Antispécisme et contradiction (attention, avocat du diable)

je doute que l’observateurice spéciste averti va commettre une erreur d’appréciation plus grave qu’un.e autre qui serait antispéciste
Ce serait faire peu de cas des effets de la socialisation des scientifiques sur le raisonnement, l'observation et la production de données.

je pense que les classifications sont au contraire dynamiques, au contraire des appellations vernaculaires
Le propre des taxinomies (quelles qu'elles soient) est un effet d'inertie. Je ferais une différence entre une appellation de sens commun et une conceptualisation adéquate prenant en compte un ensemble de variables pertinentes (biologiques, contextuelles, sociales, etc.).

Je citerais volontiers des collectifs
C'est à ça que je pensais bien sûr.

De mon point de vue, je vois toujours l’antispéciste comme une manière de voir le droit animale par un certain prisme militant qui n’a pas d’application précise ou d’intérêt conceptuel flagrant.
Heureusement que je n'y ai pas consacré de développements trop longs et que je n'ai pas cherché à convaincre ;).
Peux-tu m'indiquer des références que tu trouverais pertinentes dans le cadre de nos échanges pour que je me fasse une idée moi aussi ?
 
Ce serait faire peu de cas des effets de la socialisation des scientifiques sur le raisonnement, l'observation et la production de données.
Mais au delà de l’hypothèse, est-ce qu’un biais à propos de la conception de l’espèce a été mise en évidence dans un article éthologique récemment, par rapport à un travail similaire n’y faisant pas appel? En gros : est-ce qu’on a des preuves concrètes de cette influence?

Le propre des taxinomies (quelles qu'elles soient) est un effet d'inertie.
Oui, mais, au temps pour moi si je ne comprends pas l’argument : l’antispécisme ne résoud pas le problème, on ne peut devancer cette inertie, càd cette absence de connaissance. Si une sous-espèce par allopatrie se mélange peu avec une espèce d’origine, et que l’on ne s’en aperçoit pas par manque de connaissance, en quoi l’antispécisme résoud quoi que ce soit? Ou je saisis mal le concept, et je m’en excuse d’avance.

Peux-tu m'indiquer des références qui tu trouverais pertinentes dans le cadre de nos échanges pour que je me fasse une idée moi aussi ?
C’est à dire? Je comprends mal ta demande, au temps pour moi : tu voudrais des références qui indiquent que la notion d’espèce est utilisée en gestion des populations concrètement?
 
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Mais au delà de l’hypothèse, est-ce qu’un biais à propos de la conception de l’espèce a été mise en évidence

Il ne faudrait pas perdre de vue la question de fond. En tant que véganes (antispécistes ou non), notre problème est celui de la construction de relations d’égalité et de solidarité avec les animaux, notamment sur des fondements éthiques clairs et solides. L’antispécisme n’a pas vocation à réfuter la notion d’espèce dans l’absolu. En revanche, si des travaux font état d’interventions en faveur de l’égalité animale en se fondant sur la classification des espèces, je veux bien les lire.

Pour répondre à ta question à partir d’un exemple concret, un grand nombre de travaux scientifiques sur la définition des « espèces invasives » (notion intégrée aux politiques européennes), sont de part en part traversés par des représentations anthropocentrées et normatives que des antispécistes ne pourraient pas reprendre à leur compte. Voici, par exemple, le passage d’un texte scientifique traitant des « espèces invasives » : « Invasive species such as the zebra mussel (Dreissena polymorpha), which can clog water pipes for electric power plants and municipal and irrigation water supplies, cause tangible economic damages (...) Taken alone, the estimated economic damages resulting from individual invasive species can be significant. For example, since its introduction, the unpalatable weed, leafy spurge (Euphorbia esula), has spread to more than 5 million acres of rangeland in the northern Great Plains, causing estimated production losses, control expenses, and other economic damages in excess of $100 million per year (...) Recent studies that have attempted to estimate the total national impact of invasive species also suggest that the overall magnitude of annual eco- nomic change exceeds the federally-defined threshold of $100 million per year for “major” economic impacts » (« Risk Assessment for Invasive Species », New Mexico State University, Department of Fish, Wildlife and Conservation Ecology, 2004).
Je laisse apprécier la tonalité de ces passages où la notion d’ « espèces invasives » est utilisée de manière objectiviste et normative : les auteurs ne se posent à aucun moment la question de leur rapport à l’objet et ne voient pas que ce qu’ils en disent est déterminé par une vision anthropocentrée de l’intérêt collectif, ici économique. Et je pourrais multiplier les exemples à partir d’autres textes. Imagine-t-on des antispécistes mobiliser un tel discours ? J’ai la faiblesse de croire que le sujet serait traité différemment, à commencer par une critique de cette notion d’ « espèces invasives ».


l’antispécisme ne résoud pas le problème, on ne peut devancer cette inertie, càd cette absence de connaissance.

Ce n’est pas ce que je dis. Une taxinomie officielle (la classification des espèces) présente un ensemble de savoirs stabilisés et donc relativement figés par rapport à la science en train de se faire, là où une conceptualisation souple et immédiatement contextualisable (par ex. les « animaux liminaires ») permet de poser de bonnes questions et de résoudre des problèmes dans une perspective qui tend à être celle de la solidarité et de l’égalité animales.
Il ne faut pas confondre une taxinomie officielle et le dernier article de la revue Nature, de même qu’on ne confond pas la langue du dictionnaire de l’Académie et la langue parlée.


C’est à dire? Je comprends mal ta demande?

J’ai l’impression que nos questions s’éloignent du paradoxe que soulevait le message initial de Zigzag (que nous avons résolu il me semble) et tendent de plus en plus vers une critique tous azimuts de l’antispécisme, sans proposer pour autant une alternative cohérente.
Pour ma part, outre la clarification de la notion sous-jacente d’égalité et les conséquences pratiques (en termes de droits notamment) de l’antispécisme, j’ai évoqué les raisons de mon attachement à cette étiquette qui renvoient à la fois à un principe de modestie devant le foisonnement et la complexité du corpus antispéciste, à une posture critique vis-à-vis des usages discriminants, et dans certaines circonstances croisés (genre, race, classe), de la classification d’espèce, et enfin à une définition de la « question animale » permettant d’écarter des hypothèses fantaisistes (par ex. un vitalisme intuitif généralisé) et s’articulant au véganisme sans s’y substituer.
Pour le reste, on trouve de nombreux ouvrages sur l’antispécisme, et pour débuter la synthèse de Valéry Giroux (L’antispécisme, PUF, Que sais-je, 2020) qui, bien que brève, présente des éléments de réponse à beaucoup de nos questions.
Pour y voir clair et me faire une idée, j’aimerais donc lire une ou des références de travaux présentant les vertus que tu as évoquées dans tes messages précédents : vitalistes avec cette idée de « gradient de considération éthique », traitant de la question animale sans « prisme militant », mais avec des « applications précises », des avancées « conceptuelles flagrantes », et fondés sur une définition scientifique, actualisée et non discriminante de l’espèce.
 
La mise en oeuvre de théories est souvent faite de pis-allers, précisément.

Que feraient des véganes non-antispécistes si ce n'est mobiliser les méthodes les plus rationnelles possibles à l'appui de leur argumentation et de leur action ?
Pour mémoire, je n'ai jamais défendu une démarche végane anti-spéciste comme étant une meilleure alternative, simplement je ne saisis pas la cohérence du projet anti-spéciste qui me semble une impasse dans sa revendication égalitariste dans la mesure où l'on décide à la place de communautés, qui plus est artificiellement constituées puisque les individus de décident pas de leur appartenance à telle ou telle autre. Mais je vois un peu mieux en quoi cela peut être ce qui s'en rapproche le plus. Je pense donc que j'adhère un peu plus à cette "étiquette" malgré cela, pas encore complètement quand même.
J'arrête ici :)
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EDIT: avant de m'arrêter, je viens de lire votre débat sur la classification (mon navigateur ne l'avait pas affiché, bizarre). C'est une bonne illustration des limites du projet antispéciste comme projet politique égalitariste en l'absence de modalités d'expression directe des individus pour définir leur mode de représentation et leur appartenance à un groupe plutôt qu'un autre. La classification par espèce et la classification par intérêt restent des classifications élaborées en l'état des connaissances à un moment T (et pas forcément avec consensus qui plus est). Les fondements épistémologiques des connaissances évoluant, leurs conclusions également. Toute classification est intrinsèquement humaine, sans aucun moyen d'apprécier la légitimité d'une plutôt que l'autre du point de vue des agents (qui pourraient par ailleurs tout aussi bien rejeter le principe même de classification). La substituer au libre-arbitre par le biais de traducteurs est une meilleure option que ce qui existe aujourd'hui, mais on reste éloigné d'un rapport d'égalité, pour ce qui est des individus en tout cas.
 
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@Xav

Pour l'exemple de la moule zébrée et de l'euphorbe que tu donnes: je ne pense pas que définir des individus par leur nom d'espèce les objectifient moralement, au contraire.
Nommer quelque chose, c'est le faire exister. La notion d'espèce définit ici un type d'individu et ses caractéristiques, ses besoins, son impact sur l'environnement, et ça me semble plus un gain éthique qu'autre chose. Le souci pour un groupe d'animaux particulier ne peut commencer que quand on sait qu'il existe, et je pense que la distinction d'espèce a plus fait pour développer notre empathie à leur égard que l'inverse : C'est cette précision qui nous fait distinguer les insectes bioindicateurs d'un certain biotope qui sont traditionnellement confondus avec "les mouches x ou y", ensemble vernaculaire d'autrefois. Dans le même ordre d'idée, quand un ravageur ou un invasif menace, la distinction d'espèce nous permet de ne pas le confondre avec une espèce native ou qui ne pose pas de problème aux communautés animales déjà présentes, et ainsi de protéger cette dernière.

Soit dit en passant, les espèces invasives peuvent impacter lourdement leur environnement, écologiquement et/ou économiquement. Et l'économie impacte le bien-être des humains, en plus des communautés animales non-humaines. le dilemme éthique n'est pas simple, l'action contre les invasifs peut être légitime, d'autant plus si cette perturbation a été causée par l'humain à la base: Iel porte alors la responsabilité du bien-être des communautés animales alentours. Dans ce sens, la connaissance et la distinction des espèces est fondamentale à une action éthiquement appropriée.... mais ce n'est en tout cas pas à l'auteur.e du papier de juger de la moralité de l' "invasion" (oui, on pourrait changer le terme) : la moule zébrée cause de grosses pertes économiques sur les écluses et les coques des bateaux, le papier décrit mais ne prescrit pas, et c'est normal.

Maintenant, je pense que notre désaccord est surtout sur la vision de la notion d'espèce : tu penses (corrige-moi si je dis des bêtises) que la classification actuelle est imprécise, éculée et/ou empesées d'une culture biaisée concernant notre vision des animaux et de l'éthique, la "taxonomie officielle" comme tu l'appelles si je ne trahis pas ta pensée.
Je pense que la classification actuelle est au contraire dynamique, en changement permanent et modifiée par des publications incessantes de réassignement de groupes dans d'autres ensembles selon les dernières avancées. Pour moi, préférer la notion de communauté par rapport à l'espèce, c'est un peu réinventer la roue, puisque la classification actuelle l'intègre déjà (RECOFGERI, dont le I est l'individu)

Concernant le vitalisme : je ne connais pas de livre ou d'article solide sur ce sujet. Je pense qu'il n'y en a pas, effectivement, alors qu'il y a beaucoup de livres et d'atricles sur l'antispécisme.

@screugneugneu ,peut être que je devrais y réfléchir encore un peu, mais ne penses-tu pas qu'on peut avoir une assez bonne idée des préférences des animaux non humains pour déterminer des choix éthiques à faire si on se sent, pour une raison ou une autre, responsables de certaines communautés animales en tant qu'humain? Ou j'ai compris de travers? (au temps pour moi si c'est le cas)
 
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@screugneugneu ,peut être que je devrais y réfléchir encore un peu, mais ne penses-tu pas qu'on peut avoir une assez bonne idée des préférences des animaux non humains pour déterminer des choix éthiques à faire si on se sent, pour une raison ou une autre, responsables de certaines communautés animales en tant qu'humain? Ou j'ai compris de travers? (au temps pour moi si c'est le cas)
Au niveau macro, on peut supposer que ce soit assez simple, pour les communautés/espèces qui peuvent/veulent vivre en totale indépendance des humains. Notre rôle consiste alors alors leur garantir des espaces protégés de nous. Mais il me semble que c'est plus compliqué dans des situations de cohabitation. Dans un système auto-référent, même avec les meilleures intentions du monde, la marge d'erreur peut passer inaperçue ou être facilement sous-évaluée, les angles morts/impensés plus encore.
Encore une fois, cela ne veut pas dire qu'il faille rester passif, l'antispécisme constitue de toute façon un progrès présentement.
 
Je conclus également pour ma part, en répondant aux dernières remarques.

- Sur la représentation des animaux non-humains
Toute représentation (parler ou agir « au nom de ») implique un risque de distorsion au détriment des représenté-e-s. Pour autant, l’antispécisme n’est pas réductible à un slogan égalitariste et présente un ensemble de méthodes, notamment du point de vue de la représentation.
Lorsque des véganes non antispécistes, ou critiques à l’égard de l’antispécisme, ne limitent pas leur action au refus de consommer de la chair animale ou le produit de l’exploitation animale, par exemple en participant à une marche (pour la fermeture des abattoirs, contre la fourrure ou la corrida), en signant une pétition, en distribuant des tracts, etc. il s’agit bien de parler et d’agir « au nom de ». De même, une grande part des interprétations de la condition animale que les véganes mettent en jeu, ne serait-ce que dans les conversations ordinaires avec des proches, supposent une définition, souvent intuitive, des intérêts des animaux, de leur souffrance, de leurs aspirations, etc. Mais sur quels fondements ? Les critiques adressées par certain-e-s véganes à l’antispécisme les concernent également et il serait injuste de rejeter a priori la gamme des principes de réflexion et d’action proposée par l’antispécisme au motif que toute représentation implique distorsion et domination. C’est une façon de renoncer à prendre en charge cette difficulté au nom d’un idéal (un idéal de relations entre humains et animaux strictement égalitaires et horizontales) qui ne peut éventuellement se concrétiser qu’à la suite d’étapes intermédiaires supposant la mise en œuvre de mécanismes de représentation.

- Sur l’espèce comme classification scientifique
L’antispécisme ne questionne pas la scientificité de l’espèce en tant que classification contemporaine, mais l’articulation de cette classification à des schémas anthropocentrés et hiérarchisants, y compris dans des textes scientifiques.
Le fait de savoir s’il est possible de fonder une société plus égalitaire et plus solidaire avec les animaux non humains à partir de la notion scientifique d’espèce est une question qui me paraît à la fois rhétorique et secondaire.
La construction scientifique de la notion d’espèce est complexe, et se fonde sur des écrits de statuts différents. La taxinomie internationale des espèces est moins labile que les recherches et les découvertes scientifiques qu’elle intègre après coup. Mais la question centrale reste celle des usages hiérarchisants et anthropocentrés de cette taxinomie et de ces recherches.
Les concepts ad hoc auxquels les antispécistes peuvent avoir recours (comme les « animaux liminaires ») n’ont évidemment pas la même fonction que la classification scientifique d’espèce. Il s’agit de procéder à un autre découpage des relations entre animaux humains et non humains en partant d’un certain nombre de principes (comme la « souveraineté » des communautés animales) permettant d’orienter l’action.
Vouloir faire un tableau des mérites respectifs de la notion scientifique d’espèce et des concepts ad hoc que mobilisent les antispécistes, en attribuant de bons et de mauvais points, est un exercice vain : ces instruments intellectuels prennent leur sens dans des univers partiellement différents (partiellement car ils peuvent par exemple contribuer, de manière conflictuelle ou non, à l’élaboration des politiques publiques) et n’ont pas les mêmes finalités. Comparaison n’est pas raison.
Si on juge que les concepts dont se servent les antispécistes n’apportent rien, il faut développer un minimum le propos, ne serait-ce que par égard pour les militant-e-s et par considération pour les auteur-e-s et leur production.
 
Toute représentation (parler ou agir « au nom de ») implique un risque de distorsion au détriment des représenté-e-s.
Tout à fait, avec cette différence que les humains peuvent choisir qui les représente ou se désolidariser à titre individuel d'un groupe, voire constituer leur propre mouvement dans certains cas, etc. Ça ne veut pas dire que c'est parfait ou que ça fonctionne sans réserve, mais en posant les termes sous le prisme d'agency, la problématique ne devient pas du tout la même si on se place du point de vue des individus animaux ou des individus humains représentés.

es critiques adressées par certain-e-s véganes à l’antispécisme les concernent également et il serait injuste de rejeter a priori la gamme des principes de réflexion et d’action proposée par l’antispécisme au motif que toute représentation implique distorsion et domination
On est d'accord.
 
A l'heure actuelle, nous en sommes si loin. Si vous regardez combien d'animaux sont abattus pour la viande chaque jour, vous pouvez comprendre combien...
 
Bonjour (et coucou aux gens que je connais)
J'espère que tout le monde va bien.

Je déterre un peu (un an, bon...) ce sujet pour revenir sur la base et les termes-même du débat :

- avant de vouloir déterminer ce que devrait être l'anti-spécisme "à terme", il faut je pense voir ce terme pour ce qu'il est aujourd'hui dans une société qui en est très loin comme dit plus haut, au même titre que beaucoup de sexistes renient le terme "féminisme" car pour ces personnes cela reviendrait à "une promotion des femmes", et (je pense souvent de manière volontairement caricaturale, en bon homme de paille) forme de matriarcat aussi inégalitaire que le patriarcat actuel.
Je pense qu'il faut penser ce terme aujourd'hui pour ce qu'il "fait" : promouvoir un horizon (inatteignable par définition) d'égalité de considération et de droit à vivre sans condition d'appartenance à une espèce, dans la limite de protection des membres de chaque espèce et des autres (d'où par exemple la stérilisation des chats pour notamment éviter des portées en souffrance, des ravages d'épidémies, et des hécatombes de leurs proies), et, surtout, en commençant (voire en s'arrêtant) aux relations et actes humains.
On se rapproche de l'éternel débat sur l'écologie, avec ou sans intervention humaine, pour maintenir, protéger, ou réaménager... Même ici c'est très complexe et intimement lié aux époques et conditions sociales. (notamment en temps de guerre, de raréfaction des ressources, de famine, etc...)

Et finalement le véganisme procède de cette même poursuite d'un horizon inatteignable (dans une société fondamentalement spéciste en tout cas), et qui ne nous empêche pourtant pas d'essayer chacun à son échelle et ses moyens, autant que faire ce peut.
On est à ce titre encore nombreux à dire que le véganisme (en tout cas sa forme politique revendicatrice) c'est la mise en application de l'antispécisme.
Et là les applications sont très concrètes, quotidiennes et ont un effet direct (en tout cas pour le fait d'arrêter de financer ce contre quoi on se bat, et afficher les alternatives, diffuser ces possibilités de choix pérennes...)
Et pour tout ça, je crois sincèrement qu'il n'y a même pas besoin de savoir "si les animaux sont d'accord ou pas", pas plus qu'il n'y aurait besoin de demander à un habitant d'une ethnie lointaine, au langage inconnu s'il est ok pour qu'on arrête d'élever, exploiter et tuer ses congénères. (sans besoin de le faire, ni "menace", quelle qu'elle soit)

- Je reviens aussi sur la phrase de départ "L'antispécisme impliquant une conscience de ne pas faire souffrir d'autres espèces que seul l'être humain possède", ou une variante, on en a déjà à peu près tous entendu ou lue, et parfois sur fond d'appel à la pureté de la part de carnistes pour ne pas avoir à devoir choisir. (le topic du prix carniste en est remplit depuis des années)
La base d'un tel débat est, je trouve, trop floue et surtout arbitraire :
- on ne sait pas si l'humain est réellement le seul animal capable de "morale" (qu'il faudrait en plus réellement définir, car par exemple dans un état de survie, la morale humaine est bien vacillante elle aussi)
- on peut observer qu'en dehors de la réponse aux besoins primaires (manger, se défendre) , rares sont les cas de figures de souffrances ou morts causées "pour le plaisir de", on a tous je pense déjà vu des fauves repus faire la sieste au milieu de ce qui pourtant leur sert de nourriture...
(même un chat qui joue avec une souris, je doute très fortement qu'il ai conscience des souffrances causées et qu'il prenne plaisir à cette souffrance ou au fait de la causer).

Et de nombreux travaux montrent de plus en plus la capacité d'empathie, y compris inter-espèces, des animaux non humains. Je pense qu'on peut raisonnablement penser que la morale est surtout une construction culturelle, et qu'en dehors de très probables expressions qui nous échappent encore, biaisés par nos yeux très anthropomorphisant, l'expression de cette morale est peut-être absente juste parce-qu'il n'y a pas de cadre qui permette de l'exprimer (en plus du fait qu'on doive arriver à la reconnaitre)

Plus globalement, quand je vois un débat posant ses prémices avec "l'humain est le seul qui", il y a de très grandes chances que ce soit une supposition, qui certes peut sembler "évidente" (l'humain est le seul animal qui ferait de "l'art", ou qui saurait "calculer", faire des "lois", etc), mais qui est ce qu'elle est : une supposition, pour le moment invérifiable dans le cas de cette "conscience morale". (dans la limite de nos capacités de dialogue avec les animaux, ou jusqu'à ce qu'on invente le moyen de lire et traduire les pensés)
(Pour l'art, les maths ou les lois, on sait déjà que l'humain n'est pas le seul doté)

De plus, on a tendance à (plus ou moins implicitement, je le vois souvent employé dans cette signification en tout cas) considérer la morale comme étant forcément liées à des actes "désintéressés", alors qu'il s'agit de tout l'inverse.

Au final, en ce qui me concerne, et c'est ce que dit en substance Xav, j'ai tendance à fortement me méfier, voire décortiquer tout ce qui tient, de près ou de loin, à une notion de "nature" (qu'elle soit réelle comme la différentiation -arbitraire et toujours changeante- des espèces, ou fantasmée comme la mentaphobie) centrée sur les animaux non humains, quand il s'agit de remettre en question ce qui est principalement une lutte politique (donc "culturelle") et qui se porte avant tout sur nous-mêmes, humains.

En fait quand un débat qui se présente comme de haute volée attaque avec "l'humain est", il y a de grandes chances pour que la conclusion puisse s'écrire comme "ce ne sont que des animaux, on ne leur doit rien".
 
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Merci pour cette réponse que je ne vois que maintenant !
 
Il n'y a pas de mal, je viens de la poster (à quelques jours près) après une longue absence (de participation en tout cas).
 
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