Je vais poser une parenthèse un peu hors sujet, mais c'est ce que je ressens en lisant la conversation :
Votre problème, Plantte et Picatau, je crois, c'est que vous êtes défaitistes sans avoir de raison pour ça.
J'explique.
Beaucoup de monde, la majorité des gens, pose que l'abolition de la viande ne se fera pas avant des siècles, ou au moins des générations et des générations. C'est un scénario crédible, soit.
Sauf que... quand on étudie scientifiquement/mathématiquement un système pour prévoir son comportement futur, on a besoin d'être HORS du système. On connaît les conditions initiales et les lois qui régissent ce système, et on en déduit l'évolution au fil du temps. Ça reste déterministe.
Mais quand on fait PARTIE du système, ce système devient indéterminable... impossible à prévoir. Je ne peux pas prévoir mon évolution future, parce que si j'en étais capable, je provoquerais une boucle absurde, une effet larsen, un paradoxe temporel. Je ne peux pas prévoir comment je vais agir, parce que par exemple si je décidais que mon objectif est de contredire ce que je prévois, je créerais un paradoxe. Bref, je ne peux pas me prévoir. Et je suis de la même nature que tous les autres humains, j'ai la même structure cérébrale. Je n'ai pas non plus de vraie capacité de prévoir leurs comportements. Je sais juste qu'ils sont comme moi, qu'ils peuvent penser comme moi.
Donc je ne PEUX PAS avoir la prétention de connaître le futur du système auquel j'appartiens. Je ne peux pas déclarer que l'abolition se fera dans plusieurs siècles, plutôt que dans six mois.
Par contre, ce qui est clair, c'est que notre ressenti vis à vis du futur a une influence sur son déroulement concret. Le défaitisme arrive souvent à ses fins, parce que si je n'essaie pas, alors rien n'arrive... Si je ne crois pas en ce que je fais, alors j'ai tendance à moins essayer, et à moins y arriver. Et ceux qui réussissent sont ceux qui y croient. Ceux qui changent le monde, qui réussissent à propager leurs idées, sont les utopistes (et dans ces cas-là, je pense toujours à Gandhi), ceux qui osent croire.
Dans ces conditions, pour moi, il n'y a aucune raison de penser que l'abolition ne pourrait pas avoir lieu bientôt, et j'ai toutes les raisons au contraire de croire que ça puisse se produire. Parce que pour qu'il y ait une chance que ça se produise, il est nécessaire que j'y croie.
(Récemment, avec des connaissances non-végés, par jeu j'ai dit "Dans 4 ans, je serai candidat aux présidentielles. Votez pour moi, et je réalise l'abolition de la viande.". Une personne qui était présente, et qui mange encore un peu de viande -mais moitié moins qu'avant- a répondu, sérieusement, sans sourire : "Ça serait bien.")
Et l'effet internet... Dire que tout le monde a accès aux informations aujourd'hui, donc plus rien ne peut changer, c'est totalement faux. Je partage régulièrement des infos avec des connaissances ou des internautes, et visiblement, les infos, ils ne les avaient pas. Ils découvrent. Et c'est probablement le cas de la majorité des zoophages. Internet offre la capacité d'accéder instantanément aux informations qui existent. Mais les informations qui existent sont en quantité monstrueuse, et tout le monde n'a pas forcément de raison de se poser des questions précisément sur la viande, surtout si on prend ça comme un acquis qui ne nécessite plus aucune réflexion... Tant qu'on ne crée pas les stimuli, les gens n'ont pas de raison de s'interroger sur la viande. Et internet est quelque chose de chaotique, d'imprévisible. Une vidéo débile peut être vue par des millions de personnes en quelques jours, sans qu'on soit vraiment capable d'expliquer pourquoi. Ce genre de trucs se produit tout le temps. Internet, c'est la simulation parfaite de l'effet papillon. On peut provoquer des effets boule de neige sans même s'en rendre compte.
Dernière surprise de ce genre en date : La vidéo du bébé de 4 ans qui devient végétarien. 1 million de vues en deux jours. Probablement un bon paquet de nouveaux végés, par la même occasion.
Et je suis à peu près certain que si plusieurs dizaines de millions de spectateurs voyaient Earthlings (aussi difficile que ça soit à réaliser), l'impact serait lui aussi considérable. Bref, internet peut nous surprendre. Et nous surprend régulièrement.
Quant à déclarer que les vegans ne sont pas plus nombreux qu'avant. C'est juste faux. En France, on est encore très peu nombreux, parce qu'on est encore à l'étape où c'est le végétarisme qui est à développer, mais aux USA, les vegans n'arrêtent pas de se multiplier. Et en France, aujourd'hui, c'est le terme même de "végane" qui commence à être de plus en plus connu, dont on parle de plus en plus dans les médias. (Si on n'en parle pas, évidemment, ça ne viendra à l'idée de personne de s'y mettre...)
Et puis y a qu'à voir les inscriptions sur vegeweb, de toute façon... Les stats parlent d'elles-mêmes. On n'est même plus à voir uniquement des végés-friendly s'inscrire pour se faire aider à faire la transition... Maintenant, c'est carrément des véganes de longue date qui viennent s'inscrire... Il y a un an et demi, je n'aurais jamais imaginé qu'on puisse trouver autant de véganes en France (Il y en a, quoi ? Mille ? Plusieurs milliers ?). Il y a un an et demi, je n'aurais même jamais imaginé qu'on puisse devenir végétarien avant 18 ans.
Qu'on parte de presque rien, OK. On est peu nombreux, mais c'est normal... Si personne n'en parle, personne ne peut savoir que ça existe, ne peut avoir l'idée d'en faire autant, de savoir comment faire. Et moins on est nombreux, moins on est visible. Mais plus on se rendra visibles, plus on sera nombreux.
'fin bref, vous êtes inutilement défaitistes et c'est bien triste. Le défaitisme minimal voudrait au moins que vous acceptiez l'idée qu'en terme de végétarisme/véganisme, la France a toutes les chances d'arriver à faire au moins aussi bien que les USA/Canada très bientôt. (Et ils y sont arrivés sans flexitarisme...)