Eleveurs vege-friendly ?

Moineau

Massacre des légumes
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Dans le cadre de mon boulot, je vois passer des demandes de subventions pour des projets portés par des exploitants agricoles.
Et aujourd'hui ô joie, je lis
"(...) souhaitons répondre aux enjeux de la société de demain : (...), nécessité de diminuer la consommation de protéines animales dans l'alimentation humaine, (...)". :YE: :YE: :YE:
Avec 13 éleveurs parmi les 15 exploitants du groupe, je trouve ça hyper encourageant ! (si ça ne tenait qu'à moi, ils l'auraient tout de suite la subvention :whistle: )
 
Bien, mais alors, je ne vois pas pourquoi ils sont éleveurs? J'ai du mal à comprendre :confus:
 
je connais depuis tout petit un éleveur de volaille ( + ou - "vg-friendly" aussi), il faut tenir compte de leur endettement, du poids des déterminations sociales, de l'héritage familial à perpétuer, des enfants à faire vivre, de l'amour de son travail, du statut identitaire qu'il confère, du très peu de temps libre laissé par ce métier pour réfléchir à une reconversion, ou encore de la très grande difficulté à changer de domaine lorsqu'on est spécialisé (c'est déjà difficile pour des employé du tertiaire, alors pour des éleveurs ...)
 
Migmoug":1ox2iyu6 a dit:
Bien, mais alors, je ne vois pas pourquoi ils sont éleveurs? J'ai du mal à comprendre :confus:
Beaucoup d'éleveurs sont fiers de "nourrir la population", parce qu'ayant grandi dans une société carniste, ils prennent la viande pour un élément indispensable de l'alimentation. Pour autant ils savent que leurs parents ou grands-parents mangeaient bien moins de viande que le consommateur actuel, qu'une baisse est donc possible.
Et ils sont confrontés au fait qu'on grignote l'espace agricole et qu'il est donc de plus en plus difficile de produire autant de viande, qu'il ne sera pas toujours possible d'augmenter la production en fonction de la croissance démographique avec moins de terres exploitables.
La proposition du groupe n'émane pas d'une question de protection animale (enfin, d'animaux non humains), mais plutôt écologique.
 
Aux Estivales de la Question Animale, il y avait une éleveuse qui n'était pas seulement végé-friendly, mais amoureuses des animaux, littéralement. Elle avait choisi cette profession à cause de son amour pour les animaux, et avec l'espoir de trouver/développer une autre utilité que l'exploitation animale pour la race de vaches qu'elle avait choisie (une espèce de marronage peut-être), ainsi que pour ne pas laisser le terrain à un éleveur plus intensif. Elle cherchait à tuer le minimum de bêtes (Mais la réglementation lui imposait d'en envoyer x par an à l'abattoir pour ne pas perdre son élevage... Quelque chose comme un veau par an, ou trois, je ne sais plus.), et elle était quasiment végétarienne (Elle ne mangeait que les rares animaux qu'elle tuait elle-même : Elle s'est par exemple sentie coincée par un coq violent qui menaçait d'en tuer d'autres. Donc elle l'a tué et mangé. Elle aurait peut-être pu trouver une autre solution, mais il n'empêche qu'elle ne l'a pas fait de gaité de coeur, et je la crois.). Et ses voisins éleveurs la voyaient comme une folle, parce qu'elle consacrait trop de temps et d'argent au bien être de ses animaux (en fait, elle ne survivait financièrement que par les subventions et n'avait le temps de rien faire d'autre que s'occupper des animaux presque H24).
Elle était venue dans l'optique de trouver une aide auprès des militants pour reconvertir son élevage en quelque chose d'autre, afin de ne plus tuer aucun des animaux. Et elle disait être en contact avec un certain nombre d'autres éleveurs dans la même situation, qui ne supportaient plus ça. Donc elle cherchait vraiment une solution généralisable, et elle était déchirée de toute part (Simplement abandonner son élevage, ça aurait signifié envoyer aussitôt tous ses animaux à l'abattoir...).

Donc la situation des éleveurs n'est pas simple, et oui, un certain nombre peuvent être végé-friendly, et à un fil de l'antispécisme.
http://www.question-animale.org/fra/est ... tal-minier
 
Un article dans le libération du 22/03/2017 : "Ne fais pas aux truies ce que tu ne voudrais pas… "
Vous le trouverez ici ou ci-dessous.

ibé des écrivains
Ne fais pas aux truies ce que tu ne voudrais pas…
Par Jean-Baptiste del Amo — 22 mars 2017 à 19:46
Dans un élevage porcin de Plouisy (Côtes-d'Armor), en janvier 2016. Photo Fabrice Picard
Eleveurs ou ouvriers agricoles, Andrew, Emilie, Olivier et Anna ont préféré changer de voie après avoir pris conscience de la sensibilité de leurs animaux. Des témoignages rares, mais révélateurs de l’évolution du regard porté par notre société sur l’industrie de la viande et la souffrance animale.

Ne fais pas aux truies ce que tu ne voudrais pas…

Eleveurs ou ouvriers agricoles, Andrew, Emilie, Olivier et Anna (1) ont choisi de renoncer à leur pratique professionnelle, révoltés par le traitement infligé à des animaux dont ils ont pu observer la sensibilité. Ils témoignent de leur prise de conscience.

Andrew, 43 ans, ancien éleveur de porcs dans le Mâconnais : «J’ai commencé à éprouver une répulsion physique lorsqu’il me fallait amener mes cochons à l’abattoir»

Comme de nombreux Anglais charmés par nos campagnes, Andrew et son épouse ont fait le choix de s’installer en France, dans le Mâconnais, en 2010. Après la lecture du livre de l’auteur américain Jonathan Safran Foer, Faut-il manger les animaux ? ils choisissent de ne plus encourager l’élevage industriel et d’élever quelques cochons pour la seule consommation familiale. Six mois plus tard, le couple décide de garder deux reproducteurs et de débuter un élevage en agriculture raisonnée. Au quotidien, Andrew apprend à connaître les animaux de son troupeau : «Ils sont très sensibles à ce que dégagent les gens. Ils peuvent se fier à certaines personnes et en craindre d’autres. Ils ont également une excellente mémoire.» Ses cochons sont élevés en plein air. En élevage intensif, pour justifier l’encagement des truies en maternité, il n’est pas rare d’entendre dire qu’elles sont de «mauvaises mères» et écrasent leurs petits. Chez Andrew, elles ramassent des branches et construisent des nids dans les buissons, préférant mettre bas en extérieur de façon à disposer de la place nécessaire pour allaiter sans risque leur progéniture. A l’observation de ces comportements, il ne fait plus de doute pour lui que les cochons sont des êtres dotés de subjectivité et capables de ressentir des émotions : «J’ai commencé à éprouver une répulsion physique lorsqu’il me fallait amener mes cochons à l’abattoir. J’en avais pris soin de la même façon que je prenais soin de mes chiens, de mes chats. Alors, pourquoi devais-je les tuer ?»

Vient le moment d’abattre la première truie de réforme (qui n’est plus assez productive). Le couple se résout à l’envoyer à l’abattoir, mais en garde un profond sentiment de culpabilité. «Nous avons discuté ensemble et conclu que nous ne pouvions pas élever des animaux de façon éthique tout en les destinant à la mort. C’était tout simplement incompatible.» A cette période, l’épouse d’Andrew tombe malade et il se retrouve seul pour gérer l’élevage : «Je travaillais beaucoup, sans jamais prendre de repos, pour quelque chose qui me répugnait de plus en plus… Nous avons choisi d’arrêter la reproduction et le commerce sitôt que nous aurions "écoulé" les porcs restants. Nous étions à deux doigts de la faillite si nous cessions l’activité sans avoir récupéré notre investissement de départ, et nous avons donc dû mener à terme l’engraissement des cochons qui nous restaient.»

Andrew vend la plupart des reproducteurs, mais ne peut se résoudre à destiner l’un d’eux à l’abattoir : un verrat (mâle reproducteur) dénommé Heston. «C’est un cochon d’une douceur incroyable, malgré sa puissance. Il se laissait rouler sur le flanc pour être caressé, même par le plus jeune de nos enfants. Imaginer que nous aurions pu le vendre, comme nous l’avons fait pour une de ses sœurs, et qu’il aurait fini par être abattu pour sa viande, me rend encore malade.» Il cherche une place pour Heston dans un refuge animalier, où le verrat vit aujourd’hui en semi-liberté.

Depuis que leur dernier cochon a pris la route de l’abattoir, Andrew est pratiquement devenu vegan : «Mon expérience m’a permis de prendre conscience que rien ne légitimait que je puisse causer la souffrance, la douleur ou la mort d’un autre être doué de sensibilité, d’autant moins en sachant qu’aucune nécessité nutritionnelle ne le justifie plus aujourd’hui.»

Emilie, 25 ans, ex-ouvrière agricole dans un élevage porcin industriel du Finistère : «Quand on aime les animaux, on n’a pas le droit de faire ça»

Emilie est fille de commerçants dans une petite ville du Finistère. En classe de troisième, quand se pose le choix de son orientation, elle décide de partir en lycée agricole, avec l’espoir de trouver plus tard un métier en rapport avec les animaux. Sitôt sortie du lycée, elle tombe sur une offre d’emploi : une place de responsable maternité est à pourvoir dans un élevage porcin industriel. Sa motivation et son intérêt pour les animaux lui permettent d’obtenir le poste.

Malgré le cadre imposé par l’élevage, Emilie parvient à établir un lien avec les 220 truies dont elle a la charge : «Ces animaux ont une capacité d’apprentissage extraordinaire. Ils sont capables de reconnaître et de différencier les personnes. Mes truies me connaissaient, j’ai établi un lien de confiance avec elles. Même mes patrons n’en revenaient pas.»

Elle s’occupe également des porcelets après que les truies ont mis bas et en fait naître 5 500 chaque année. Contrairement à l’usage, elle ne peut se résoudre à «claquer» les animaux les plus faibles, c’est-à-dire à les «euthanasier» en les frappant contre une surface dure : «J’ai commencé à sauver des porcelets qui étaient dans des états catastrophiques. Je les gardais plusieurs mois en soin car je savais qu’une fois arrivés en engraissement, leur corps n’aurait jamais encaissé le rythme…» Emilie sort plusieurs de ces cochons de l’élevage et les place chez des amis.

Elle dit avoir conscience du dilemme que pose l’élevage intensif et la question de l’abattage. En 2015, elle cherche à sauver une truie qui s’est brisée une patte. La fracture dégénère en abcès, et le refuge auquel elle fait appel pour lui éviter l’abattoir n’a d’autre choix que de l’euthanasier : «Le fait de voir mourir mes truies m’a toujours été difficile. Avec le temps, on se forge un peu, mais ça laisse des traces. A cette période, j’ai commencé à dormir de plus en plus mal et à faire des cauchemars liés à l’élevage.»

Quand le camion vient emporter les truies de réforme pour l’abattoir, elles suivent Emilie en toute confiance. Jusqu’au jour où l’une d’elles résiste. Emilie se souvient encore de son numéro d’identification : 1 362. «Inséminée à trois reprises, elle restait vide. Je l’ai guidée dans le camion. Lorsque je suis ressortie, elle a compris et a essayé de sauter la barrière pour me rejoindre. C’en était trop. Je me suis dit : quand on aime les animaux, on n’a pas le droit de faire ça.»

Emilie fait alors le choix de quitter son activité. «Savoir que je l’ai abandonnée comme toutes les autres, quej’ai participé à ce système, me fait me sentir profondément mal. L’élevage intensif m’apparaît aujourd’hui comme une aberration. Même en étant un bon éleveur, un bon salarié, il est impossible de ne pas tomber dans une routine qui banalise la violence de l’élevage.» Six mois se sont écoulés depuis qu’Emilie a quitté l’élevage qui l’employait. Aujourd’hui, elle continue de prendre régulièrement des nouvelles des cochons qu’elle a sauvés et a renoncé à manger de la viande. Si elle confie commencer à retrouver un sommeil plus paisible, Emilie continue de revoir en rêve la truie numéro 1 362.

Olivier, 45 ans, ancien éleveur de vaches laitières dans les Pays-de-la-Loire : «L’élevage est un double esclavage, celui des animaux mais aussi des hommes»

Olivier a 28 ans lorsqu’il reprend, en 2000, l’exploitation laitière familiale située dans les Pays-de-la-Loire. Il possède alors une soixantaine de bovins, élevés en plein air. Pour que les vaches aient du lait, il faut qu’elles aient eu un veau. Les femelles sont souvent destinées à devenir de futures laitières, et les mâles retirés à la mère pour être engraissés comme taurillons ou destinés à la production de viande de veau. Lorsque leurs petits leur sont enlevés, les mères les appellent pendant des heures, parfois des jours : «Les autres femelles appellent aussi, ce qui montre leur capacité à ressentir la détresse de leurs congénères.»

S’il ne noue pas de relation affective particulière avec ses vaches, Olivier essaie d’être attentif à leur bien-être. Le jour où un convoi vient chercher certaines de ses vaches de réforme pour les envoyer à l’abattoir et qu’un ouvrier essaie de les faire monter dans le camion à coups d’aiguillon électrique, Olivier s’oppose fermement : «J’ai visité des abattoirs. Je sais que ce qu’il s’y passe n’est pas reluisant, mais avant que mes animaux n’en passent la porte, il était hors de question de les voir souffrir inutilement.»

Dans le même temps, il réduit sa consommation de viande. Son désir est de développer la production végétale biologique et d’abandonner l’élevage. «C’était devenu incohérent. Voir partir mes animaux pour l’abattoir, ça me faisait quelque chose. J’ai aussi visité des élevages de confrères, des porcheries et des productions laitières industrielles. Je sais combien l’élevage est devenu un double esclavage, infligé aux animaux mais aussi aux hommes.»

Olivier rapporte le témoignage d’un collègue éleveur de vaches allaitantes contraint d’intervenir de plus en plus lors des vêlages car, du fait de la sélection génétique, les veaux sont devenus de plus en plus gros. «Les vaches subissent deux ou trois césariennes, puis partent à l’abattoir.» Il parle aussi d’un confrère éleveur porcin, contraint de porter un casque antibruit à l’heure du nourrissage. «Les gars risquent de devenir sourds à cause des cris des porcs. Je me souviens qu’après avoir visité une porcherie, je toussais à cracher mes poumons à cause des poussières en suspension. Mon collègue m’a dit que ça ne lui faisait plus rien. Il avait les cils des bronches brûlés.» En 2004, Olivier vend ses derniers bovins. Aujourd’hui, cela fait quinze ans qu’il se consacre à la culture biologique. Selon lui, la transition d’une production animale à une production végétale est possible, et souhaitable. Ce n’est qu’une question d’audace.

Anna, 27 ans, ouvrière agricole dans une exploitation porcine du Maine-et-Loire : «L’élevage ne permet pas de connaître véritablement les animaux»

Le rêve d’Anna était de devenir vétérinaire. Après un BTSA Productions animales et un diplôme en management et distribution, elle exerce dans une exploitation porcine de 290 truies. Les cochons y sont élevés hors sol, sur caillebotis. Anna est seule pour gérer la maternité et le post-sevrage. Ses patrons, eux, travaillent à l’engraissement et à la production de céréales. Anna est passionnée de chevaux et met ses connaissances en éthologie au service de son métier. Dans le milieu, son profil détonne : «Je ne provoque pas la mise bas de mes truies, ne lime pas les dents des porcelets, ne pratique des injections qu’en cas de nécessité absolue et préfère travailler en prévention avec de l’homéopathie ou de l’aromathérapie. Bien que les truies connaissent toutes le même sort à la fin, je voudrais que leur courte vie se passe le mieux possible.»

Anna a pourtant conscience que les cochons souffrent de leur enfermement. Bien qu’il lui soit impossible d’établir un lien avec chaque bête, elle a découvert des animaux sociaux, capables d’interagir entre eux et avec les humains, mais aussi dotés de personnalités propres. La semaine dernière, Anna a choisi de sortir de l’élevage un mâle souffleur (utilisé pour la détection des chaleurs), destiné à l’abattage. Ce cochon baptisé Léo, elle le connaît depuis deux ans : «Il était en quarantaine lorsque j’ai été embauchée et devait être âgé de 5 ou 6 mois. Le fait que le verrat reste plusieurs années avec nous facilite la création d’un lien. L’élevage ne permet pas de connaître véritablement les animaux. J’aimerais dire que Léo est spécial, mais ce serait faux. Il a simplement bénéficié de plus de temps et d’attention pour démontrer son intelligence et sa sensibilité. Il répond lorsque je l’appelle, il s’assied, réclame des caresses. Mes patrons ont vu la relation que j’avais établie avec lui. C’est pourquoi ils m’ont proposé de le sauver.»

Anna est elle aussi devenue végétarienne. Professionnellement, elle dit se trouver aujourd’hui face à un dilemme. «J’aime le contact avec les animaux dont je m’occupe, et je me dis que mon remplaçant ne leur portera sans doute pas la même attention : cessera-t-il comme moi de castrer les porcelets, de limer les dents ? Permettra-t-il aux truies en cages de maternité de sortir se dégourdir les pattes ?»

Aujourd’hui, Anna a décidé d’en finir avec l’élevage et d’ouvrir une boutique de matériel équestre. Elle monte actuellement un dossier de viabilité pour le financement de son projet.Quant à Léo, il a rejoint un refuge animalier et foulé l’herbe pour la première fois, à la veille de la date à laquelle il devait être abattu.

(1) Certains prénoms ont été changés
Jean-Baptiste del Amo
 
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