Biopiraterie : une nouvelle forme de colonisation

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Les brevets déposés sur l'exploitation de végétaux et minéraux font l'objet d'une compétition acharnée entre multinationales. Conséquences : un paysan indien peut être, d'un point de vue légal, condamné à devoir des royalties à une entreprise américaine pour cultiver les haricots de ses ancêtres.

De ses vacances au Mexique, Larry Proctor a ramené un paquet de haricots, un aliment typiquement local. Du sac de graine, notre touriste, qui est aussi agriculteur, isole un haricot jaune, dont la couleur est inconnue aux Etats-Unis. Il le plante, le cultive et dépose un brevet comme inventeur de l'espèce auprès de l'Office des brevets américain. Ce bout de papier l'autorise actuellement à réclamer des droits sur les exportations de haricots jaunes du Mexique vers les Etats-Unis, auprès de paysans qui le cultivent depuis des générations ! Voici l'exemple édifiant par lequel la réalisatrice Marie-Monique Robin aborde un phénomène qui se développe sur toute la planète, qui consiste à privatiser des organismes vivants. Dans son documentaire « les Pirates du Vivant », Grand Prix du Figra 2006, la journaliste montre comment les chercheurs du Nord, au service d'entreprises américaines, européennes ou japonaises (ces trois régions cumulent 90% des droits de propriété intellectuelle) privent des populations du Sud de l'exploitation de leurs savoirs ancestraux et de leurs ressources naturelles.

Les pays les plus touchés sont ceux où la biodiversité reste riche et les lois pour la protéger ou encadrer son exploitation sont inexistantes, comme le Brésil, le Mexique, l'Inde ou la Malaisie. Vandana Shiva*, lauréate du prix Nobel alternatif, dénonce cette privatisation forcenée du vivant comme une nouvelle colonisation : « C'est un déni du travail millénaire de millions de personnes et de cerveaux travaillant pour le bien de l'humanité ». Cette activiste a pris la tête des petits paysans indiens et mené des campagnes pour annuler plusieurs brevets américains, dont celui de la société américaine WR Grace sur le margousier, arbre aux multiples fonctions dans la pharmacopée et l'agriculture indienne. En 2005, l'Office européen des brevets a confirmé l'annulation du brevet pour cause de biopiraterie - une première. Il aura tout de même fallu dix ans pour faire prévaloir le droit des Indiens sur celui détenu par la multinationale, alors que les propriétés fongicides du margousier ont été décrites pour la première fois il y a trois mille ans...

Comment encadrer la généralisation des brevets ?

/CRITÈRES DE BREVETABILITÉ


Dans l'ensemble, pour être brevetables, les inventions doivent répondre
à trois critères :
- la nouveauté
- l'inventivité (ou la non-évidence)
- l'utilité (susceptible d'application industrielle)
Jusqu'en 1980, le système des brevets n'était pas applicable au vivant. Aux Etats-Unis, l'affaire Chakrabarty, portant sur une bactérie génétiquement modifiée, a fait tomber cette barrière. Aujourd'hui, 15% des brevets déposés aux U.S.A concernent des organismes vivants./

Les entreprises multinationales suivent attentivement ces nouveaux conflits avec des positions variables. Certaines s'efforcent de faire émerger une jurisprudence favorable. General Electric était derrière l'affaire Chakrabarty (voir encadré) et il est probable qu'une multinationale finance les frais de justice de Larry Proctor depuis six ans. Certains groupes militent pour que les brevets des Offices du Nord s'étendent au monde entier, en dépit des carences de ces Offices sur les connaissances ancestrales du Sud. Les végétaux, les animaux et les procédés « essentiellement biologiques » font l'objet d'une controverse sur leur brevetabilité ou non, au sein des pays de l'OMC, dans le cadre de l'Accord sur les ADPIC (Aspects des droits intellectuels qui touchent au commerce). Mais le vide juridique conduit d'autres multinationales, soucieuses de ne pas être traitées de prédateurs, à revoir leurs dépôts de brevets sous l'angle de la biopiraterie et du commerce équitable.
C'est le cas de L'Oréal, qui fait les plus gros dépôts de brevets en France - environ 500 demandes par an. Depuis l'an dernier, elle a modéré ses ardeurs. « Nous avons commencé une revue de notre portefeuille de brevets il y a trois ans, dans le cadre de notre politique de développement durable. Nous en avons abandonné un certain nombre qui n'étaient pas justifiés » explique Laurent Gilbert, directeur mondial des matières premières. Il cite le cas du kawa-kawa pour application capillaire : « la façon dont était déposé le brevet était trop proche de la façon dont les populations du Sud l'utilisaient » avoue le représentant de la direction recherche du groupe.

Quels savoirs faut-il déposer ?

Qu'il s'agisse d'une molécule odorante d'orchidée ou des principes actifs contre le cancer d'une plante d'Amazonie, la question de fond reste : peut-on breveter le vivant ? La biodiversité n'est-elle pas un bien universel ?
La réponse est complexe car c'est la perspective de bénéfices financiers qui fait avancer la recherche dans les laboratoires pharmaceutiques privés. Mais dans ce cas, comment redistribuer de manière équitable les revenus issus de ces recherches ?
La convention sur la biodiversité, issue de la conférence de Rio et entrée en application en 1994, stipule que les Etats sont les ayants droits légitimes et qu'ils sont chargés de la répartition équitable des ressources sur leur territoire. Si on établit des contrats bilatéraux pour résoudre le problème dans le cas d'entreprises adoptant une démarche volontariste à l'image de L'Oréal, qu'est-ce alors qu'une rétribution équitable et réaliste ? Sa filiale, The Body Shop, travaille avec des populations indigènes sans passer par le système des brevets. En Inde, on a commencé à numériser les livres anciens pour renseigner les bases de données des offices de brevets étrangers. Mais on se refuse à breveter des connaissances antédiluviennes, dont les ayants droits sont impossibles à tracer. Et que dire de ces populations indigènes d'Amazonie, dont la culture se confond avec la nature et est uniquement orale? « Le concept même de brevet est si éloigné de leur mentalité... » témoigne dans le documentaire de Marie-Dominique Robin, Amazon Link, une ONG qui tente de sensibiliser ces populations. Le chamane des Ashaninka lui, a bien compris l'enjeu pour son peuple : « Si on laisse un pays ou un étranger breveter la forêt, cela ne fera qu'accélérer le processus de
sa destruction ».

*Vandana Shiva est l'auteur de Biopiracy : The Plunder of Nature and
Knowledge
Hélène Huteau

Décidément, une multinationale peut tout acheter si elle a les moyens... :tongue: Grrr.
 
Oui c'est bien dégueulasse, les "puissants" se créent des législations rien que pour eux pour pouvoir faire tout ce qui peut leur rapporter du fric en tout impunité. Ils se créent des lois pour s'autoriser à accomplir des méfaits en jouant avec le vivant, pour moi ça s'apparente à un crime planifié.

Pas plus loin qu'en France, les agriculteurs n'ont pas le droit (légalement en tout cas, ça se pratique quand-même, comme le p2p :) ) de réutiliser leurs graines à la fin de la récolte, ils doivent RACHETER les semences !! A part la liberté des gens, ça remet aussi en question toute une biodiversité, si seules les plantes "autorisées" sont cultivées, il n'y aura plus à terme qu'une seule sorte de chaque légume par exemple... !! On va apprauvrir drastiquement les ressources, pour le bon plaisir de "l'argent-roi" !

Je ne sais pas si vous avez lu ça : http://vegeweb.org/viewtopic.php?id=271

On va bien finir par se modifier génétiquement nous-mêmes à force de jouer avec notre alimentation et notre environnement...
 
Des histoires comme ça, c'est ce que je vois en cours tous les jours! ca fait peur à entendre...
Une des anecdotes les plus frappante que j'ai entendu, (qui ne concerne pas la biopiraterie mais la stupidité humaine en général)
c'est celle de l'histoire de scientifiques qui ont découvert il y a 20ans environ une plante sur l'ile de Borneo, ils sont revenus l'étudier en laboratoire, et lui on decouvert certaine propriétés dont celle de combattre trés efficacement le Virus du SIDA (MIRACLEEE!!!!) mais voilà quand ils sont revenus chercher cette meme plante, les activités humaines (industries du bois etc etc) avaient ravagées le terrain et depuis, impossible de retrouver cette plante, disparue...

encore une petite histoire à faire dresser les cheveux sur la tête... :confus:
 
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