pensées végétariennes de Voltaire (parution)

  • Auteur de la discussion Xav
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Xav

Massacre des légumes
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Paris
Voltaire était devenu végétarien sur le tard. Un recueil de ses écrits sur le sujet vient de paraître.
Ci-dessous, la chronique de Roger-Pol Droit (Le Monde, 31/01//2014) (chronique très favorable malgré le rapprochement plus que conjectural entre la santé précaire du philosophe et son régime végétarien...)

VOLTAIRE SANS VIANDE

Il écrit à Madame Denis, sa nièce : « Je ne mange plus de viande », précise à l’un de ses médecins « ni viande ni poisson », se proclame volontiers « pythagoricien », façon savante de dire croqueur de fruits et légumes. Voltaire, au soir de sa vie, à 68 ans, se convertit définitivement au végétarisme. Désormais, on l’avait jusqu’alors assez peu remarqué, le voilà qui fustige « ce carnage dégoûtant, étalé sans cesse dans nos boucheries et dans nos cuisines », cette « sanglante gloutonnerie » qui fait notre ordinaire, insensible et « barbare ». Sans doute pareille conversion n’est-elle pas sans lien avec ses maux d’estomac, ses troubles digestifs, sa santé continûment précaire. Mais pas seulement.

Car il a lu le gros traité du néoplatonicien Porphyre sur l’abstinence de nourriture carnée, le De Abstinentia, traduit en français, quelques années auparavant, par M. de Burigny. Son thème est connu : les sages ne sont jamais carnivores. Qu’ils soient indiens, perses, égyptiens ou grecs, tous refusent d’ingérer de la chair morte. Sans oublier que le patriarche de Ferney, inaugurant l’engouement pour l’Inde qui s’emparera peu après de l’Europe, célèbre les Védas et la tempérance des brahmanes, « les premiers qui s’imposèrent la loi de ne manger d’aucun animal ». Si l’on en devait en rester là, ce ne serait qu’une microscopique curiosité dans l’histoire des idées. Avec Voltaire, il y a le style en plus, c’est à dire tout.

Et il s’en donne à cœur joie, pour notre plus grand plaisir, imagine une huître parlante, capable d’arracher des larmes à celui qui s’apprête à la gober, dépeint un oiseau de 27 900 ans et six mois s’exprimant dans un chaldéen parfait afin de convaincre une princesse de Babylone que les bêtes, elles aussi, souffrent et pensent. Le plus étrangement réussi est sans doute le dialogue surréel d’un chapon et d’une poularde. Ces volatiles loquaces s’effarent des mutilations sexuelles que leur ont infligées, pour mieux les engraisser, des représentants de l’engeance humaine. Ils s’horrifient à l’avance à la pensée qu’en mastiquant leurs cadavres, évidemment exquis, les convives ne feront qu’échanger de frivoles plaisanteries...

Si l’idée de réunir ces textes épars est heureuse, c’est surtout qu’ils consonnent singulièrement avec l’air du temps. Sous Louis XVI ou Louis-Philippe, sous la voltairienne Troisième République, dénonciation du carnisme et apologie du légume étaient nettement moins audibles qu’à présent. Les arguments de Voltaire sont ceux qui reviennent en force à présent chez les défenseurs des animaux : parce qu’ils sont doués de sensibilité, qu’ils souffrent, s’apeurent et s’affolent comme nous, ils ne sont pas à tuer et à manger. C’est alors qu’il faut se remémorer les dernières lignes de Candide : « Si vous n’aviez pas perdu tous vos moutons du bon pays d’Eldorado, proclame le brave Pangloss, vous ne mangeriez pas ici des cédrats confits et des pistaches.
– Cela est bien dit, répondit Candide, mais il faut cultiver notre jardin. » Adieu troupeau, bonjour potager. Serait-ce donc le commencement de la vie philosophique ? Ou seulement la fin de Chasse, pêche et traditions ?

PENSÉES VÉGÉTARIENNES

de Voltaire

Edition, notes et postface de Renan Larue

Mille et une nuits, 72 p., 2,50 €
 
Alors, déjà, j'admirais Voltaire pour tout ce qu'il a fait. Son idéologie est également la mienne. Pour moi, cet homme fut un génie. Apprendre ça ne fait que me conforter dans mon idée!
Merci pour cet article !
 
Mais euh antisémite sexiste et homphobe ? :mmm: mais en classe, on m'a montré son traité sur la tolérance, il parle de beaucoup de peuples (en sous-entendant qu'il parle de tous), dont les Juifs, disant que tous les hommes étaient frères. Ma prof m'a dit qu'il avait co-écrit un bouquin avec une femme et l'avait fait signer de son nom (celui de la femme) alors qu'à l'époque ça ne se faisait pas, car il pensait que les femmes étaient égales aux hommes.
Une amie m'a dit qu'il était homosexuel mais visiblement elle a dû se tromper.
C'est choquant quand même. On me l'a toujours vanté au collège.
 
Je ne saurais dire quoi que ce soit sur Voltaire, la philo et moi (ou plutôt potasser bêtement les textes des philosophes plutôt que d'apprendre à se servir de sa cervelle), ça s'est pas très bien passé... Mais en tout cas, j'aime bien la conclusion sur le double visage de la France. Ca me parait assez juste comme analyse pour le coup.
 
D'autant qu'il n'était pas philosophe. ;)
 
Il n'était pas QUE philosophe, mais si, quand même un peu !
 
Pas d'après les trucs de philo que je lis en ce moment. (mais je suis d'accord avec toi, un peu quand même)
 
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