'est cette connivence a priori et sans effort à fournir entre chroniqueuse et auditeurs, entre auteure et lecteurs. Si je me dresse contre ça, ça surprend tout le monde, parce que personne n'a rien remarqué. « Oh, c'est bon, t'es chiant, c'est pas méchant, t'es vraiment obsedé par ce sujet, on peut rien dire, personne t'agresses là, tu peux pas penser à autre chose un peu ? »

Tout ça, cette légère pression sociale quotidienne, contribue à nous faire sentir un peu plus seuls dans un monde décidément différent...

Est-ce que ça vous arrive aussi de vivre des moments comme ça ?
 
Ce qui me vient à l'esprit, c'est quand je mange en compagnie d'omnis dans des restaus omnis, leurs simples "hum, c'est super bon". Pas un truc méchant suivi d'un "t'es sûr que tu veux pas en manger, juste une fois, ça change rien" ou ce genre de truc reloud. Le "hum, c'est super bon" réflexe, qu'on se dit à soi-même, et qu'on se dit nous aussi quand on mange un bon plat. Ça me met tjs un peu mal à l'aise.

Ou dans les séries/films/anime, simplement de voir les perso manger de la viande, pour faire scène du quotidien.
Par exemple, là je viens de voir Aldébaran, chevalier d'or du taureau, se bouffer un beefsteak... Nan mais quel est le fuck T_T
 
Hier midi j'ai appelé ma mère, je lui demande si je la dérange pas, elle me répond "non non ça va, je suis en train de manger mon beefsteak"... Elle a pas fait attention, elle l'a dit comme ça, et moi je me suis dit "mais pourquoi elle me dit ça ?". C'est même pas pour m'embêter, c'est pas de la provocation, c'est juste normal pour elle, alors elle y pense pas, elle se dit pas que peut-être que j'ai pas envie de l'entendre... :confus:

Ce qui m'agresse c'est ça. Voir que pour les gens, c'est normal.
 
C'est clair, elle aurait pu se contenter de dire "je suis en train de manger", ça suffisait comme info. Elle était pas obligée de préciser le contenu de son assiette. Mais c'est tellement banal pour eux que ça leur vient pas à l'esprit que c'est une précision dont on se passerait bien.
 
C'est exactement ça !

Parfois, les gens s'en rendent compte, et disent "excuse-moi hein", ou "je ne devrais pas dire ça devant toi" ! Avant ça m'agaçait qu'on me prenne pour une petite oreille sensible, maintenant je suis content que certaines choses arrivent à la surface de leur conscience : "Oui oui, tu as mangé de la viande, c'est déjà pas mal de t'en rendre compte..."
 
Souper de fin d'année ou je suis pas allé. Je demandes à mes collègues si ça c'est bien passé. Leur réponse:"Oui très bien mais t'aurai rien pu manger"
 
Vos exemples sont exactement ce que je vis, et ce que l'on vit un peu tous, au quotidien. La banalisation, vulgarisation de cette consommation. Et on est extrémistes si on ne tolère pas ça - même sans agression quelconque, du moins volontaire, de la part de l'omni. C'est juste devenu de moins en moins supportable de voir ça, ces gens qui gobent tout et n'importe quoi et ne questionnent pas ce qu'il y a dans leur assiette. Cé cro bon tu vois.
Mais bon.. faut faire avec je suppose ? J'ai plus tendance à m'énerver lorsqu'on me justifie ses choix carnistes et, surtout, lorsqu'on se veut combattant du bien-être animal et qu'en réalité on n'a rien de différent d'un autre viandard. (J'ai un problème avec le welfarisme oui.) Ou les non-problèmes sociaux (souvenir d'un débat houleux avec une amie qui s'offusquait qu'un enfant n'ait pu avoir "sa viande" à la cantine étant donné qu'ils ne servent que du porc, scandale, bouhou tout homme doit avoir le choix, privation etc etc).
 
LordGuinness":9sm56ysq a dit:
Mais bon.. faut faire avec je suppose ?
Supporter avec un demi-sourire les gens autour de toi qui disent "hmm miam du foi gras", ou se faire traiter d'extrémiste. Dans les 2 cas, on se sent un peu seul. Pourtant, c'est sympa parfois d'être avec des gens ! suffit d'éviter l'heure des repas... ou de bien choisir les gens ;)
 
Plus ça va, plus j'oublie que j'ai moi-même été une carniste convaincue (dans le sens où je croyais dur comme fer que nous n'avions pas d'autre choix que de manger les animaux pour notre santé).
Avec les fêtes de fin d'année qui approchent, j'alterne entre la tristesse et la colère quand je vois les affiches, dépliants, présentoirs de magasins et que j'entends les gens discuter entre eux des "délices" qu'ils vont déguster avec délectation.
J'ai parfois la sensation d'être "Le Cri" d'Edvard Munch.
Ceci dit, j'ai l'impression de tirer la couverture à moi et de déplacer le problème quand je suis tentée de me plaindre. Parce que les victimes restent les animaux.

La mère de mon compagnon adore nous faire le détail de ses repas quotidiens et de ses achats. Elle l'a toujours fait et ne semble pas réaliser que le récit ses achats carnés nous gêne (puis que c'est chiant tout court, ses histoires). Je ne réponds jamais mais ça ne semble pas la déranger.
Un jour, une de ses amie est venue lui rendre visite et j'ai totalement déconnecté quand elle a commencé à parler de ses supers recettes (carnées, oui). Le lendemain, la mère de mon compagnon me demande "Elle mettait quoi avec le jambon déjà?".
:><:
J'en ai profité pour lui expliquer à quel point écouter ce genre de discussion m'était pénible et que, non, je n'avais pas du tout suivi ce qu'elle racontait. Là je me suis dit qu'elle comprendrait sûrement qu'elle devait cesser aussi. Que nenni! J'ai encore eu droit récemment à une explication sur sa manière de cuisiner je ne sais plus quel animal.
:'(

Je suis persuadée qu'elle ne le fait pas exprès. Elle fait même l'effort de manger végétalien la plupart du temps (parfois elle s'ajoute du fromage ou une tranche de jambon) quand nous allons la voir.

Les rares fois où nous parlons encore du végéta*isme (les 2 premières années ont été difficiles mais maintenant c'est accepté), elle conclut systématiquement en disant que "de son temps" (parfois je me demande si c'est un spectre ou une humaine vivante) on ne faisait pas comme ça et que tout ça c'est de la faute de ceux qui ne respectent pas les animaux, pas du consommateur.
Inutile d'essayer de lui expliquer la loi de l'offre et de la demande.
Dans le même genre, ce sont les étrangers qui prennent le travail (je suis au chomage) et la crise c'est de leur faute (cherchez pas), quels que soient les arguments qu'on avance. Heureusement, elle vote comme ses parents par fidélité familiale, on frôlait la catastrophe.
:p
 
En ce moment, à la télé, il y a une pub pour CanalSat... C'est une dinde de Noël en 3D, plumée, cuite, qui a gardé sa tête, et qui danse sur ses rotules (os saillants bien propres) en chantant joyeusement "Libérée, délivrée".
Ca n'est même pas une pub pour de la viande. Il y a des gens, des tas de gens, qui se sont dits que cette pub serait drôle, qu'elle amuserait tout le monde, qu'elle ferait rire les enfants.
Tu fais la même chose en changeant d'animal, un animal de compagnie ou même un lapin, ça serait considéré comme aussi stupide et abominable que Itchy et Scratchy (ou au moins on demanderait de l'épargner aux âmes sensibles, comme Happy Tree Friends, qui ne passe pas à la télé à ma connaissance), on te traiterait de psychopathe, ça serait censuré. Mais c'est une dinde, donc c'est drôle, c'est cool.
 
Ouais, on est obligé de la mater sur certains sites internet... Elle est à vomir cette pub.
 
Moi aussi j'ai la gerbe quand je vois cette pub, et le pire c'est qu'elle passe tout le temps. Je trouve ça vachement glauque, j'ai du mal à imaginer qu'on puisse trouver ça drôle, omni ou pas, et encore moins les enfants. C'est de très mauvais goût et déplacé.
 
faudrait limite faire un topic sur les pubs carnistes :( celle de la dinde morte et plumée me donne des frissons d'horreur à chaqueb fois que je la croise :'(
 
Pareil, quand je l'ai vue j'étais plutôt choquée qu'on puisse faire de telles pub... C'était très dérangeant à voir, tellement glauque.
Ma mère l'a bien aimée. :(

C'est même pas une pub pour de la viande en plus oui, j'étais encore plus consternée...
 
Aah ouais, elle est glauque. Celle où elle se lève de son plat en pleine scène de repas de Noël aussi. :><:
 
Pas vraiment du carnisme, plutôt du spécisme ordinaire :

Il y a quelques semaines en tps on devait traiter une réaction en utilisant du noir animal, je demande des précisions quant à la composition : "c'est du charbon d'os". :'(

Hier en modélisation on a étudié une enzyme issue de pancréas de porc et une autre issue d'une étoile de mer. (Ceci étant j'ai des doutes quant à la sentience des étoiles de mer...)
 
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