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Membre supprimé 15539
Guest
Bonjour tout le monde,
je suis en train de lire une interview de l'auteure de ce livre... http://www.isabelle-alonso.com/intervie ... -bernfeld/
Et je vous cite certains extraits :
je suis en train de lire une interview de l'auteure de ce livre... http://www.isabelle-alonso.com/intervie ... -bernfeld/
Et je vous cite certains extraits :
S : Le porno, en plus de véhiculer une misogynie violente, fait aussi la propagande du viol et de la pédophilie : le viol de très jeunes filles (ou paraissant telles) est une catégorie de porno très demandée. Il y a donc légitimation d’actes condamnés expressément par la loi – en fait incitation au viol, à la pédophilie et à la torture.
Que pensez-vous de cette double injonction contradictoire de nos sociétés, où ce qui est interdit par la loi est encouragé par la culture?
KB : Comme toute injonction contradictoire, elle rend fou.
Mais en même temps, il y aura toujours cet argument de ceux qui vont vous traiter d’horrible censeur liberticide : pour eux, il s’agit de « fantasmes », « d’un exutoire » qui n’a rien à voir avec le réel. Ils vous diront que les violeurs et les pédocriminels ne regardent pas ces films (ce qui est en grande partie faux) et que le fait d’en regarder ne fera pas de vous un tortionnaire…
(Là, en revanche, on peut parler de complicité dans certains cas par le simple fait de regarder.)
S : L’idéologie patriarcale traditionnelle distinguait entre les « mamans », à qui il n’était demandé en principe qu’un service sexuel à caractère strictement reproductif, et les « putains », qui étaient préposées aux « raffinements » de l’érotisme.
Ces distinctions s’effacent, et on a l’impression que–sous l’influence de la révolution sexuelle et du porno–TOUTES les femmes sont sommées d’être des performatrices érotiques. La diversification des pratiques érotiques imposées par le porno va-t-elle dans le sens d’une plus grande liberté sexuelle pour les femmes (et les hommes) ?
KB : D’une certaine manière, quand on voit les conseils dispensés par les magazines féminins grand public, chaque femme doit aujourd’hui être une bonne pute gratuite. Attention, quand on parle de « pute », cela signifie quoi ? Est-ce que ma/mon partenaire est un objet dont j’use et abuse ? Qu’est-ce que l’on cherche réellement dans la relation sexuelle ?
Il ne s’agit évidemment pas de continuer à reproduire l’ancien schéma « maman/putain », mais au contraire de s’interroger sur les VRAIS désirs des un-e-s et des autres. C’est pourquoi je ne suis pas persuadée que le mot que vous employez, « l’érotisme », soit approprié à propos des « pratiques imposées par le porno », dans la mesure où « eros », le désir, n’est jamais la véritable question de la pornographie.
S : Vous écrivez que le porno, c’est la généralisation du SM, il n’y a plus de porno qui ne soit pas SM: il n’y a plus que des victimes et des bourreaux.
Est-ce que le porno, loin d’être une célébration de la sexualité comme le prétendent ses défenseurs, n’est pas en fait une destruction de la sexualité -comme sensualité, tactilité, caresse, physicalité – et son détournement vers quelque chose d’abstrait et de politique, l’expression sexuelle de rapports de domination?
KB : Tout à fait. Là encore certain(e)s diront qu’il existe « d’autres styles de porno », mais la grande majorité de films ne font que reproduire ces mêmes schémas de domination et de violence.
Quant au SM, avec cette démocratisation, il n’en est peut-être que plus ridicule. (Certaines personnes disent qu’elles ont une pratique du SM dans le privé qui n’a aucun rapport avec ce qui est montré dans les films… Vaste débat, là encore, et il est difficile de s’y aventurer…) Limiter la relation à des rapports de pouvoir c’est aussi reproduire les siècles nauséabonds d’un intégrisme religieux qui a imprégné le rapport au corps et au sexe de nos sociétés.
Il y a une grande arnaque avec cette prétendue « libération sexuelle » et les puritains ne sont pas du tout ceux que l’on croit. Dans un de mes premiers romans, mon héroïne disait aussi quelque chose dans ce sens : que les mecs qui sont abreuvés de porno sont de « très mauvais coups ». Oui, ce qui est certain, c’est que le porno est une destruction de la sexualité, au sens où cela éloigne chaque personne de ses propres désirs. Déconnecté(e)s de leurs véritables sensations, elles/ils ne sont que dans la reproduction d’images, de ces prétendues « performances » qui assimilent l’être à une machine sans âme.