Livre "Plainte contre X"

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Guest
Bonjour tout le monde,

je suis en train de lire une interview de l'auteure de ce livre... http://www.isabelle-alonso.com/intervie ... -bernfeld/

Et je vous cite certains extraits :

S : Le porno, en plus de véhiculer une misogynie violente, fait aussi la propagande du viol et de la pédophilie : le viol de très jeunes filles (ou paraissant telles) est une catégorie de porno très demandée. Il y a donc légitimation d’actes condamnés expressément par la loi – en fait incitation au viol, à la pédophilie et à la torture.

Que pensez-vous de cette double injonction contradictoire de nos sociétés, où ce qui est interdit par la loi est encouragé par la culture?


KB : Comme toute injonction contradictoire, elle rend fou.

Mais en même temps, il y aura toujours cet argument de ceux qui vont vous traiter d’horrible censeur liberticide : pour eux, il s’agit de « fantasmes », « d’un exutoire » qui n’a rien à voir avec le réel. Ils vous diront que les violeurs et les pédocriminels ne regardent pas ces films (ce qui est en grande partie faux) et que le fait d’en regarder ne fera pas de vous un tortionnaire…
(Là, en revanche, on peut parler de complicité dans certains cas par le simple fait de regarder.)


S : L’idéologie patriarcale traditionnelle distinguait entre les « mamans », à qui il n’était demandé en principe qu’un service sexuel à caractère strictement reproductif, et les « putains », qui étaient préposées aux « raffinements » de l’érotisme.

Ces distinctions s’effacent, et on a l’impression que–sous l’influence de la révolution sexuelle et du porno–TOUTES les femmes sont sommées d’être des performatrices érotiques. La diversification des pratiques érotiques imposées par le porno va-t-elle dans le sens d’une plus grande liberté sexuelle pour les femmes (et les hommes) ?


KB : D’une certaine manière, quand on voit les conseils dispensés par les magazines féminins grand public, chaque femme doit aujourd’hui être une bonne pute gratuite. Attention, quand on parle de « pute », cela signifie quoi ? Est-ce que ma/mon partenaire est un objet dont j’use et abuse ? Qu’est-ce que l’on cherche réellement dans la relation sexuelle ?

Il ne s’agit évidemment pas de continuer à reproduire l’ancien schéma « maman/putain », mais au contraire de s’interroger sur les VRAIS désirs des un-e-s et des autres. C’est pourquoi je ne suis pas persuadée que le mot que vous employez, « l’érotisme », soit approprié à propos des « pratiques imposées par le porno », dans la mesure où « eros », le désir, n’est jamais la véritable question de la pornographie.


S : Vous écrivez que le porno, c’est la généralisation du SM, il n’y a plus de porno qui ne soit pas SM: il n’y a plus que des victimes et des bourreaux.

Est-ce que le porno, loin d’être une célébration de la sexualité comme le prétendent ses défenseurs, n’est pas en fait une destruction de la sexualité -comme sensualité, tactilité, caresse, physicalité – et son détournement vers quelque chose d’abstrait et de politique, l’expression sexuelle de rapports de domination?


KB : Tout à fait. Là encore certain(e)s diront qu’il existe « d’autres styles de porno », mais la grande majorité de films ne font que reproduire ces mêmes schémas de domination et de violence.

Quant au SM, avec cette démocratisation, il n’en est peut-être que plus ridicule. (Certaines personnes disent qu’elles ont une pratique du SM dans le privé qui n’a aucun rapport avec ce qui est montré dans les films… Vaste débat, là encore, et il est difficile de s’y aventurer…) Limiter la relation à des rapports de pouvoir c’est aussi reproduire les siècles nauséabonds d’un intégrisme religieux qui a imprégné le rapport au corps et au sexe de nos sociétés.

Il y a une grande arnaque avec cette prétendue « libération sexuelle » et les puritains ne sont pas du tout ceux que l’on croit. Dans un de mes premiers romans, mon héroïne disait aussi quelque chose dans ce sens : que les mecs qui sont abreuvés de porno sont de « très mauvais coups ». Oui, ce qui est certain, c’est que le porno est une destruction de la sexualité, au sens où cela éloigne chaque personne de ses propres désirs. Déconnecté(e)s de leurs véritables sensations, elles/ils ne sont que dans la reproduction d’images, de ces prétendues « performances » qui assimilent l’être à une machine sans âme.
 
Très intéressant !
Je suis assez d'accord avec elle, elle apporte des éléments de réflexion auquel je n'aurai pas pensé
 
ouf!!! je me sens moins complètement tordue grâce à elle! Je pense tout pareil, mais je suis pas aussi douée qu'elle pour l'analyser et le décrire, merci pour ce partage! :genoux:
 
Contente que vous appréciez ce partage. :)

C'est vrai qu'on a abordé le sujet de la prostitution, mais pas celui des films porno.

La frontière entre "virtuel" et "réel" est très floue pour certains...
J'avais un ami (jeune prof de lycée) qui aimait bien se taper des délires sur pédophilie/zoophilie etc... pour le côté anticonformiste je suppose... (tant que ce ne sont que des délires verbaux entre potes...)
Sauf qu'un jour j'ai su qu'il est tombé en dépression : il m'a raconté qu'il avait regardé des films pédophiles sur internet... mais ce n'est qu'1 mois plus tard qu'il a pris conscience qu'il y avait une réalité derrière tout cela, et aussi qu'il risquait gros (notamment par rapport à son boulot de prof).
C'est fou comment les consciences peuvent être aux abonnés absents... :(

Il y a aussi cet article que j'avais trouvé intéressant : « Je rêve de rencontrer quelqu’un qui ne soit pas biberonné au porno… »:
Une jeune femme a écrit récemment dans un forum : « il suffit de coucher avec quelqu’un pour savoir s’il est consommateur ou non de porno »
 
Merci pour le partage snoopyne.

snoopyne":p5r86z5a a dit:
Sauf qu'un jour j'ai su qu'il est tombé en dépression : il m'a raconté qu'il avait regardé des films pédophiles sur internet... mais ce n'est qu'1 mois plus tard qu'il a pris conscience qu'il y avait une réalité derrière tout cela, [...]

Ca serait bien que les mecs prennent conscience de ça avec le porno "classique", qu'il y a une réalité derrière ça. En présence de filles ça se dit moins ouvertement mais dans une conversation "entre mecs", la consommation de porno est complètement décomplexée et assumée pour la plupart... :confus: C'est assez flippant de voir comment c'est rentré dans les moeurs.
 
Ravelle":245qn7n5 a dit:
En présence de filles ça se dit moins ouvertement mais dans une conversation "entre mecs", la consommation de porno est complètement décomplexée et assumée pour la plupart... :confus: C'est assez flippant de voir comment c'est rentré dans les moeurs.
Ouais... :mmm:
L'autre signe très révélateur, du moins à mes yeux, est l'emploi quasi-systématique de "baiser", le terme "faire l'amour" n'est pas employé voire ridiculisé dans les conversations entre mecs.
 
Ben moi non plus je suis pas fan de "faire l'amour"...

En revanche "coucher" ferait mieux l'affaire que "baiser" (on couche "avec" quelqu'un, on couche "ensemble"... il y a moins de côté rapport de domination que dans le verbe "baiser" je trouve...)
 
"coucher" est nettement moins violent que "baiser", je suis d'accord.

Mais qu'est-ce qui te gêne dans "faire l'amour" ? Trop connoté "patriarcat" ?
 
falcon":21ggj1ld a dit:
Mais qu'est-ce qui te gêne dans "faire l'amour" ? Trop connoté "patriarcat" ?
Je sais pas... trop "fleur bleu" ? ... trop long à dire ?

Ou bien est-ce le mot "amour" en lui-même qui m'embête... (vu les multiples réalités que les gens mettent derrière ce mot unique... de la bienveillance désintéressée à la possessivité maladive...)

(j'aime pas non plus qu'on me dise "je t'aime"... moi Schtroumpf grognon ? :p )
 
Je me rappelle avoir lu sur le blog Antisexisme - Sexisme et sciences humaines que des scientifiques avaient voulu étudier l'impact de la pornographie en comparant des groupes d'hommes en visionnant et des groupes d'hommes n'en ayant jamais vu.

Et bien ils n'ont pas pu réaliser cette étude car ils n'ont jamais trouvé d'hommes n'ayant jamais visionné de pornographie...
 
snoopyne":17m4c7dm a dit:
falcon":17m4c7dm a dit:
Mais qu'est-ce qui te gêne dans "faire l'amour" ? Trop connoté "patriarcat" ?
Je sais pas... trop "fleur bleu" ? ... trop long à dire ?
Ok, je pense que je comprends.
Oui, dans "faire l'amour", j'y sous-entends un sentiment amoureux... disons... plutôt fort.
D'où l'énorme décalage entre "baiser" (où il n'y a aucun respect finalement) et "faire l'amour" (où on inclue le fait d'aimer).

"coucher" est donc une variante plus neutre où le sentiment d'amour n'est pas indiqué mais où on garde un certain respect de l'autre.

Ça te va comme analyse ? :)

@Usagi : effectivement, il y aura toujours au moins l'aspect "curiosité" pour comprendre de quoi cause les copains dans les vestiaires... (bah oui, sinon c'est un coup à se faire moquer ou marginaliser, c'est pas forcément agréable, c'est très con quand on y pense).
Donc s'ils cherchaient des hommes qui n'avaient absolument pas visionné de porno, c'est pour ainsi dire mort. Chez les Adventistes, peut-être ? :whistle:
C'est vraiment toute une éducation à refaire. La question est : est-ce qu'un père (ou des parents) abreuvé au porno est capable d'effectuer ce changement ?
 
falcon":pg52xnmr a dit:
Ça te va comme analyse ? :)
Bien m'sieur :)

En fait je trouve ça intéressant d'avoir plein de mots différents pour exprimer des ressentis qui peuvent être différents, alors que d'un point de vue extérieur on peut avoir l'impression que le comportement est le même dans les différents cas.
D'ailleurs il y aurait p'être bien d'autres mots que "coucher" qui pourraient convenir..

falcon":pg52xnmr a dit:
C'est vraiment toute une éducation à refaire. La question est : est-ce qu'un père (ou des parents) abreuvé au porno est capable d'effectuer ce changement ?
N'est-ce pas être ambitieux sur la place/l'influence du père ou des parents ?
Car comme tu l'évoques précédemment, il y a aussi la pression des pairs... à laquelle il faudrait résister... pas facile à l'adolescence...
 
snoopyne":27tctr7r a dit:
falcon":27tctr7r a dit:
C'est vraiment toute une éducation à refaire. La question est : est-ce qu'un père (ou des parents) abreuvé au porno est capable d'effectuer ce changement ?
N'est-ce pas être ambitieux sur la place/l'influence du père ou des parents ?
Car comme tu l'évoques précédemment, il y a aussi la pression des pairs... à laquelle il faudrait résister... pas facile à l'adolescence...
Disons que je pars du principe qu'il n'est pas possible d'agir sur les actes et les dires des pairs.
Ne reste donc que les professeurs et les parents. Je mets un peu plus l'accent sur le père que sur la mère car c'est généralement le père qui a une vision "décomplexée" du porno. J'ai déjà eu des témoignages de parents (enfin, plutôt du père :whistle:) qui laissent leurs gosses de moins de 12 ans regarder du porno :mmm:. Je vous raconte pas les dégâts sur la vie sexuelle de ces enfants...

Donc oui, la vision potentiellement "décomplexée" du porno que peut avoir le père (ou les parents) me laisse penser que c'est l'un des obstacles les plus importants. La seule solution serait donc d'expliquer à l'enfant, assez jeune* , en quoi consiste le porno, quel est le message véhiculé et pourquoi c'est dangereux finalement.

Après, ce n'est qu'une analyse parmi d'autres. Je pose juste mon ressenti. Et comme j'aimerais bien avoir des enfants, je sais que cette question dans leur éducation émergera. Le tout sera de la gérer au mieux. Voilà peut-être aussi pourquoi j'insiste un peu sur le rôle que peut tenir le père.
Non pas que la mère ne peut rien faire, mais disons que la vision décomplexée du père est un risque (du style, "mais non, laisse-le, il est assez grand/c'est de son âge, etc...).

*(avant la crise d'adolescence et en partant du principe que le jeune enfant puisse être exposé trop tôt à du porno "chez des copains")
 
falcon":2iuo6yeo a dit:
Disons que je pars du principe qu'il n'est pas possible d'agir sur les actes et les dires des pairs.
En effet, c'était important à préciser ! ;)

falcon":2iuo6yeo a dit:
J'ai déjà eu des témoignages de parents (enfin, plutôt du père :whistle:) qui laissent leurs gosses de moins de 12 ans regarder du porno :mmm:. Je vous raconte pas les dégâts sur la vie sexuelle de ces enfants...

Donc oui, la vision potentiellement "décomplexée" du porno que peut avoir le père (ou les parents) me laisse penser que c'est l'un des obstacles les plus importants.
En effet je ne connaissais pas ce type de cas de figure... :rolleyes:
 
Je suis le blog de l'auteure de Plainte contre X, c'est toujours très intéressant.

Pour le porno, ça me donne vraiment l'impression que c'est comme un passage obligé pour les mecs de regarder du porno (en plus du désir et de la curiosité personnelle de chaque mec) et de le dire comme si c'était évident que voilà, quoi, c'est des vrais mecs ils reluquent les nanas et matent des pornos bien sûr...
Je dis pas que c'est la réalité de tous les mecs, mais que j'ai l'impression qu'il y a une pression à ce niveau. Non ?
Par contre, les filles non, c'est pas intéressée par le sexe de toutes façons (ou alors c'est des salopes).

Avant, tu pouvais tomber sur un film érotique en allumant la télé tard ou sur une VHS de papa (oups), mais maintenant avec youP..n et compagnie... c'est facile et c'est vraiment la boîte de Pandore.
 
kindy":pcemswjw a dit:
Je dis pas que c'est la réalité de tous les mecs, mais que j'ai l'impression qu'il y a une pression à ce niveau. Non ?
Oui, il y a une vraie pression. Un peu comme l'alcool en soirée...
 
kindy":1obq4yfk a dit:
Avant, tu pouvais tomber sur un film érotique en allumant la télé tard ou sur une VHS de papa (oups), mais maintenant avec youP..n et compagnie... c'est facile et c'est vraiment la boîte de Pandore.
Je suis tombé sur ce lien : La pornographie, une hypocrisie organisée

Cela explique bien "la boîte de Pandore".

Et la solution éducative pour prévenir les méfaits du porno est... inattendue (pour moi). Je ne l'avais pas envisagée comme ça...
 
Le lien que tu donnes met en lumière pas mal de choses auxquelles on ne pense pas tout de suite. Ça donne à réfléchir, et c'est comme tu le dis inattendu.
Sinon oui je pense que c'est le rôle des parents de sensibiliser leur gamin à la sexualité (dans une certaine mesure hein).
Sans rentrer dans les détails de mon histoire personnelle, j'ai eu une éducation complètement hors du champ de la pornographie et j'ai connu mon premier accès internet à domicile à 16 ans. Ça ne m'a pas empêché à l'adolescence d'en visionner avec "l'influence" de l'école, du collège et du lycée, et je n'avais pas le recul du tout pour voir ce que ça représentait. Peut-être que si j'avais eu un son de cloche plus détaillé que "le porno çaylemalpointbarre" j'aurais eu une réaction différente à l'époque.
 
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