Début d'un journal

Zigzag

Broute de l'herbe
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Si vous avez un peu de temps, vous me direz ce que vous en pensez ;)


Aujourd’hui
Vous m’agacez, à la fin, à chercher un propre de notre époque comme on cherche un propre de l’Homme. Bien sûr, raconter des anecdotes sur les croyances, sur l’éducation, sur ce qui choquait ou non, et comparer est un jeu. Mais faire croire qu’une chose est spécifique à notre époque pour la dénoncer ! Le respect des jeunes envers les anciens ? Chez Hésiode, la jeunesse n’a plus aucun respect, et c’est spécifique à son époque. La surconsommation ? Chez Lucrèce, on gaspille des étoffes dont on n’a absolument pas besoin, et c’est spécifique à son époque. Même le véganisme date d’Ovide. Le pire étant peut-être la violence « spécifique à notre époque ». On peut dénoncer une chose en elle-même sans en faire le fléau du XXIeme siècle. A la riqueur, on pourrai dire qu’on parle plus de certaines choses à notre époque, et les médias y sont sans doute pour quelque chose, mais on ne parle plus de l’existance. En plus, cette recherche est fataliste. Qu’il y ait un déterminisme lié à l’époque, bien sûr, mais que tel siècle soit une fatalité… A la fin, on en excuse le racisme à cause du contexte de l’époque, au lieu de comprendre plus en profondeur pourquoi, plus précisément ; le racisme avait lieu. L’époque, c’est bien, le contexte, c’est mieux. Nous vivons à « l’époque contemporaine », et je signalerai juste : toute époque est contemporaine. Pourquoi s’imaginer que celle-ci est un tournant dans l’Histoire, comme si on en savait quelque chose ? Pourquoi la nommer autrement, sans recul ? La Renaissance fut nommée Renaissance lors de la Renaissance, et le Moyen-Age et l’Antiquité lors de la Renaissance également. Mais j’aimerai voyager dans le futur, juste pour connaitre le nom qu’on donnera à notre époque. C’est un grand fantasme : qu’est ce qui entrera dans l’Histoire ? Quant à l’anthropocène (Histoire géologique), on a assez de recul pour en parler, mais l’échelle est plus petite.
J’ai l’impression qu’une erreur est commise. Un anti-universalisme. Le défaut de l’universalisme est qu’il peut attribuer à l’Essence, à la Nature Humaine, des trucs typiquement Occidentaux. Le défaut d’ »attribuer abusivement une chose à notre époque » (ce mot n’existe pas : temporalisme ? Non, trop pédant.), c’est s’attribuer une chose plus générale et se définir comme telle.
Mais si on a l’intuition qu’une chose est « spécifique à notre époque » et qu’à partir de là on réfléchit, tant mieux.
 
Si aujourd'hui les vêtements couvrent moins le corps, et utilisent moins de tissu (pas de drapés, pas de robes longues à crinoline,...), par contre, on n'a jamais eu autant de vêtements (en moyenne, à statut social égal par rapport aux siècles précédents), et on n'a jamais autant jeté de tissus (vêtements jetés au lieu d'être réparés ou réutilisés,...) et on n'a jamais autant pollué avec les lessives (vêtements synthétiques qui relarguent des particules de matières plastiques)
 
C'est vrai, merci.
En fait, le vêtement n'est qu'un exemple. Mais c'est vrai qu'on peut le mesurer scientifiquement. J'ai ajouté une phrase (après l'anthropocène) :
On peut aussi mesurer scientifiquement (je pense à la surconsommation) et dégager des tendances globales et factuelles.
 
Il arrive parfois que l'on compare notre époque à la décadence de l'Empire Romain ou à Sodome et Gomorrhe etc, des arguments utilisés souvent par des idéologies bien différentes.
* consommation outrancière, illusion du bonheur matérialiste;
* une supposée plus grande liberté de mœurs alors que tabous et discriminations sont persistants : Opposition entre une pensée obscurantiste/ conservatrice d'un côté. - C'est souvent elle qui utilise l'argument de la décadence pour justifier son propre puritanisme. - Et essor des mouvements et revendications féministes et LGBT de l'autre.

Il est vrai que les remarques des penseurs du passé, leurs combats sont pour beaucoup valables aujourd'hui, n'ont rien d'originaux à notre époque. Ils se situent pour moi sur le terrain des dominations dont les mécanismes sont puissants et entraînent des dissonances cognitives. C'est à dire des contradictions entre ce qui est Bien/Juste et nos intérêts, pratiques, opinions.
Exemples : Crise migratoire. Des milliers de gens se noient. C'est révoltant humainement ?! Quoique considéré par acceptable car vu comme une menace par nos politiques, une partie de l'opinion.
Ex : La pratique des abattoirs est ignoble pour une grande majorité des gens. Les gens disent aimer les animaux. Mais la viande c'est trop bon, on en a toujours mangé (c'est faux, notamment quotidiennement), du coup, on ne remet pas en cause cette domination horrible...
Ex : le travail des enfants, l'exploitation quasi esclavagiste d'hommes et de femmes mais des produits à bas coût (j'en ai chez moi comme tout un chacun hélas). etc...

Originalité de notre époque, jamais dans l'Histoire de l'humanité, autant d'hommes n'ont eu accès à l'instruction, au savoir, à l'information... Pourtant le monde est toujours injuste, les inégalités révoltantes, le désir de prédation violent et destructeur. C'est peut-être là que doit se faire le combat car la conscientisation est faible, l'habitude crasse, les préjugés tenaces, le confort aveugle, la domination toujours aussi écrasante, prête à toutes les justifications perverses pour toujours s'exercer tel un privilège inoxydable, pourvu que le plaisir, la jouissance de sa propre personne soit là et prévale sur le reste. C'est "le meilleur des mondes" de Huxley qui l'a emporté. C'est le monde dans lequel nous sommes nés. Un engourdissement de l'esprit pour un plaisir souvent immédiat pour pallier une frustration toujours accrue par la publicité et le modèle de réussite vendu comme l'idéal, modèle qui écrase les minorités, les animaux humains ou non. Mais peu importe semble t-il, l'aveuglement est sciemment entretenu...

Je vis depuis quelques années une crise existentialiste, une recherche de sens, l'impression d'une imposture morale, d'un mensonge de grande ampleur, lequel cherche à défendre ses représentations et comportements ancestraux et muselle toute remise en cause du formatage d'un monde pourtant terriblement injuste, abject... Au delà du discours, il n'y a que de l'impuissance et la résignation lesquelles ont peu à peu remplacées la souffrance (toute relative par rapport à celle exercée sur autrui). Peut-être comme je l'ai entendu il y a peu de la bouche de Jacques Blamont, l'humanité est-elle infiniment mauvaise et que cela la conduira à sa perte ?

Car si je suis d'accord que les thèmes de l'époque ne nous sont pas spécifiques, alors ne faisons-nous pas que tourner en rond dans un bocal (mais de plus en plus vite), une abstraction intellectuelle sans solution au risque de devenir fou car les erreurs se répètent (s'aggravent dans le cas de la sur-conso, exploitation humaine, l'élevage/pêche intensive, thèmes qui me sont chers) avec la tentation de ne plus réfléchir et laisser couler ?
 
Merci de cette réponse ! Je me dis souvent : les problèmes de notre époque sont les mêmes (plus ou moins) que dans les époques précédentes (esclavages, oppression), c'est simplement que notre époque (dumoins j'en ai l'impression) en parle plus. L'idée de "ça a toujours existé" ne sert pas à effacer la réflexion ; d'où ma dernière phrase. J'invite plutôt à considérer la chose en elle-même. Ceci dit c'est toujours le risque d'écrire ce type de texte : les conséquence (si il produit due la résignation ce n'est pas mon but-on s'en doute-mais le fait est qu'il en produit). C'est pourquoi je pense que diffuser un texte est une grande responsabilité.
 
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