Ça devient vraiment lourd, alors je vais me concentrer d'abord à répondre au
message de Fabicha, en m'en tenant au fond, qui est à propos de l'article de Dominic qui constitue le sujet initial de ce fil.
J'avais
parlé du fait que de manière répétée, on avait accusé Dominic d'être venu exploiter une affaire qui ne concernait pas.
Fabicha":2sxlz5a6 a dit:
Twizzle":2sxlz5a6 a dit:
J'avais fait la comparaison avec les insultes homophobes qu'on trouvait en abondance dans les commentaires concernant l'affaire du chaton. Le sujet de ces commentaires, c'était la maltraitance, pas l'homophobie. Leurs auteurs ont certainement dit "pédé" et "enculé" parce que pour eux ce sont des insultes banales. Aurais-tu dit qu'il n'y a pas dans l'emploi de ces mots et venant de ces personnes de volonté ou d'intention homophobe?
Pour ton exemple concret, je ne sais rien, je n’y étais pas. Je ne suis pas à l’aise pour parler du terme « pédé » spécifiquement car plutôt hétéro mal finie moi-même. Mais, par exemple, j’emploie très régulièrement moi-même le terme « putain ». Ce n’est pas « bien », mais je le fais et je ne reprends pas quelqu’un disant « putain, fais chier ». Et j’estime qu’il y a une différence avec quelqu’un traitant de « sale pute » une prostituée par exemple, où là, c'est clairement sexiste.
Ceci dit, je ne vois vraiment pas le lien avec le jugement du tribunal qui était un acte anti-raciste fort (pas un commentaire Facebook ou une réflexion de mon voisin de palier) déjà pas mal attaqué de toute part.
Fabicha, j'aurais peut-être tout de suite dû faire un tableau, pour rendre ma comparaison claire.
Le fait d'injurier quelqu'un en le traitant de "pédé" ou d''enculé" n'a rien à voir avec le fait d'utiliser "putain!" comme interjection. La comparaison est plutôt avec le fait d'utiliser "putain" comme insulte; et dans ce cas, tu acceptes que c'est clairement sexiste, et tu sembles justifier d'intervenir (en opposant, dans ta phrase, ce cas au cas de l'interjection, où tu dis "je ne reprends pas quelqu’un"). D'ailleurs, la comparaison exacte est non avec le fait d'insulter une prostituée en la traitant de "putain", mais d'insulter, par exemple, Marine Le Pen comme "putain". Même dans ce cas, je pense que toi, et la majorité des gens ici, trouveraient bon d'intervenir contre le sexisme que traduit le choix de ce terme. Ce n'est pas parce qu'on est contre Marine Le Pen qu'on doit s'interdire d'objecter à l'utilisation d'une insulte sexiste. Personne ne va dire que ce faisant on "minimise" la juste lutte contre Marine Le Pen. Personne ne dira qu'on fait "de la récup, du parasitage" (cf.
ton message du 26 juillet).
Dans mon exemple à moi, des personnes s'insurgeaient contre des sévices commis sur un chaton, en proférant une insulte fortement homophobe. Ta réponse - "Pour ton exemple concret, je ne sais rien, je n’y étais pas" - est bizarre. Si quelqu'un insulte quelqu'un en le traitant de "pédé" et d'"enculé", il n'y a pas besoin d'y être pour savoir que c'est homophobe. Même si tu supposes que mon histoire est inventée - elle ne l'est pas - la question n'est pas là. Je cherche simplement à mettre en lumière le fait que quand quelqu'un lance des insultes homophobes, même quand c'est "pour la bonne cause", on trouve bien d'intervenir. On ne vient pas dire que c'est hors sujet et que c'est du détournement. En objectant aux insultes homophobes, je ne minimisais pas le mal infligé au chaton, ou l'oppression des chatons en général. Et je ne vois pas le rapport avec le fait que tu puisses être "plutôt hétéro mal finie" toi-même.
Comme le disait Félidée, "pas besoin d'être directement concerné-e par une discrimination ou une oppression pour la combattre.".
Tu objecteras peut-être à nouveau que je parle de "on" ou que je t'attribue des positions. Tant pis si ce ne sont pas les tiennes. Mais depuis le début de ce fil, on reproche à répétition aux organisateurs des Estivales et à moi en particulier de vouloir tolérer, dans le cadre des Estivales (qui sont centrées sur la question animale) des propos racistes, sexistes, homophobes, etc.
Style:
Grussie":2sxlz5a6 a dit:
je rentre des estivales (...) et franchement, il y a un gros problème dans le mouvement animaliste. (...) j'ai entendu pas mal d'horreurs racistes, et, surtout, une bonne bonne moitié des gens ne relevaient pas le problème.
ou encore:
kindy":2sxlz5a6 a dit:
Concernant les propos/attitudes discriminatoires (sexisme, racisme, autre?) qui ont eu lieu aux Estivales (...) je pense avoir malheureusement bien compris qu'il y a eu des comportements inacceptables et j'ai (comme d'autres personnes) laissé un petit messagede protestation sur le site, car Non on ne peut pas tolérer de telles choses.
(Non seulement, dit cindy, il fallait objecter aux dits propos/attitudes sexistes, etc., mais on ne devait pas les tolérer. C'est dire si sur ce point il fallait était justifié à ses yeux d'intervenir.)
Voire:
Grussie":2sxlz5a6 a dit:
Pour la grève des cheminots, pareil, ce n'est pas le sujet, mais si jamais une personne avait dit aux estivales "pfff fait chier ces grévistes qui cherchent toutes les raisons de pas bosser", j'aurais réagi aussi.
Il y a même eu aux Estivales la création d'un "comité de vigilance" contre tout propos pas bien sur d'autres sujets.
Quoi qu'il en soit des Estivales, il me semble clair ici que la plupart des personnes ici qui critiquent l'article de Dominic (qui le critiquent sur le fond, pas juste sur l'image ou d'autres éléments secondaires) sont pour ce qu'elles appellent "l'intersectionalité des luttes", et au nom de cette notion sont opposées au fait de laisser passer sans contradiction des propos racistes, sexistes, homophobes, etc. "au nom de la bonne cause".
Or, je l'ai dit, dans le cas du jugement du tribunal, la phrase citée - "le fait d’assimiler une personne humaine, quelle qu’elle soit, à un animal, constitue une injure, faite à l’humanité entière"* - est lourdement spéciste. Elle n'est pas juste spéciste de manière anecdotique - contrairement à ce que tu affirmes
ici. Elle est présentée par le tribunal comme le fondement du jugement. Je l'ai déjà dit, et tu continues à me présenter des exemples qui n'ont rien à voir**. Cette phrase est pire que des propos racistes, sexistes, etc. tenus
en passant aux Estivales. C'est pire que les insultes homophobes dans l'affaire du chaton. C'est plutôt comme si quelqu'un prétendait
fonder la condamnation du spécisme sur une base raciste ou sexiste.
Enfin, tu dis: "je ne vois vraiment pas le lien avec le jugement du tribunal qui était un acte anti-raciste fort (pas un commentaire Facebook ou une réflexion de mon voisin de palier) déjà pas mal attaqué de toute part". Les propos que je rapportais étaient perdus au milieu d'un sujet Facebook, et j'y ai répondu sur Facebook. Les propos du tribunal de Cayenne avaient un retentissement public, et Dominic leur a répondu en public.
D'ailleurs, globalement, le concert de protestation contre les sévices commis dans l'affaire du chaton ont eux aussi à la fois constitué un temps fort dans l'opposition à la maltraitance animale, aboutissant à une peine de prison exemplaire, et un moment fort en ambiguïté. Il y a eu beaucoup de réactions parmi les animalistes critiquant cette ambiguïté - non seulement le racisme, l'homophobie et la violence de tant de réactions, mais aussi leur sélectivité. Là encore, ce n'est pas parce que la cause initiale est juste qu'on doit s'interdire de critiquer la manière dont elle est soutenue.
Par contre, mon sentiment est fort que sur ce forum, de la part d'un nombre impressionnant de personnes, quand la cause initiale c'est la dénonciation du racisme, on se fiche sur quelle base elle est menée; et tout particulièrement, on se fiche du fait qu'elle soit menée en enfonçant les animaux non humains.
David
P.S. Tu dis que le jugement de Cayenne était attaqué de toute part. Personnellement, j'imagine que c'est le cas sur les sites genre fdesouche; je ne suis pas allé voir. Mais ce que j'ai surtout entendu est un concert de louanges, les seules critiques étaient que le tribunal avait eu la main lourde. Dominic ne critique en rien la sentence. Je ne comprends franchement pas comment on peut confondre sa critique avec celle venue de la droite dure. Ou alors, c'est qu'on n'a rien lu à l'article, rien compris. J'ai l'impression qu'on prend vraiment les gens pour plus stupides qu'ils ne le sont.
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* Merci au passage d'avoir trouvé ces attendus, c'est un élément important du débat. On peut noter que dans la phrase telle que la citait Dominic, "le fait d'assimiler une personne quelle qu'elle soit, à un animal, constitue une injure, faite à l'humanité entière", il manque la précision "personne humaine" - ce qui rend sans objet une part du raisonnement de Dominic. A la décharge de Dominic, je note que la phrase dans sa version fautive se trouve abondamment sur le Web, et que les attendus n'étaient pas faciles à trouver.
** Genre l'emploi dans les attendus du terme "homme" pour désigner les humain-e-s. Cet emploi n'est en rien présenté comme fondant le jugement.
Grussie, sur la question des pseudos, j'aimerais bien que ce soit terminé. J'ai pointé le fait que le prénom d'Emy_Spheres avait été utilisé avant moi, par diverses personnes dont toi-même, parce que tu me reprochais d'avoir divulgué son prénom, reproche qui ne tient pas debout. Je ne l'ai pas non plus utilisé dans une intention agressive, et d'ailleurs la personne concernée ne m'a pas (ne m'a pas encore?) fait le moindre reproche à ce sujet.
Les autres questions que tu poses sont intéressantes, comme celles posées par Numa (sincèrement). Certaines sont à mon avis franchement hors sujet, comme celle sur le décompte des morts; des débats pour/contre l'utilitarisme, l'addition des plaisirs, la commensurabilité des expériences personnelles, l'existence de l'identité personnelle sont selon moi essentielles mais ce fil n'est franchement pas le lieu, surtout vu l'état des choses.
Sur la priorité à donner ou non au spécisme, je me permets simplement de m'
auto-citer à 20 ans de distance:
(Vous êtes pas obligés de lire, hein, c'est juste en passant.)
l'AIDA nous dit: «les souffrances infligées aux animaux sont incomparablement plus nombreuses et intenses que celles des humains.» Plus nombreuses, oui, mais plus intenses, non. Il n'y a aucune raison d'affirmer que les souffrances infligées aux individus non-humains sont toujours plus intenses que celles des individus humains. J'aimerais largement mieux naître éléphant en Afrique, même destiné à être abattu par un braconnier après un temps de vie tranquille, que gamin mourant de malnutrition, voire que gamin riche myopathe. (...); ce n'est pas parce que je suis militant de la libération animale que je devrais automatiquement choisir, entre améliorer le sort de ces éléphants et celui de ces humains, de favoriser les éléphants.
Il est par contre vrai comme le dit l'AIDA que les souffrances infligées aux non-humains sont, globalement, bien plus nombreuses (...), et leur intensité est souvent comparable aux souffrances humaines les plus graves. Cela serait bien une raison pour choisir, s'il fallait faire ce choix, de donner la priorité à la libération des animaux non humains. Mais j'insiste qu'il s'agit d'un jugement global. Les individus, eux, sont égaux, c'est-à-dire qu'une souffrance égale de l'un ou de l'autre a la même importance, indépendamment du groupe auquel il appartient. S'il faut choisir d'aider l'un ou l'autre de deux groupes donnés, le nombre doit être pris en compte; mais le nombre est une caractéristique du groupe, pas des individus. On a pas à dire que la souffrance d'un individu est plus importante que celle d'un autre quand ils souffrent autant. Ce n'est pas parce qu'il y a dix fois plus de porcs abattus que de veaux que la souffrance d'un veau serait moins importante que celle d'un porc!
La lutte contre l'oppression dont souffrent les humains a donc pour moi outre son importance directe - l'importance de cette souffrance elle-même -, une importance
indirecte, du fait de sa nécessité pour la libération animale. Je tendrais parfois à me dire que, pour faire avancer à long terme la libération animale, le mieux serait, aujourd'hui, de l'oublier, et de se consacrer à l'amélioration de la condition des humains. Mais ce serait là encore une erreur; car je pense aussi que, réciproquement, une des meilleures choses à faire aujourd'hui pour la libération humaine, c'est de lutter pour la libération animale: pour employer une formule qui, certes, ne prouve rien, mais qui sonne bien et résume la chose, je dirais qu'une espèce qui en opprime d'autres ne peut elle-même être libre. Le spécisme est un mensonge que les humains se font à eux-mêmes, et dénoncer ce mensonge ne peut que les aider à progresser. Et comme nous sommes encore très peu à dénoncer ce mensonge, c'est certainement là que nous pouvons avoir le plus d'impact.
On me dira que cela est bien compliqué, voire cynique. La libération humaine ne serait qu'un moyen pour la libération animale, et la libération animale, réciproquement... C'est que, contrairement à une tradition politique bien ancrée, aussi bien chez les «gauchistes» auxquels s'opposent l'AIDA que chez l'AIDA elle-même, je ne pense pas que la libération, ni humaine ni animale, ce soit pour demain
5. Entre aujourd'hui et ce jour-là, il y a beaucoup de progrès intermédiaires à faire. Si on veut se rendre à pied en un endroit, que le but «prioritaire» soit d'y amener le pied gauche ou le pied droit, ce sont les deux qu'il faut avancer. On n'ira pas loin si on suit l'AIDA qui nous dit, «il faut d'abord y mettre le pied gauche, pour le pied droit ça attendra
6».
Cela n'interdit pas de redire à l'occasion, en tant que position de principe, que, puisque la souffrance d'un non-humain est aussi importante que celle d'un humain, et que les premiers sont bien plus nombreux que les seconds, la libération des premiers est en soi plus importante; cela interdit par contre de considérer comme allant dans le même sens que son propre combat l'action en faveur des animaux de ceux qui considèrent que certains individus - parce qu'ils sont humains et juifs ou arabes ou noirs ou autre, méritent, eux, d'être opprimés. Je n'ai pas de haine pour les militants d'extrême-droite, mais je ne vois pas comment on peut penser avancer la lutte pour l'égalité de tous les individus en s'associant avec eux. Je ne vois pas ce qu'on y gagne, concrètement. Je ne vois pas comment on peut attendre du public qu'il comprenne quoi que ce soit au message de la libération animale si nous n'avons pas comme principe répété que l'oppression d'un individu humain est grave
autant, ni plus ni moins, que celle d'un non-humain. Il ne s'agit pas de dire si on a des préférences personnelles pour un vivisecteur antiraciste ou un végétarien de droite - pour un paralysé du pied gauche ou du pied droit - il s'agit de savoir avec qui on pourra cheminer en direction du but recherché
7.