Véganisme et précarité

jess

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Ganges / Montpellier
Je suis tombée sur cet article, je le trouve très intéressant, et, pour avoir connu des périodes de grande précarité où j'étais obligée de me fournir dans les épiceries sociales, très juste :

https://tpunchintersectionnel.wordpress ... precarite/

Vos avis ?



PS.: Accessoirement, pour celleux qui sont confronté.e.s à ce problème de précarité, l'article contient un lien vers le programme pour avoir de la B12 gratuit de la Société Végane Française, que je ne connaissais pas mais qui est à mon avis une très bonne initiative.
 
Merci pour le partage Jess.
Je trouve aussi que l'analyse est juste. Tout le passage sur le temps à consacrer me semble pertinent. Que ce soit en temps réel ou temps "d'esprit" (si je peux dire ainsi). Je trouve que devenir végane demande une certaine disponibilité et cette disponibilité est effectivement un luxe dont jouisse plus facilement les classes plus aisées. Et aussi tout à fait d'accord avec l'accès à l'information clairement plus compliqué pour certaines personnes. Surtout que sur le net on peut trouver tout et n'importe quoi, du genre la spiruline est un bon complément de B12... Faut pouvoir savoir faire le tri. Et puis on n'est pas toujours aidé par les professionnel de la santé...

Pour les astuces de fin de marché, il me semble qu'une personne précarisée n'a pas toujours le courage d'entreprendre ce genre de démarches. C'est pas facile d'avouer qu'on a besoin d'une aide. Pour certaines personnes il en va de leur dignité.

P.
 
HaricotPrincesse":3nf5rber a dit:
Pour les astuces de fin de marché, il me semble qu'une personne précarisée n'a pas toujours le courage d'entreprendre ce genre de démarches. C'est pas facile d'avouer qu'on a besoin d'une aide. Pour certaines personnes il en va de leur dignité.

Complètement!

Un soir, après le boulot, j'attendais mon bus et une personne est venue me demander si je pouvais l'aider avec une petite pièce. Elle m'a expliqué qu'elle vivait dans un squat et avait beaucoup de difficultés à satisfaire ses besoins fondamentaux. Je lui ai dit qu'elle pouvait passer prendre une soupe gratuitement au restaurant pour lequel je cuisinais et elle a promis qu'elle viendrait le lendemain. Je ne l'ai jamais revue. En y réfléchissant, je me suis dit que j'aurais fait la même chose. Entrer dans le restaurant, expliquer que la cheffe a dit que et demander la soupe... Et bien c'est beaucoup trop.

Je suis moi-même une précaire (même si j'évite d'y penser) et je n'ose que très rarement mettre cet aspect de ma vie en avant. Il faut dire que j'ai spécialement honte d'avouer que j'ai une grande tendance à me laisser exploiter.

En fait, je pense que l'aumône n'est jamais une solution satisfaisante. Ça empiète trop sur l'image que nous avons de nous-même.


Pour parler du reste de l'article, je peux synthétiser mon ressenti en disant qu'être végane n'est pas une fin en soi. Le but est de parvenir à un monde sans exploitation animale. En boycottant spécifiquement dans l'alimentation des produits d'origine animale, on envoie un message fort. En fait, j'imagine mal une société considérant qu'exploiter les animaux pour se nourrir est inacceptable continuer à produire des objets entraînant cette exploitation, mais je peux me tromper, c'est certain.
Ça me fait penser à des personnes omnivores (que j'ai rencontrées à un atelier) qui ont manifesté pour la fermeture des abattoirs. Sur le moment, ça m'a laissée perplexe, ça me semblait même hypocrite. Puis je me suis dit que si elles étaient d'accord sur le principe mais dans l'incapacité de l'appliquer (pressions sociales, troubles alimentaires ou toute autre raison), elles étaient des alliées quand même puisque souhaitant un changement radical de la société. Changement qui n'attend pas que chaque individu composant la société ait changé préalablement.
Evidemment, nous avons besoin de personnes engagées qui le revendiquent et exigent des changements, que ce soit pour l'alimentation, la recherche, l'habillement, les cosmétiques ou tout le reste, mais espérer que chaque personne convaincue se batte simultanément sur tous les fronts quelle que soit sa situation est irréaliste.

Je me sens plutôt en accord avec l'article quand il parle de la culpabilisation des non-véganes, même si je crois que j'ai un peu tendance à le faire parfois (quand je suis exaspérée parce que je me sens jugée). J'expose les faits de manière très brute (ne pas exprimer ce que j'en pense, même si, et surtout, parce que c'est évident) et propose des alternatives positives. C'est une manière de faire qui me correspond et porte parfois ses fruits.
Et c'est là que je me demande si le fait que certaines personnes véganes culpabilisent les autres ne constitue pas tout de même une méthode efficace. Je n'ai jamais entendu, mais j'ai lu, des personnes disant qu'elles avaient eu besoin de comprendre "avec un coup de pied au cul" qu'elles étaient coupables pour changer. Comme pour beaucoup de choses, c'est assez confus pour moi. Je me contente de faire comme je le sens et je trouve que ça fonctionne plutôt bien, même s'il faut répéter souvent.
 
J'aime beaucoup ta façon de voir les choses, Hell.
L'idée d'alliés qui ne soient pas eux-même capables d'aller au bout de la démarche mais qui soutiennent me parait très importante (peut-être parce que je me reconnais en partie dans cette idée, mais pas que...).
Et pour ce qui est de culpabiliser, je pense que tout dépend du contexte. Perso, je n'ai aucun scrupule à essayer de culpabiliser quelqu'un qui se voile la face, parce que je ne supporte pas les hypocrites, et parce que je pense que parfois il faut secouer le cocotier pour en faire tomber les fruits pourris ^^.
Par contre, les gens qui vont dire "je suis conscient.e de cette situation mais je n'arrive pas à faire mieux pour X ou Y raison", non, je ne vais pas les culpabiliser, mais au contraire essayer de les soutenir, de les encourager, de leur montrer le chemin accompli parce qu'en général iels ont déjà suffisamment de mal à se dépatouiller avec leur propre conscience, et qu'ils ont bien plus besoin d'être valorisés. Et ce quelles que soient ces raisons, ce n'est pas parce que je ne les comprends pas qu'elles ne sont pas valables.
Et au final, ça porte ses fruits, je vois certaines de mes amies devenir végés alors que ça leur paraissait inconcevables à la base, parce qu'en situation de précarité, parce qu'avec un mode de vie instable, parce que se sentant incapable de cuisiner, etc.
Et effectivement, ce sont des gens qui font ce qu'ils peuvent dans la situation actuelle, mais qui accepteraient tout à fait de devenir véganes dans un monde où ce serait facile et accessible à tout point de vue (économique, géographique, social, etc.)

Après, je comprend d'autant plus l'argument que j'ai vu ce que ça donne quand on a pas le choix, qu'on est obligés de se tourner vers les aides sociales pour remplir son frigo, et que tu galères déjà énormément pour trouver des produits vaguement végés. Que, clairement, les préoccupations du genre présure ou additifs alimentaires, ça te passe à des années-lumière au-dessus de la tête parce que tu es déjà contente d'avoir trouvé un produit sans lardons ni poulet. Que tu t'attires les foudres des bénévoles parce que tu refuses de prendre un pack de lait. Que tu te rends compte que les seuls légumes dispos, c'est des haricots verts en conserve (et c'est vraiment dégueu les haricots verts en conserve ! ).
 
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