L'antispécisme est la voie rationnelle qui justifie le véganisme. Ca consiste simplement à dire que les intérêts de tous les individus doivent être considérés de manière équitable. C'est une égalité de considération morale, et non pas une égalité de traitement, qui se fonde avant tout sur le critère de la sentience. La sentience, c'est la capacité à un être d'avoir une expérience subjective de la réalité, et donc la condition sine qua non pour avoir un intérêt (théorie que l'article appelle "sentientisme").
L’antispécisme consiste à remplacer (l’hypothétique) la discrimination spéciste par une autre forme de discrimination : le sentientisme.
C'est tout à fait vrai. La critère de la sentience est plus que discriminant, puisqu'il exclut intégralement les non-sentients de notre sphère de considération.
La fédération végane quant à elle promeut un véganisme qui se base sur une autre forme de discrimination qui est l'appartenance au règne des animaux (du moins, elle établit une préférence claire pour les animaux). Ce qui est bien davantage dogmatique que le critère de la sentience. Je dirais qu'il s'agit avant tout d'une optique de "respect du vivant" tout autant dogmatique et incohérente comme le montre le passage suivant.
Court-circuiter les intermédiaires animaux permet de tuer moins d’animaux et d’organismes vivants tous règnes confondus
Il se trouve qu'en pratique, ces deux choix de critères de discrimination s'intersectent presque assez bien dans nos choix de tous les jours. Seulement l'un a des bases philosophiques pour justifier l'emploi d'une discrimination, l'autre non.
Cette théorie postule que la capacité de sentience chez un être vivant devrait nous conduire à lui accorder des droits. Ce système de discrimination nous dégagerait de toute obligation à l’égard des bactéries, archées, champignons, algues et plantes. Contrairement aux idées reçues, la sentience est probablement peu répandue chez les animaux. Pour faire le tri entre les 5 à 15 millions d’espèces, autant d’expérimentations seraient nécessaires.
Leur position est d'autant moins crédible qu'ils se servent de l'idée qu'une certaine proportion d'animaux ne sont pas sentients pour justifier qu'on ne devrait pas utiliser la sentience comme critère, sans même chercher à justifier pourquoi on devrait se soucier de la vie d'une éponge, d'une bactérie ou d'un archée (ou d'un caillou, tant qu'on y est). Les millions d'espèces d'animaux non sentients qu'il inclue sont les espèces d'animaux qui sont de taille microscopique, comme les
nématodes.
Les personnes qui appliquent l’idéologie antispéciste de manière littérale et consciencieuse peuvent consommer les animaux chez qui la sentience ne peut être démontrée : insectes, moules, huîtres ou œufs de poules de réforme. C’est à l’opposé du véganisme.
Il me semble que ce passage illustre bien l'absurdité de son propos et de la non-validité d'une démarche dogmatique vis-à-vis du véganisme.
Précisons par ailleurs que ce qu'il dit n'a aucun sens scientifiquement; on ne peut pas démontrer qu'un être est sentient, on peut seulement établir des critères qui nous permettent de l'induire en fonction de nos connaissances actuelles (le principal actuel est la présence d'un système nerveux central). Donc non, un antispéciste n'ira pas exploiter des insectes pour se nourrir. (pour les oeufs de poules de réforme, les moules, huîtres, il y a plein de débats partout sur internet).
Les personnes qui consomment encore des produits d’origine animale aujourd’hui ne font quant à elles que reproduire l’héritage des habitudes alimentaires ayant permis à l’humanité de survivre. Ce n’est pas du spécisme.
Avec ce genre de raisonnement, on peut tout autant affirmer que le racisme et le sexisme n'existent pas.
J'ai l'impression avec cette article que la fédération végane veut adopter un point de vue non conflictuel et apolitique, et cherche avant tout à normaliser le véganisme comme mode de vie, et non pas de le défendre d'un point de vie philosophique. Mais à mon avis, la façon dont il le fait le rend simplement plus ridicule.