Les bouchers-charcutiers demandent à être protégés face à « la violence » végane

kob27g":1ga8hdv4 a dit:
J'ai l'impression que maintenant quand on dit je suis végétarien, végétalien, il n'y a pas de problème. Mais si on dit vegan, le regard change.

Finalement, je me demande si je préfère pas recevoir un "petit cri de la carotte" ou "le lion mange la gazelle" comme avant...

Effectivement, le regard change, et il est temps que le gouvernement se rende sérieusement compte qu'il y a du monde en colère. Je n'aime pas l'idée d'aller deverser du faux-sang (c'est sans doute maladroit), mais je pense que les vrais responsables sont les personnes qui se sont opposées à la loi qui n'a pas réussi à passer cette années.
Rappelons qu'il y a de la torture pratiquée en masse, de manière organisée, et c'est tout à fait légal. C'est un sujet de la plus haute importance.

Juste un exemple :
Comment expliquer qu' on castre les conchons à vif, à la cisaille ?
Comment expliquer qu'une loi interdisant cette pratique n'a pas réussi à passer cette année ?

Deux journalistes (Mangeurs de viande tous les 2) avaient commenté à ce sujet le mois dernier, et je je reposte ici le lien pour bien illustrer (écoutez entre 16:15 et 17:40).
La dernière phrase dit (je cite) : "Je comprends que les défenseurs de la cause animale se déchaînent un peu".

(entre 16:15 et 17:40).
https://www.youtube.com/watch?v=LaT61c0iWvg
 
Pour ton exemple, c'est peut-être parce que des fois, la loi est à la traine.
En Belgique, Gaia a fait campagne contre la castration des porcelets à vif. Résultat : les chaines de supermachés se sont engagées à ne plus se fournir auprès des éleveurs qui font encore ça.
Comme quoi l'opinion publique peut être + efficace que les lois
 
Personnellement, je pense qu'une démonstration de colère était nécessaire après le rejet massif des propositions d'amendements pour le bien être animal, dans la loi Egalim. (Et il est même possible que les vitrines cassées aient eu un impact sur le vote de l'option végétarienne dans les cantines, par les députés en allant contre l'avis du gouvernement, récemment).
Mais c'est la façon dont elle s'est exprimée, les cibles visées, et le dosage de cette violence, qui semble incontrôlable (si ça se transforme en incendies, notamment) qui est un vrai problème. Le but aurait pu être de montrer la colère, et montrer aux politiques qu'ils doivent prendre le sujet au sérieux. Si ça se transforme en violence intense qui pousse à un répression massive sans discernement, avec le soutien de l'opinion publique, ça étouffera la majorité du mouvement. On ne peut pas tenir éternellement face à des amendes qui croissent de manière exponentielle ou qui se transforment en peines de prison. Il y a un moment où les militants seront tous neutralisés par la justice ou fuiront le mouvement. Surtout si la répression retombe également sur les associations qui ont justement pour fonction de fédérer, de rassembler, d'attirer les militants grâce à une structure, une organisation. Si elles sont dissoutes ou interdites, ça donnera des militants éparpillés, incapables de s'organiser et qui abandonneront "la lutte".

Donc il y a un dosage à avoir.
Et surtout, viser les bonnes cibles. Non, les petits commerces dans lesquels il n'y a que des morceaux de viande ne visibilisent les victimes pour personne. On visibilise les victimes quand on les voit vivantes, qui luttent pour leur vie. Ou en tout cas, entières (dans les happenings solennels, où chaque militant porte le corps d'un animal, par exemple). On visibilise les victimes quand on les filme dans un élevage, dans un abattoir ou quand on les sauve.
Quand on casse un vitrine, on visibilise la vitrine et le petit boucher du coin qui semble perdu par "tant de violence" et qui ne fait que travailler gentiment pour faire plaisir à ses clients.

Quant au faux sang versé, s'il y avait zéro médiatisation, ok. Il y a une symbolique, il y a quelque chose. Je ne pense pas que ça soit très efficace pour créer un électrochoc chez les mangeurs de viande (parce qu'on reste toujours sur une action un peu brouillon) mais ça sera toujours infiniment mieux que les vitrines cassées la nuit, comme de pauvres délinquants.

M'enfin honnêtement, là, l'action nationale de faux sang dans le contexte actuel, d'après moi, c'est absolument neutre. Aucun impact ni positif ni négatif. En comparaison d'un acte de vandalisme pur, c'est un cran en-dessous, donc ça ne mettra pas "plus de pression" sur qui que ce soit. Et ça ne sera perçu non plus de la même manière, ça ne produira pas plus de rejet (ou de peur). Et ça ne sert à rien quant à la médiatisation, puisqu'elle est déjà là depuis bien longtemps.
D'après moi, c'est surtout du recyclage, qui n'apporte (ou ne retire) plus rien dans le contexte actuel. Si on veut produire un effet nouveau, il faut faire quelque chose de nouveau.

Et j'ai surtout l'impression que les partisans du "conflit pour du conflit", "rapport de force pour le rapport de force" n'ont aucune espèce de vision globale. Le conflit, la tension est un outil à utiliser quand on propose une alternative douce en parallèle. On commence par négocier, et si on est ignoré, on intensifie la pression, et on dose. Et on pose des objectifs clairs et accessibles. Et on fait retomber (temporairement) la pression quand l'autre partie finit par céder à l'objectif à court terme qu'on a proposé. L'autre partie cède parce qu'elle sait que ça va faire retomber la pression, elle voit qu'elle a quelque chose à y gagner et peu à perdre.
Donc on réfléchit aux cibles, aux objectifs, aux soutiens qu'on peut avoir pour nos objectifs, dans quelles situations la montée de pression va être nécessaire et avoir des chances d'aboutir à des résultats.

Si on fonce dans le conflit juste parce qu'on aime le conflit et qu'on veut le pousser à son maximum, sans être capable d'identifier clairement nos objectifs, les étapes intermédiaires, les cibles, les alliés qu'on peut obtenir (et les moyens de se faire de plus en plus d'alliés à mesure que les lignes vont bouger)... et si on n'est pas capable de se rendre compte qu'on est en toute petite minorité contre l'écrasante majorité de la population (si on décide de se lancer trop tôt), et que la majorité est capable d'utiliser au minimum les mêmes méthodes que les nôtres (mais avec 20 fois plus de force) si elle nous ressent uniquement comme une menace (sans négociations possibles)... Ben on fonce dans le mur comme des imbéciles, on s'écrase et on fait comme tous les mouvements convaincus d'avoir raison qui ont mal dosé leur violence, qui n'ont convaincu qu'eux-mêmes et qui sont retournés dans l'ombre... (Il me semble par exemple que cette espèce d'obsession pour les actions "violentes" au nom de la justice est assez récurrente dans le milieu anar. Ben excusez-moi, mais en 150 ans, j'ai pas l'impression que cette stratégie ait donné des résultats époustouflants... Il est où, le pays anarchiste sans dirigeants ? Personnellement, ça ne me donne pas spécialement confiance.)

Il y a une espèce d'amour pour les mots "tension", "rapport conflictuel", "violence", "rapport de force avec l'Etat", etc. dans de grandes et belle phrases bien abstraites qui remuent les tripes d'un certain public, mais concrètement, quels sont les résultats, les étapes qui doivent s'enchaîner, le scénario attendu ? Concrètement, à quel moment et pourquoi les pouvoirs politiques décideraient finalement de voter des lois en notre faveur ? En opposition avec l'opinion publique (En espérant que ça dure plus qu'un mandat électoral ? Ou en instaurant une dictature ?) ? En accord avec l'opinion publique ? Quelles lois ? Ou alors ça se ferait sans les pouvoirs politiques, sans jamais chercher à infiltrer les institutions et le monde politique, puisqu'ils sont désignés comme les ennemis éternels, et il faut donc prendre le pouvoir avec des fourches, de torches et des fusils ? Mais il faut donc avoir l'opinion publique de son côté pour avoir suffisamment de gens pour porter ces fourches, torches et fusils ? (Ou bien il faudra des fourches dix fois plus solides que les fourches de nos opposants dix fois plus nombreux ?...) Mais alors, après avoir passé son temps à répéter que l'opinion publique n'avait aucune espèce d'importance et qu'on voulait seulement se poser dans le conflit, il faudrait quand même réussir à convaincre l'opinion publique à un moment donné ? A quel moment, comment, pourquoi ?

Alors que ça serait tout de même vachement bien que tout le monde soit capable de prendre le temps d'articuler ce genre de réflexions : https://questionsdecomposent.wordpress. ... rontation/
 
NicolasJ":2j5ox95k a dit:
Mais peut-être que sans céder on peut quand même être un peu stratégiques et bien choisir nos combats. Là le truc confrontationnel avec les boucheries ça me semble pas le plus productif quand même, et pas tellement le meilleur contexte pour bien mettre en valeur pourquoi notre combat est juste.
Je comprends bien l'idée de stratégie, mais alors quelles sont tes préconisations pour ce contexte ?
Se taire, laisser retomber les tensions, se faire oublier, pour reprendre de plus belle plus tard ?
Soyons clairs : je dirais pas que j'ai des préconisations précises, on est bien d'accord que c'est plus facile de critiquer que de proposer un plan à toute épreuve.

Mais je pense quand même qu'il y a une sacrée marge entre « aller au contact encore avec les boucheries » et « se taire »... ce qui me semble pas adapté au contexte dans cette action « journées du sang versé », c'est d'une part de continuer à se centrer sur les boucheries, et d'autre part de comporter des gros risques de débordements. À peu près toute autre action qui évite ces problèmes me semble adaptée. Par exemple la manif contre la chasse qui a eu lieu ce week-end à Paris, ou la campagne de zoopolis contre l'extermination des rats à Paris, ou toutes les actions qui sont sur l'agenda L214... en fait un peu toutes les actions qu'on fait habituellement, quoi.

Donc pas du tout se taire, mais juste continuer à militer de façon générale plutôt qu'insister dans l'espèce de face-à-face avec les bouchers. Face à l'emballement médiatique essayer de dire « eh regardez tout ce qu'on fait et qu'on analyse et qu'on partage, notre action ne se réduit pas à un affrontement avec les bouchers ».

Est-ce que vous pensez vraiment que ceux ou celles qui ont décidé de casser des vitrines n'ont fait aucun choix stratégique, et ont juste décidé de taper dans le premier venu ?
Je pense qu'il y a des tas de trucs qui ont pu influencer leur choix, qui peuvent aller des réflexions stratégiques posées, à un truc malsain de gagner du statut dans certains milieux en ayant l'air plus « radical·e » que les autres, en passant par un besoin impérieux d'agir pour lutter contre la sensation d'impuissance et exprimer sa révolte, ou plus vraisemblablement un mélange des ingrédients ci-dessus et d'autres encore.

Comme j'essayais de le dire bien plus haut dans ce topic je trouve important d'éviter de dire « tu n'es qu'un imbécile qui n'a pas réfléchi » quand on pourrait dire « tu y as sans doute réfléchi mais j'y ai réfléchi aussi et je ne suis pas d'accord avec toi ». Par ailleurs, qu'une personne prenne éventuellement des risques personnels dans ses actions ne rend pas ses réflexions ni plus ni moins correctes que les autres.

Clairement le débat sur l'usage (mesuré) de la violence est complexe, je pense que des personnes raisonnables peuvent avoir des opinions divergentes dessus et qu'on va pas le résoudre ici. J'avais cité plus haut la page wikipédia (anglophone, désolé) sur la diversité des tactiques qui (avec ses références) donne quelques pointeurs pour y réfléchir, il y aussi celle sur « l'effet de l'aile radicale » qui peut être intéressante, notamment sa section sur les circonstances favorisant un effet positif et celle sur l'usage de la violence.

Si l'on en croit la première de ces deux sections, l'effet de l'aile radicale marche mieux si :
- les « modérés » et les « radicaux » sont bien séparés : c'est un point où je trouve cette action journées du sang versé dangereuse, parce qu'elle se veut non-violente (donc « modérée » sur les moyens d'action) mais en même temps ça me paraîtrait pas ultra-suprenant que des violences (donc les moyens d'actions « radicaux ») y soient quand même associées, ce qui brouillerait les pistes
- il y a déjà un certain élan au niveau de la cause : bah comme tu le constates toi-même, pour l'instant ça reste assez petit, du coup ça tendrait à indiquer qu'on est pas à un stade où des actions violentes risquent de vraiment renforcer le mouvement
- au pic de l'activisme, juste avant de gagner des concessions : réalistement, on y est pas encore (en tout cas pas des concessions genre fermer les abattoirs)
- la polarisation est faible - c'est un autre point où je trouve cette action inappropriée : en continuant à cibler les boucheries elle risque d'accentuer la polarisation, ce qui n'aide pas la suite du militantisme.

NicolasJ":2j5ox95k a dit:
les dénonciations produites par les activistes de L214 ont impacté peu de gens de manière significative [...] La population végane en France aujourd'hui, c'est entre 300 000 et 600 000 personnes.
C'est sûr qu'on progresse très lentement et que c'est non seulement très frustrant, mais d'une injustice horrible parce que pendant ce temps les animaux meurent par milliards. Donc il faut constamment chercher à améliorer nos stratégies pour amener plus de changement plus rapidement. Juste je pense pas que l'action de 269 Life soit la bonne pour ça dans le contexte actuel, pour les raisons évoquées plus haut.

C'est pas parce que je pense pas que c'est la bonne action en ce moment que je pense qu'il faut se taire, au contraire.
 
Tant qu'on n'aura pas un minimum de soutien de la population, on pourra faire toutes les actions possibles et imaginables, "violentes" ou "non-violentes", les possibilités d'arriver à des lois contraignantes seront tués dans l'oeuf. N'est-ce pas cela qu'on vise : obtenir des lois qui protègent les animaux et interdisent leur production, leur exploitation, leur abattage, etc ?

Pour faire simple : casser des boucheries et brûler des abattoirs attire l'hostilité de tous les acteurs de l'exploitation animale, des consommateurs de viande, des média "carnistes" à la botte des industriels, des élus et d'une majorité des autres militants animalistes. C'est se mettre le monde entier à dos. Bref : ça n'a aucun intérêt pour faire avancer la cause. Le constat est là !

Ca sert juste à quelques activistes pour évacuer leur frustration (que je partage) et stratégiquement, c'est nul.

Une bonne partie de la population, notamment grâce aux actions de L214, est au moins sensible aux conditions d'élevage et d'abattage industrielles. Attaquer des PME (et pas les gros industriels) risque juste de casser le peu de communication qu'il existe entre consommateurs et militants.
 
kob27g":89dwz3ud a dit:
J'habite dans l'Ain, donc pas très loin du fameux abattoir incendié.
Tout à l'heure, je parlais avec un responsable local de l'association "Artisans du monde". Depuis des années, Artisans du monde a un rayon avec quelques produits dans un petit magasin de producteurs locaux (viande, fromage, fruits, légumes...) comme on en trouve beaucoup dans le milieu rural.
Parmi les produits du rayon Artisans du monde se trouve quelques tablettes de chocolats avec le logo "Vegan".
Et bah figurez vous que le magasin de producteurs ne souhaite plus que le logo vegan figure sur des produits vendus dans un de ses rayons !!!

Artisans du monde doit soit coller une étiquette sur le logo vegan soit retirer ses produits...

Voici l'illustration... Toutes les tablettes de chocolats ont la petite étiquette.
 
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