De l'utilité des "happenings"

Miquette":1n3rv21p a dit:
Merci à tous pour vos réponses, je crois que je comprends un peu mieux les raisons qui peuvent motiver de telles manifs.
Effectivement, je comprends aussi l'idée de "la goutte d'eau" qui doit s'ajouter aux autres pour permettre une prise de conscience.

Je reste toutefois d'accord avec V3nom qui affirme "mon questionnement n'est pas du tout concernant les participants et ce qu'ils en pensent, mais l'image qu'ils renvoient à ceux qui ne participent pas." Je reste persuadé que l'image est souvent négative (et non pas neutre, négative). Je continue vraiment de croire que ça peut braquer des personnes et les empêcher (les ralentir) d'entrer dans la réflexion.
Toute la question est : Négative par rapport à quoi ? Ralentir par rapport à quoi ? Qu'est-ce qui pousse à entrer dans la réflexion ? Des stimuli. Et dans la société carniste, des stimuli pour entrer dans la réflexion, il n'y en a pas. Dans la société carniste, à l'état neutre, personne (ou presque) n'entre dans la réflexion. Je ne pense pas qu'assister à un happening de ce genre, personnellement, ça m'aurait empêché de devenir végé, à l'époque où je le suis devenu. A une époque où les controverses sur la viande était quasi inexistantes. La consommation de viande à la moitié du 20ème siècle n'a pas explosé à cause des happenings qui ont poussé les gens à rejeter le végétarisme, mais à cause de la propagande généralisée pour la viande (et des subventions pour développer sa production).

On peut sans doute améliorer ces happenings, mais je ne pense pas qu'on puisse dire qu'ils ont un impact négatif. Ce serait comme dire que la Gay Pride intensifie l'homophobie, que la revendication de leurs droits par les homo intensifie l'homophobie, et que finalement les homos feraient mieux de se cacher et arrêter de se montrer pour ne plus subir l'homophobie.

Je pense qu'on doit vraiment voir ça comme une confrontation de deux forces opposées : Le carnisme qui ne veut pas reculer (et qui aimerait bien écraser le végétarisme)/Le végétarisme qui veut se répandre. (Et cette analogie est valable pour les autres idéologies : Sexisme/féminisme, Racisme/antiracisme, Norme hétéro/mvt LGBT, etc.)
Chaque individu est représentant d'une de ces deux forces, avec plus ou moins d'intensité. Et chaque fois qu'une des deux forces va s'exprimer via un individu vers d'autres "en relation" avec lui, les autres vont avoir une réaction de défense avec la force opposée, qui cherche à sa maintenir... et qui peut aussi céder. Le fait que la réaction de défense soit intense ne signifie pas nécessairement que ça soit un mauvais signe (même si on n'est pas toujours obligé d'en passer par là) : Ça peut aussi signifier qu'elle est sur le point de céder lorsqu'elle sera submergée. Mais si cette réaction de défense n'existe pas, ça peut au contraire être un signe que la force montante opposée n'existe pas non plus. Si le végétarisme ne cherche jamais à se propager, effectivement les réactions de défense du carnisme n'apparaîtront pas non plus.

Et puis l'intérêt aussi de ces petits happenings, même s'ils ne sont pas tous aussi efficaces (selon la façon dont ils sont construits, mais aussi selon le contexte, le lieu, la ville, la région, l'état de la société, dans lesquels ils se déroulent) permettent de maintenir les militants dans une dynamique, de rester dans le bouillonnement, d'être proactifs, de se motiver, de travailler sur sa propre végéphobie, bref de résister à la force opposée en maintenant l'intensité de la sienne.

Je ne sais pas si je suis clair...


Et le coup des passants qui sont totalement imperméables et en opposition, franchement, c'est pas l'impression que j'ai eues. Ils ne laissent pas passer ce qu'ils ressentent et ce qu'ils en pensent, c'est là, le véritable problème pour nous. Mais aucun n'est absolument indifférent, même s'ils expriment de l'énervement. Ils s'énervent face à "nous", pas face à ce qu'ils voient, aux photos, aux réalités décrites. Les photos et les faits leur parlent, ils pensent que c'est quelque chose de triste et qui n'est pas souhaitable, ils voient qu'il y a un problème flagrant, et ils voient des choses qu'ils n'avaient encore jamais vues ou oubliées, mais simplement ils n'acceptent pas (encore) notre solution. Ça ne veut pas dire que ça ne les fait pas réfléchir.
 
Perso l'impression que j'ai, c'est qu'une bonne partie de la cohorte du bingo végéphobe vient de cette image "hystérique et sectaire" de gens bizarres qui font des trucs dégueux sur la place publique en gueulant... Je ne dis pas que "le problème vient des happenings", pour moi c'est clairement un soucis social, une espèce de mépris de la liberté de parole non mainstream.

Après peut-être que ces dernières années ça commence à changer (et je l'espère), mais en général, quand j'entends (plus ou moins de bonne foi) parler de "méchants végés", c'est très souvent l'image de la troupe bizarre qui dérange les gens dans la rue qu'on me renvoie, devant le cousin du copain de l'oncle qui est carencé...
 
Les manifs, les happenings, ne sont pas faits pour convaincre les passants. Il s'agit de montrer l'existence d'un mouvement politique, l'existence d'opposants à l'exploitation des animaux, il s'agit de réclamer des droits pour eux. Je me dis toujours que si tous ceux qui s'interrogent sur l'utilité des manifs y ALLAIENT, ça changerait pas mal de choses.

A votre avis pourquoi les syndicalistes organisent des manifs? Pour convaincre des passants ou pour montrer une opposition? Pourquoi les opposants à l'esclavage manifestaient? Pourquoi les femmes ont manifesté pour leurs droits? Est-ce que ça a marché? La présence des militants aux manifestations et happenings est précieuse pour les animaux.

Extrait de "A quoi servent les manifs?"
À quoi sert une manifestation aujourd’hui ?

· À montrer son intérêt pour « la chose publique »,
· À désavouer certaines institutions représentatives,
· À exprimer ses revendications dans un cadre collectif,
· À soutenir ou à engager une action de négociation,
· À construire une identité collective (banderoles, slogans, couleurs, symbolique du parcours…)
· À médiatiser une action, pour « faire de l’image »,
· À s’imposer, se faire comprendre, se faire accepter,
· Ce qui permet d’entrer dans le processus de décision politique.
 
Justement j'aurais tendance à ne pas ranger "manif" et "happening" (ni "pride") dans le même sac... Ce sont 2 (3...)organisations, 2 "rôles" et 2 "buts" différents de mon point de vue ; et donc d'impact aussi je pense. (quand bien même ils participent de la même émergence globale dans la société)

Il faudrait peut-être faire un ptit glossaire vite fait pour être sûr que tout le monde parle des mêmes choses.

J'aurais tendance à catégoriser (même si c'est naze en soi) comme ceci :

Manifestation : revendication claire et précise portée par le plus grand nombre possible, désaveux d'une décision, d'une loi, engagement ciblé souvent en rapport avec l'actualité récente...

Marche/*Pride : arborer l'existence d'une différence d'opinion, de vie (choisie ou pas), de pensée, revendiquer une place à cette différence (je place les à coté comme les conférences, les tables rondes et tout ça à part)

"Happening" : Action ponctuelle, message choc surprise, revendication véhémente (dans son aspect "imposé", fusse-t-il ultra pacifique), souvent mise en scène du message, appel implicite à la participation des "passants".

Tout ceci participant bien évidemment dans une même démarche d'imposition de message de toute façon, mais avec des rouages, des moyens de toucher les gens et des biais de discours différents selon moi. (mais je peux me tromper)
Puis des actions peuvent très bien être mixées, moitié ceci, moitié celà, j'entends bien...
 
Je ne pense pas que ça dépende de la forme (happening ou manif) mais du message. Une manif pour dire "on est végés on est gentils et contents", ça ne sert à rien, un happening ou une manif pour dire "stop à la discrimination envers les végétariens, stop au massacre des animaux" (comme la Veggie Pride), ça a déjà une portée politique intéressante.
 
Oui c'est évident. Mais même si la portée politique est strictement la même, il y a une différence notable de réception par le public entre une marche (potentiellement annoncée à l'avance) silencieuse pour la fermeture des abattoirs suivit d'un discours devant la fameuse stèle avec la plaque commémorative des bêtes abattues, et une scène surprise avec des gens ensanglantés dans des barquettes par exemple.

Je ne me pose pas la question concernant l'utilité fondamentale, ni le discours, ni la portée politique, mais juste concernant l'image renvoyée aux gens qui y assistent, plus ou moins malgré eux. (cette question n'ayant rien de très important finalement)
 
V3nom":3kvp94zm a dit:
Oui c'est évident. Mais même si la portée politique est strictement la même, il y a une différence notable de réception par le public entre une marche (potentiellement annoncée à l'avance) silencieuse pour la fermeture des abattoirs suivit d'un discours devant la fameuse stèle avec la plaque commémorative des bêtes abattues, et une scène surprise avec des gens ensanglantés dans des barquettes par exemple.

Je ne me pose pas la question concernant l'utilité fondamentale, ni le discours, ni la portée politique, mais juste concernant l'image renvoyée aux gens qui y assistent, plus ou moins malgré eux. (cette question n'ayant rien de très important finalement)

Là dessus, je suis d'accord. L'action barquette a clairement pour but de toucher les passants. Et je ne pense pas qu'un "rapport" par divers médias ait le même impact que d'y assister directement soi-même. Même si ça porte aussi un message politique à médiatiser. Ici, il y a clairement intention d'impacter le passant.
Par contre, typiquement, c'est le genre de happening qui peut être très efficace, dans cette optique (à petit échelle d'impact direct, donc). (Pour moi, c'est donc un mauvais exemple de happening par rapport à ce dont on parle, la mauvaise image et tout ça.)

Et juste une remarque : La Marche de 2012 n'était pas du tout silencieuse. (Même si à l'époque, j'aurais préféré une marche de type procession funéraire.)
 
Ouai j'ai fais l'amalgame avec les recueillements des petits cadavres de L214, je pensais aux 2 en écrivant en fait, du coup j'ai mélangé u_u
 
Mais la veggie pride, elle s'adresse aussi aux végétarien.ne.s, notamment isolé.e.s. Ce n'est pas "que" de la sensibilisation à la cause animale destinée aux omnis comme un happening ou une manif.
 
C'en est même pas du tout comparé aux autres actions de mon point de vue.
 
Extrait du manifeste de la Veggie Pride:
"La Veggie Pride remet en question cette culture dominante [le carnisme] en dénonçant le massacre et pose un débat public sur la légitimité du meurtre des animaux, sans faire intervenir d’arguments écologiques ou de santé humaine : les intérêts des animaux sont en effet fondamentaux en eux-mêmes et constituent une raison suffisante pour abolir la consommation de produits animaux.
C’est pourquoi les banderoles, pancartes et tracts de cette manifestation sont toujours centrés sur le sort des premières victimes de la consommation de viande : les animaux."
 
Non mais je sais tout ça, je connais. (je ne découvre pas la veggie pride, ni les estivales de la question animale ^^)
Mais ça reste le point de vue des organisateurs, participants et acquis au débat.

Du point de vue des non participants à qui on "impose" de type de rassemblement, la pertinence est loin d'être aussi évidente à mon sens. (mais je ne met pas en question les besoins des végés d'afficher sans se cacher, de se retrouver, puis débattre, assister à des conférences, se renforcer par les autres, affirmer la justesse du seul argument éthique, assimiler des argumentaires, etc...)
 
Je trouve par contre un poil contradictoire le terme de Veggie Pride, ie fierté d'être végé, c'est-à-dire mettre au centre les VG, et parallèlement dire "on met au centre des pancartes les animaux, pas la santé, pas l'écologie, les victimes du carnisme, c'est pas nous, c'est les animaux.".
 
C'est vrai aussi, même si j'ai pas osé le relever, car ce n'est pas nécessairement incompatible dans ce sens où la "marche" met en avant (aux yeux des autres) les animaux, et les à cotés (discussions, tablées, etc) sont elles clairement plus faites pour "rassurer" les végés, mais du même coup excluent (non volontairement je sais bien) les "autres".

De tout façon c'est l'écueil le plus compliquer à éviter que d'être le porte parole des sans voix, sans leur voler le centre d'attention... (cf les débats sur les hommes féministes)
 
Je sais pas si c'est compatible ou incompatible, mais c'est en tout cas un peu confusionnant, voire schizophrène.
Une SMAV, c'est clair, c'est entièrement centré sur les animaux et l'abolition de la viande.
Une Veggie pride qui serait centrée sur la visibilité des végé et la végéphobie, bien que reléguant de fait les animaux au second plan en portant à l'attention les victimes collatérales du carnisme, ie nous, me paraîtrait moins confusionnante.

Ouais, vraiment, je trouve que prôner une mise au centre des animaux avec un nom comme Veggie pride et un thème comme la végéphobie, ça rend le message un peu brouillon, on sait plus trop de quoi on parle et quel est le sujet central.
 
Qui ne vise pas du tout le même public, vu que déjà, c'est pas une manifestation publique (dans le sens "sur la voie publique").
 
Faut prendre ça comme un stage de formation des végé qui iront ensuite prêcher la bonne parole dans la rue. ^^
 
Je suis d'accord avec Fushi et V3nom, l'extrait cité par IV me semble un peu contradictoire. La logique voudrait que la Veggie Pride soit surtout la fierté végétarienne de parler pour les animaux, et non pas mettre le problème de la question animale en lui-même au centre de la manif (Et il faut avouer que niveau slogans, la nuance entre la Marche et la VP était très ténue... Personnellement, j'ai entendu un seul slogan propre à la Veggie Pride, dans toute la liste... A part que c'était plus musical et coloré, que le logo Veggie Pride était présent, et que les interventions pour la presse autour de la manif étaient plus axées sur la végéphobie.).

Fushichô":20f25a20 a dit:
Faut prendre ça comme un stage de formation des végé qui iront ensuite prêcher la bonne parole dans la rue. ^^
Pffff. Végéphobe ! :anger:
 
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