Harcèlement de rue: vidéo incitation à embrasser les femmes de force

Le truc avec le viol et les agressions sexuelles c'est qu'il s'agit de savoir si la personne est consentante ou pas pour embrasser et/ou avoir des rapports sexuels. C'est pour ça que j'émet un doute sur la façon dont le papier signé peut passer devant le tribunal.
Mais bon d'un côté il y a la vidéo et la majorité des juges sont des femmes.
La justice est mal faite car les textes sont écrits sur des généralités (qui en moyenne paraisse juste) mais la réalité est plus complexe que ça.
Et puis beaucoup d'affaires sont sans suite car manque de preuves, j'ai porté plainte pour d'autres raisons contre quelqu'un et on m'a répondu que je n'avais pas assez de preuves (j'en avais quand même un peu).
 
Allez, dernier pavé de la soirée, promis...

Cette vidéo, et le comportement de cet imbécile m'ont mis mal à l'aise pendant plusieurs jours. Ainsi donc, c'est à ça que cet abruti congénital réduit les XX ? C'est cette image qu'il veut renvoyer des XY ? Oui, clairement, je me suis posé des questions en voyant la suffisance de ce crétin (pourtant, effectivement, plutôt pas mal physiquement, je l'admets). Mais le comportement mes braves, le comportement... Je le vois arriver sur son cheval de bataille, saisir sa prise de guerre. Qui s'est plus ou moins livrée elle-même dans la mesure où elle a acceptée que les images soient diffusées. On tombe là dans l'aliénation la plus malsaine. Que des femmes acceptent d'être réifiées ainsi, ça montre juste que Bourdieu avait raison quand il parlait de domination masculine symbolique : je te prends pour un être interchangeable, objet du lol, tu comprends c'est pour (faire) rire (mes potes). J'essaie d'imaginer la même scène avec un changement des rôles. La fille n'aurait sans doute même pas besoin de trois questions pour obtenir d'être embrassée voire pelotée. Et elle serait en prime traitée de salope. Bref, pouvoir symbolique, phallocratie vaguement discrète, aliénation. Est-il besoin d'en rajouter ?
 
Citron":3j2wakbl a dit:
J'essaie d'imaginer la même scène avec un changement des rôles. La fille n'aurait sans doute même pas besoin de trois questions pour obtenir d'être embrassée voire pelotée. Et elle serait en prime traitée de salope. Bref, pouvoir symbolique, phallocratie vaguement discrète, aliénation. Est-il besoin d'en rajouter ?

Pas forcément :
[dailymotion]x16f598_comment-embarrasser-un-inconnu-en-10-secondes_fun[/dailymotion]

je l'ai postée sur le fil du masculinisme hier : j'avais oublié qu'on en avait parlé sur le forum).

Ah Bourdieu, ce grand féministe ! :ROFLMAO:
 
(fabicha, on a n'a pas la vidéo)
 
Je n'ai jamais prétendu qu'il était féministe (lui non plus d'ailleurs), mais qu'il avait décrit les processus de domination masculine, nuance.
 
Jezebel":22ne9vhn a dit:
(fabicha, on a n'a pas la vidéo)
Ah bon ? Chez moi elle s'affiche. Voici l'URL : http://www.dailymotion.com/video/x16f59 ... condes_fun

Citron":22ne9vhn a dit:
Je n'ai jamais prétendu qu'il était féministe (lui non plus d'ailleurs), mais qu'il avait décrit les processus de domination masculine, nuance.
Pour quelqu'un qui a beaucoup travaillé sur la notion de réflexivité, ça pose un peu souci non ? Enfin, je ne vais pas me lancer dans débat sur La domination masculine de Bourdieu ici. Ça a amplement été fait ailleurs :)
 
Merci :) (et désolée, apparemment pour moi elle ne s'affiche pas... )
 
Jezebel":3ffr07pb a dit:
Merci :) (et désolée, apparemment pour moi elle ne s'affiche pas... )

j'ai corrigé le bug, conséquence de la migration SSL :whistle:
 
Fushi nous devrait des excuses publiques pour nous avoir mouchées sans fondement sur les balises vidéo sur un autre fil :whistle: ?
 
Fabicha":28q65sd3 a dit:
Fushi nous devrait des excuses publiques pour nous avoir mouchées sans fondement sur les balises vidéo sur un autre fil :whistle: ?

Non, parce que sur l'autre fil, c'était youtube, et y'a pas de bug youtube dû au passage à SSL... :p
 
Fabicha":174xysix a dit:
Pour quelqu'un qui a beaucoup travaillé sur la notion de réflexivité, ça pose un peu souci non ? Enfin, je ne vais pas me lancer dans débat sur La domination masculine de Bourdieu ici. Ça a amplement été fait ailleurs :)

Sans t'inciter à (re)lancer le débat, peux-tu m'éclairer: quel est le souci?
 
Sans relancer le débat alors :)
Cela rejoint les principales critiques qu'on a pu faire à Bourdieu. Déjà de ne pas citer ses dettes (notamment à Elias concernant l'habitus par exemple, mais il y en d'autres). Et aussi de se servir de sa connaissance et analyse des situations de domination sociale pour les appliquer dans sa propre carrière, reproduisant par là même les processus qu'il cherchait à déconstruire (et même à dénoncer à partir du moment où il décide de "s'engager" dans l'espace public). (Par ailleurs, il est réputé pour avoir été un "mandarin" dans la plus pure tradition universitaire française, donc vraiment pas glorieux, mais c'est un peu HS).
Donc, rapporté à La domination masculine, il ne s'inscrit dans aucun débat, aucun héritage (ou quasi), comme si les travaux féministes ou sur les femmes n'avaient pas existé avant lui... et qu'il inventait le domaine de recherche. De plus, concernant la réflexivité elle-même qui consiste à savoir d'où l'on parle pour objectiver son analyse : c'était un homme, blanc, appartenant à l'élite intellectuelle... Il dénonce plein de processus de domination mais pas un instant, il ne se demande dans quelle mesure il bénéficie de ce système, ni ne se remet en cause. Dès lors, sa démarche est non seulement sexiste, mais aussi incohérente et d'une hypocrisie relevant du dernier degré de cynisme (ou de narcissisme).
Crêpe Georgette, régulièrement citée ici, parle mieux que moi de ce dernier aspect du cas Bourdieu là :
http://www.crepegeorgette.com/2013/03/2 ... feminisme/
 
Citron":c7i91xge a dit:
Allez, dernier pavé de la soirée, promis...

Cette vidéo, et le comportement de cet imbécile m'ont mis mal à l'aise pendant plusieurs jours. Ainsi donc, c'est à ça que cet abruti congénital réduit les XX ? C'est cette image qu'il veut renvoyer des XY ? Oui, clairement, je me suis posé des questions en voyant la suffisance de ce crétin (pourtant, effectivement, plutôt pas mal physiquement, je l'admets). Mais le comportement mes braves, le comportement... Je le vois arriver sur son cheval de bataille, saisir sa prise de guerre. Qui s'est plus ou moins livrée elle-même dans la mesure où elle a acceptée que les images soient diffusées. On tombe là dans l'aliénation la plus malsaine. Que des femmes acceptent d'être réifiées ainsi, ça montre juste que Bourdieu avait raison quand il parlait de domination masculine symbolique : je te prends pour un être interchangeable, objet du lol, tu comprends c'est pour (faire) rire (mes potes). J'essaie d'imaginer la même scène avec un changement des rôles. La fille n'aurait sans doute même pas besoin de trois questions pour obtenir d'être embrassée voire pelotée. Et elle serait en prime traitée de salope. Bref, pouvoir symbolique, phallocratie vaguement discrète, aliénation. Est-il besoin d'en rajouter ?

Je ne crois pas que ça marcherait avec tous car:
- tous les hommes n'accepteraient pas d'embrasser n'importe quel fille contrairement à ce que l'on nous raconte
- l'effet de surprise ne jouerait pas en cette faveur car ça ne doit pas arriver souvent une femme qui fait ça
 
Fabicha":2u4iuzxi a dit:
Sans relancer le débat alors :)

Sans relancer le débat, bien entendu :)

Ta critique me paraît injuste. Ce dont tu parles fait partie des stéréotypes qui circulent à propos de Bourdieu.
Je réponds dans le détail à tes objections, non pour faire étalage de connaissances, mais pour faire partager quelques idées sur un auteur qui mérite d’être lu sérieusement. Je réponds de manière approfondie, avec du « jargon », parce que certaines questions sont complexes, ce qui explique en même temps que les stéréotypes, qui se diffusent plus facilement, aient la peau dure…




Fabicha":2u4iuzxi a dit:
Cela rejoint les principales critiques qu'on a pu faire à Bourdieu. Déjà de ne pas citer ses dettes (notamment à Elias concernant l'habitus par exemple, mais il y en d'autres).

Il est faux de dire que Bourdieu ne reconnaît pas ses dettes. La mise en forme du savoir sociologique sur laquelle repose le travail de Bourdieu relève d’un vaste effort d’intégration logique d’un grand nombre d’auteurs. Que signifie « intégration logique » ? Faire fonctionner l’apport d’un auteur à l’intérieur d’un modèle pertinent de compréhension du monde social. L’apport d’un auteur, son héritage intellectuel, n’est jamais révéré pour lui-même, il est déplacé, réactivé, etc. au sein d’un tel modèle et mis en relation avec d’autres héritages avec lesquels il entretient des relations logiques. Cette pratique d’accumulation des connaissances est une manière de faire vivre les auteurs, la meilleure manière sans doute de leur rendre hommage.
Tu évoques Norbert Elias auquel Bourdieu aurait beaucoup emprunté sans l’admettre. Elias est l’un des auteurs les plus cités par Bourdieu, des dizaines de fois. Dans les cours du Collège de France sur l’Etat, Elias est abondamment lu et commenté, autant que Marx et Weber. Dans les publications de premier rang (La Distinction, Esprits d’Etat), Elias est aussi utilisé et figure dans nombre de notes infrapaginales. Ce qui gêne peut-être, c’est que Norbert Elias ne soit pas intégré en bloc, qu’il n’y ait pas une célébration de l’auteur sous forme de paragraphes, de textes ou de livres d’hommage bien distincts. Ce n’était pas la manière de travailler de Bourdieu : l’intégration logique suppose l’absence de rameau séparé dédié à un auteur. Elias est reconnu par Bourdieu comme un sociologue « wébérien » ultraconséquent qui a su historiciser certaines thèses de Weber, notamment sur la genèse de l’Etat. Mais Bourdieu reproche à Elias de n’être pas suffisamment démonstratif (notamment sur la « loi » du monopole étatique) et de pécher parfois par anachronisme (lorsqu’il tente de retrouver, par exemple, des équivalents anciens de pratiques modernes, construisant par là une continuité artificielle entre l’ancien et le nouveau, et niant du même coup les ruptures liées aux dynamique de champs, de professionnalisation). Elias n’est pas le seul auteur à utiliser la notion d’habitus. On en trouve une définition chez Aristote, dans la philosophie du Moyen Age et les scolastiques, de même que dans la philosophie analytique contemporaine, que Bourdieu maîtrisait très bien. L’habitus chez Norbert Elias fonctionne de manière assez critiquable, notamment à travers la notion d’ « habitus national » qui, malgré toutes les mises en garde d’Elias, enferme un essentialisme assez proche de la notion de « caractère national ». L’habitus chez Bourdieu est un concept employé à d’autres fins analytiques et selon d’autres modalités.




Fabicha":2u4iuzxi a dit:
Et aussi de se servir de sa connaissance et analyse des situations de domination sociale pour les appliquer dans sa propre carrière, reproduisant par là même les processus qu'il cherchait à déconstruire (et même à dénoncer à partir du moment où il décide de "s'engager" dans l'espace public). (Par ailleurs, il est réputé pour avoir été un "mandarin" dans la plus pure tradition universitaire française, donc vraiment pas glorieux, mais c'est un peu HS).

L’univers académique est aussi un champ structuré par des rapports de pouvoir. Bourdieu y a consacré de nombreux travaux, et il est permis d’en conclure qu’il est difficile de s’abstraire de ces enjeux de pouvoir, même lorsqu’on tente d’en dévoiler les mécanismes. D’où la nécessité d’une sociologie réflexive susceptible de neutraliser les routines et les pratiques arbitraires liées à une méconnaissance de ces enjeux. Dire que Bourdieu s’est servi de son « œil » sociologique à des fins personnelles ou que, ce qui revient au même, sa sociologie était une ressource pour dominer, c’est aller vite en besogne. Un sociologue se sert-il, dans sa « pratique privée », des résultats des enquêtes qu’il publie et qu’il enseigne ? Oui, mais rarement cyniquement. Comprendre les résultats d’un-e étudiant-e (bons ou mauvais), les impasses dans lesquelles il ou elle se trouve, à partir de sa trajectoire, en mobilisant à cette fin une lecture sociologique, fait partie de ces « usages privés » de la sociologie. La théorie de l’habitus montre d’ailleurs qu’il n’est pas suffisant de connaître rationnellement les mécanismes de domination pour y échapper, car la socialisation du sociologue (notamment tout ce qui relève de sa trajectoire antérieure à l’entrée dans le monde universitaire) pèse de tout son poids lorsqu’il s’agit de s’aligner sur cette représentation rationnelle du monde. Cela vaut également pour Bourdieu. Il reconnaissait d’ailleurs, dans certaines circonstances (relations amicales, avec ses enfants, etc.), « débrancher l’analyseur ». Il conseillait de ne pas tomber dans le « goût pervers du sociologue pour l’objectivation » : ne pas appuyer là où ça fait mal quand ce n’est pas nécessaire, ne pas se servir de la sociologie en faisant profession de la servir.
Bourdieu était-il un mandarin ? Il avait un laboratoire à gérer, une revue à faire vivre, des égos à ménager. Cette vie collective propre à l’univers de la recherche, qui ne va pas sans donner de coups et sans en prendre, de la part de collègues, de la part de l’administration de la recherche, a pu donner l’impression à certain-e-s, qui ne l’aimaient pas, qu’il était un « mandarin ». La réputation d’un chercheur est fragile aussi longtemps qu’elle n’est pas consolidée par des coulées de textes, de résultats éprouvés, de travaux qui essaiment à travers des étudiants devenus collègues, etc. Il faut se protéger. Pour les relations de personne à personne, il était à l’écoute. Etonnamment disponible pour un chercheur aussi prolifique. D’autres, qui n’ont pas une œuvre comparable (on ne saurait leur en vouloir), le sont beaucoup moins.



Fabicha":2u4iuzxi a dit:
Donc, rapporté à La domination masculine, il ne s'inscrit dans aucun débat, aucun héritage (ou quasi), comme si les travaux féministes ou sur les femmes n'avaient pas existé avant lui... et qu'il inventait le domaine de recherche. De plus, concernant la réflexivité elle-même qui consiste à savoir d'où l'on parle pour objectiver son analyse : c'était un homme, blanc, appartenant à l'élite intellectuelle... Il dénonce plein de processus de domination mais pas un instant, il ne se demande dans quelle mesure il bénéficie de ce système, ni ne se remet en cause. Dès lors, sa démarche est non seulement sexiste, mais aussi incohérente et d'une hypocrisie relevant du dernier degré de cynisme (ou de narcissisme).
Crêpe Georgette, régulièrement citée ici, parle mieux que moi de ce dernier aspect du cas Bourdieu là :
http://www.crepegeorgette.com/2013/03/2 ... feminisme/

La Domination masculine s’inscrit dans la continuité des travaux d’anthropologie de Bourdieu sur la Kabylie. Ces travaux fournissent les ¾ des propos du livre. Ce n’est pas un livre d’intervention dans les Gender Studies, et on lui fait surtout reproche de ne pas l'être. Les premiers travaux de Bourdieu ont porté sur la Kabylie et ils sont à l’origine de sa théorie du "sens pratique". Les femmes prennent place dans un modèle d’explication des relations sociales qui part des mécanismes d’assignation à certaines fonctions (notamment domestiques) repérables dans l’usage pratique de certaines catégories (haut-bas, sec-humide, gauche-droite, etc.) formant un ensemble cohérent dans lequel le doublet hommes-femmes trouve son sens. C’est à partir de ce cadre que Bourdieu interroge certains travaux contemporains, mais de façon tout à fait latérale, tout en reconnaissant leur importance pour penser le genre : Judith Butler, Michel Foucault, Margaret Maruani, Nancy Henley, George Chauncey, Thomas Laqueur, etc. Partant de ses travaux initiaux sur la Kabylie dans les années 1950-60, Bourdieu fait au contraire preuve d’une grande ouverture vers les « gender studies » qui ont émergé entretemps.

Je comprends tout à fait qu’on puisse, en tant que femme, se sentir dépossédée de sa vérité intime sur le genre et sur les relations de domination liées au genre, quand un sociologue « blanc », « appartenant à l’élite intellectuelle », etc. entend mettre en œuvre une réflexion sur le genre et la domination masculine. Il y a un effet de confiscation de la parole, nécessairement plurielle, sur le genre. Une hypostase de la critique aussi. Le sociologue mâle, blanc, bourgeois, se pare de l’autorité de son statut pour « révéler » une vérité que d’autres connaissent trop bien pour l’avoir vécue. De quel droit ? Pourquoi ne pas publier plutôt un recueil d’entretiens en plusieurs volumes, réalisés par des sociologues (il faut bien qu’ils servent à quelque chose), consignant fidèlement des témoignages d’atteinte à la dignité des femmes et des « minorités sexuelles ». Là, pas de confiscation d’une parole souffrante, pas de rationalisation plaquée a posteriori sur l’expérience vécue…
Le billet de Crêpe Georgette auquel tu renvoies, et qui contient, outre un contresens sur Marx, deux maigres paragraphes sur Bourdieu citant, en les décontextualisant, les deux passages les plus connus de son livre (je le regrette, d’autres textes du site sont sans doute plus approfondis), fait état de ce sentiment partagé dans certains milieux militants : la vérité sur le genre doit d’abord être portée par des femmes et des « minorités sexuelles ». C’est vrai : la (re)prise en main de son propre destin commence par la neutralisation du discours des autres sur soi. La parole du sociologue est entachée d’impureté parce qu’elle est enfermée dans les conditions de la prise de parole (d’où vient cette autorité intellectuelle qu’on me force d’emblée à reconnaître, en dehors de toute confrontation ou débat ?) et dans les propriétés sociales du sociologue (« mâle », « blanc », « de l’élite »…). Là, le critique du sociologue se fait plus « sociologue » que le roi sociologue. Il n’y aurait donc aucune vérité susceptible de transcender son origine. Triste monde dans lequel toute parole serait systématiquement lestée du plomb de l’identité (masculine, féminine..).
Il ne faut pas juger Bourdieu à partir de sa position d’arrivée, mais à partir de sa trajectoire qui relève plutôt du parcours d’obstacles. Même si son expérience de la domination sociale n’a rien d’universel (bien que des mécanismes soient communs à toutes les formes de la domination), c’est sans doute cette trajectoire bien particulière qui l’a incité à travailler sur l’arbitraire des institutions et qui lui donne peut-être une légitimité sociale (qui ne vaudra jamais le brevet de conformité exigé par certain-e-s) pour parler de la domination masculine.
 
J'ai lu que ton premier pavé, pas les autres. C'est pas très cool ton attitude : j'ai dit clairement que je ne voulais rentrer dans un débat. Or, c'était visiblement ta seule intention. Je n'aurais pu dû t'accorder crédit.
Sinon, je te rassure, j'utilise largement Bourdieu dans mes propres travaux (non pas que ceux-ci soient importants, mais pour dire que je ne suis pas du tout anti-bourdieusienne), bien loin de moi l'idée de rejeter tout ce qu'il a apporté aux SHS, et il a beaucoup apporté.
 
Fabicha":1nro3h1o a dit:
C'est pas très cool ton attitude : j'ai dit clairement que je ne voulais rentrer dans un débat. Or, c'était visiblement ta seule intention.

Je peux t’assurer que mon intention n’était pas de te piéger. Je me suis demandé s’il fallait te répondre. Ou s’il valait mieux créer un sujet sur Bourdieu et le féminisme. Mais tu y es allée fort : « sa démarche est non seulement sexiste, mais aussi incohérente et d'une hypocrisie relevant du dernier degré de cynisme (ou de narcissisme). »

Tu comprendras sans doute ma réponse si je te dis que mon rapport à Bourdieu est autant affectif que rationnel. Mon « pavé » est une manière de prendre au sérieux le message d’un membre de la communauté dont j’apprécie d’ordinaire les interventions (comme d’autres, je lis beaucoup vegeweb, sans toujours intervenir).

Poursuivons la discussion si tu veux, ici ou ailleurs. Je serais curieux de savoir ce que tu fais des SHS (ou en SHS ?). Sinon, j’espère que nous pourrons échanger à l’avenir sur d’autres sujets.
 
ok soit. Je t'ai donc lu en entier.
La diplomatie n'est pas la première de mes qualités. Tu y ajoutes une bonne dose de maladresse et tu arrives à "sexiste, hypocrite et narcissique" en parlant de Bourdieu (et c'est à vérifier mais je crois que tu as échappé aux lapsus dont je suis fidèle usagère ; ça aurait pu être pire :p ).
Je comprends ce que tu dis, c'est un point de vue. Il est valide et légitime (non pas que ma bénédiction te soit d'une quelconque utilité, c'est juste que je ne remets pas en cause son fondement). Mais comme dans tout ce qui concerne les rapports de pouvoir/domination, la subjectivité, la réflexivité, il est partiel et biaisé. Le mien l'est d'ailleurs tout autant : il correspond à mon parcours et à mon vécu, à mon cheminement. La domination masculine constitue un brillant et puissant appareillage conceptuel, mais il s'invalide lui-même, il est "non recevable" dans le cadre des luttes féministes. Plus exactement, il s'agit pour les féministes de savoir qu'en faire, comment le recevoir, l'utiliser, le récupérer même. Je crois d'ailleurs qu'on commence à rouvrir le débat, notamment chez les féministes, maintenant que l'homme et son poids symbolique font moins d'ombre à l'oeuvre (on va le formuler comme ça faute d'autre chose).
Tu lis dans l'article de Crêpe Georgette "deux maigres paragraphes sur Bourdieu". J'y lis la contextualisation et l'inscription d'un ouvrage dans un "champ", précisément, dans lequel la neutralité n'existe pas. A tort ou à raison, on relève d'un sexe ou de l'autre, d'un genre ou de l'autre. Même les queers ne se définissent pas "sans genre", mais ont créé de nouvelles catégories : personne n'y est neutre. Bourdieu encore moins qu'un autre, de par ses multiples attributs symboliques et matériels.
Si je dois faire un raccourci (et c'en est vraiment un), je dirais que tu te positionnes concernant ce livre dans le cadre du champ universitaire et sociologique. Je (et d'autres féministes) me positionne par rapport à ce livre dans le cadre du champ des luttes féministes. Les deux ne sont d'ailleurs pas forcément incompatibles, mais je crois qu'ils l'étaient du vivant de Bourdieu, ne serait-ce que parce qu'il défendait son livre en tant qu'homme, en tant que chercheur précisément (mais c'est peut-être simpliste comme vision des choses).

D'une façon générale, je trouve très dommage et très dommageable au travail de Bourdieu et à celui des bourdieusiens aujourd'hui qu'on ne puisse faire de critique de Bourdieu sans susciter des réactions souvent assez épidermiques. Il est vrai que j'ai été formée en grande majorité par des élèves/anciens collègues de Bourdieu et que j'ai peut-être, de ce fait, une image des choses un peu déformée sur ce point.

Sur l'aspect mandarin et élitiste, cela s'inscrit dans un contexte personnel dont j'ai du mal à me dépatouiller depuis un moment. Je ne veux/peux pas renter trop dans le détail ici, mais si ça t'intéresse, on peut continuer par mp. Je me sens complètement désemparée face à l'état de la diffusion de la recherche en France. J'y ai un gros pied dedans au niveau professionnel, j'ai bossé dans des structures de différents types, avec des projets et profils très variés, cela fait un peu plus de 10 ans maintenant. Rien n'y fait : on tombe toujours sur le même petit cercle intellectualo/germanopratien/normalien quelle que soit l'orientation politique de la structure, quel que soit même le type de structure/projet. Consanguinité, reproduction sociale, et pratiques professionnelles scandaleuses, complètement hors-la-loi (exploitation des étudiant.e.s/auteur.e.s, harcèlement moral et sexuel banalisés, entretien volontaire de relations de dépendance et précarité, etc.). C'est scandaleux, surtout venant de personnes qui, pour la plupart, se revendiquent de gauche, "égalitaristes" (gros guillemets), et travaillent à déconstruire les rapports de domination. Pire que tout, ils sont, pour la plupart, d'une sincérité complète dans leurs engagements politiques. Je me retrouve, à mon modeste niveau, bloquée dans ces tensions moi aussi. J'ai trouvé une petite place en marge, une petite niche dans laquelle je suis préservée, mais être témoin de tout cela me met très mal à l'aise (je fais quand même partie d'associations, je fais des trucs hein, mais ça semble peanuts). Très sincèrement, je ne sais pas ce qu'il en est de Bourdieu spécifiquement, il avait peut-être toutes les bonnes raisons du monde, mais j'ai arrêté de trouver des excuses parce qu'à ce niveau de malaise dans le milieu intellectuel (chercheurs, éditeurs, journalistes), on est tous un peu responsables. Et pendant ce temps, l'ignorance et ses sbires gagnent du terrain en France. La recherche est un service public, elle doit être au service de la société. Or, elle reste, dans son ensemble, en haut de sa montagne, incapable de retrouver le chemin de la vallée. Enfin, c'est vraiment la vision que j'en ai.

Voilà, moi aussi je peux faire pavés :tongue: ;)
Et toi, c'est quoi donc ton lien avec les SHS ?
 
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