En défense de l'élevage (J. Porcher)

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Xav

Massacre des légumes
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Salut à tou-te-s,
J'ai reçu via Facebook un article de J. Porcher publié par la revue Contretemps. C'est une revue généraliste militante (de gauche) normalement de bonne tenue. J'ai vu qu'un de ses livres avait été discuté ici même, et je crois que l'essentiel a été dit. Néanmoins, l'aspect politique du propos est on ne peut plus révélateur. J'ai posté une courte réponse (ci-dessous). J'aurais dû ajouter que l'idée de la compromission commerciale du végétarisme ou de la corruption systématique des tenants de l'éthique animale est pour le moins caricaturale. L'auteure a aussi tendance à utiliser la tradition comme un argument d'autorité (c'est ordinaire mais on attend mieux d'une chercheuse). Il est question dans son texte du végétarisme comme nouvelle forme de séparatisme, ce qui est (historiquement et logiquement) absurde.
Chacun se fera son idée.

http://www.contretemps.eu/fr/interventi ... -politique



"Texte intéressant, notamment dans ses incises sur la domesticité et bien d’autres choses, mais tout à fait contestable sur de nombreux autres points. L’auteure utilise sans nuance des catégories descriptives attrape-tout (comme «l’éthique animale ») ; les organisations (comme PETA) agiraient comme un seul homme, alors qu’elles sont travaillées par des controverses internes ; les fondements normatifs de certaines positions (comme l’utilitarisme) ne sont pas compris. La dimension militante du texte (qui n’est pas un texte de sociologie ou d’anthropologie) n’est pas indépendante de la trajectoire de l’auteure (ancienne éleveuse et technicienne agricole, aujourd’hui chercheuse à l’INRA) et tente d’imposer derrière un argument de fond (les contradictions des pratiques végétariennes du point de vue de la souffrance animale et du fonctionnement du capitalisme industriel) une vision aussi simpliste qu’erronée (le végétarisme serait un nouveau séparatisme entre les espèces) qui révèle surtout une méconnaissance de la diversité socio-historique de leurs relations."
 
Un résumé du texte de Jocelyne Porcher.


Le point de départ est un rapport récent de la FAO qui dresse le bilan négatif de l’élevage sur l’environnement (effet de serre, réduction de la biodiversité, pollution des eaux). J. Porcher envisage de manière critique les alternatives proposées par la FAO et d’autres organisations (le perfectionnement écologique de l’industrie qui reviendrait à légitimer l’industrie agroalimentaire, et le végétarisme comme posture éthique).

La position de la FAO reviendrait à soutenir le développement industriel. Jocelyne Porcher distingue « productions animales » (c’est-à-dire la production de matières animales à partir de l’élevage) et « systèmes industriels et intensifiés ». A partir de cette distinction sémantique, elle estime que ce n’est pas l’élevage en tant que tel qui dégrade l’environnement mais le système industriel. Porcher caractérise l’élevage comme un rapport historiquement évolutif aux animaux qui se fonde notamment sur une rationalité économique. L’industrialisation représente une étape majeure dans l’évolution de l’élevage dans la mesure où elle repose sur le déni d’existence des animaux ; elle transforme les animaux, autrefois partenaires d’une relation de travail, en objets. Cela n’est pas sans conséquences sur le personnel de l’industrie agroalimentaire et qui est directement en relation avec les animaux. Ce personnel n’est pas protégé par la distance que produit l’industrie entre les animaux et les humains. Dans le sillage de la réflexion sur les effets de l’industrialisation à partir des années 1970, toute une littérature (juridique, philosophique) se serait emparée de la question du « bien-être animal », mais en délaissant certains aspects fondamentaux : la diversité des formes d’élevage (notamment non industriel), et le rapport social entre animaux et humains dont celles-ci sont le support.

Les courants de l’éthique animale, à la suite de P. Singer, prôneraient, en dehors du végétarisme, une amélioration immédiate du sort des animaux, ce qui reviendrait à soutenir les systèmes industriels susceptibles de réduire la souffrance animale par des moyens biotechnologiques. C’est ce qui explique, selon Porcher, que Singer soutienne McDonalds qui développe un programme pour le bien-être animal. Cet arrangement entre bien-être animal et capitalisme industriel serait également illustré par l’action de Compassion in World Farming et par l’enseignement de nombreux spécialistes en éthique animale. Les végétariens consommant des produits laitiers et des œufs ne seraient pas plus vertueux puisqu’ils délèguent la responsabilité de la mort des animaux, dont ils consomment certaines matières, aux carnivores : « L’omelette au fromage n’est pas plus vertueuse que le steack ». L’objectif politique majeur selon Porcher est au contraire de soutenir d’autres systèmes d’élevage reposant sur une co-responsabilité entre éleveurs et animaux.
 
Je suis assez d'accord avec le premier paragraphe dans ce sens où je pense que le facteur commun à toute dégradation environnementale c'est la notion de rendement, de rentabilité, et donc d'efficacité, souvent massive.

Par contre je ne considérerais jamais les animaux comme "partenaires" de travail. On travail quand on choisit de le faire. Quand on y est obligé c'est plus du travail mais de l'esclavagisme. (c'est vraiment "bisounours" cette façon de considérer l'exploitation animale "dans l'histoire humaine")

Les noirs aussi faisaient le boulot le plus souvent sans rechigner ni mot dire, ils ont même créés le blues pour soulager leur labeur... ça en faisait pas pour autant des "partenaires".

Son deuxième paragraphe je ne sais pas trop où elle veut en venir. Il est clairement depuis le début question de neo-welfarisme sans le nommer (le "bien être animale, mais toujours exploité"), mais tanto elle souligne les incohérences qui y sont souvent liés, tanto elle prône un welfarisme plus aboutit... Avec je pense (toujours sans trop le dire) une idéalisation des élevages champestres tout beaux avec les animaux heureux gambadant dans l'herbe...
 
V3nom":mtow8a61 a dit:
Par contre je ne considérerais jamais les animaux comme "partenaires" de travail. On travail quand on choisit de le faire. Quand on y est obligé c'est plus du travail mais de l'esclavagisme. (c'est vraiment "bisounours" cette façon de considérer l'exploitation animale "dans l'histoire humaine")

Son deuxième paragraphe je ne sais pas trop où elle veut en venir. Il est clairement depuis le début question de neo-welfarisme sans le nommer (le "bien être animale, mais toujours exploité"), mais tanto elle souligne les incohérences qui y sont souvent liés, tanto elle prône un welfarisme plus aboutit... Avec je pense (toujours sans trop le dire) une idéalisation des élevages champestres tout beaux avec les animaux heureux gambadant dans l'herbe...


Je suis d’accord avec toi sur l’élevage. C’est une relation de domination et d’exploitation. Pour J. Porcher certaines formes d’élevage (non industriel) supposent une relation de travail émancipatrice pour l’homme et pour l’animal. On imagine que les animaux peuvent y gagner (par rapport à l’élevage industriel) une reconnaissance en raison de ce qu’ils apportent à l’homme (un moyen de subsistance) et de ce qu'hommes et animaux partagent le même quotidien. Mais c’est une position idéaliste qui est un déni des fins de cette relation : l'intérêt économique et la mise à mort de l’animal (ou le délaissement lorsque l’animal de travail n’est plus productif).
 
On reste surtout infiniment ancré dans un déni culturel, que dis-je, historique, du rapport de domination totale, et on se complais dans une idéalisation fantasmée du "colon bienfaiteur". (beaucoup pensent encore ainsi concernant l'Afrique aussi)

Genre les animaux étaient à la dérive et sur le déclin avec l'exploitation humaine...
 
Je commente d'après ton résumé, pas lu le texte original.

Xav":2v0csut1 a dit:
L’industrialisation représente une étape majeure dans l’évolution de l’élevage dans la mesure où elle repose sur le déni d’existence des animaux ; elle transforme les animaux, autrefois partenaires d’une relation de travail, en objets.
Ben oui, des partenaires de travail qu'on met au boulot dès la naissance, et à qui on offre la retraite, pardon, la réforme dès qu'ils ne sont plus assez rentables ou qu'ils atteignent le poids suffisant. Donc au plus tard à l'adolescence, pour les plus chanceux. Oui, ça se tient, comme métaphore... "partenaires d’une relation de travail"...

Xav":2v0csut1 a dit:
Les végétariens consommant des produits laitiers et des œufs ne seraient pas plus vertueux puisqu’ils délèguent la responsabilité de la mort des animaux, dont ils consomment certaines matières, aux carnivores : « L’omelette au fromage n’est pas plus vertueuse que le steack ».
Et faisant gentiment omission du fait que l'ovo-lacto-végétarisme est une remise en cause du système à très forte dimension symbolique et impact social, que l'abattage aurait beaucoup de mal à pouvoir se poursuivre si ça n'apportait plus aucun intérêt financier en soi (à condition, bien sûr, que les consommateurs ne restent pas dans le déni si on vient à abattre les animaux sans les manger), ce qui signifie que l'ovo-lacto-végétarisme est déjà une cause d'affaiblissement de l'industrie de l'élevage, et surtout que l'ovo-lacto-végétarisme est une phase importante au niveau individuel pour passer au végétalisme et surtout pour faciliter l'acceptation du végétalisme par la société.
Végétalisme dont elle est de toute façon convaincue de l'impossibilité physiologique (si je me souviens bien de sa conférence de juin : http://www.franceculture.fr/peut-on-manger-les-animaux ...). A partir de là, si on refuse les vérités qui dérangent, forcément...

Un jour, ils vont bien finir par se rendre compte, tous ces gens qui aiment tellement les animaux et veulent absolument les tuer, que c'est faire preuve d'une incroyable schizophrénie d'avoir de l'empathie pour un animal, défendre cette empathie, lutter contre sa trop grande souffrance, et continuer pourtant à défendre le droit de le tuer... Ne pas se rendre compte que sa souffrance n'est prise en compte que parce qu'on admet que l'autre "EST", qu'il ressent, et que c'est donc "lui", cet "observateur-ressentant", son "essence", sa vie qu'on prend en empathie...
Des malades mentaux...
 
Porcher est à vrai dire fermement anti-végé, qu'elle considère comme des pro-industrie de droite (ce son ses mots xD)

J'en ai fait un pdf assez remarquable de conneries, elle va bien avec Lestel et sa vision du bon sauvage amérindien disant pardon aux bête qu'il tue xD

http://www.myupload.dk/showfile/1vXqPnSqt

(en plus mon pdf est plus joli que la page internet d'origine, j'y a passé 3h de remise en page xD)

Elle manie bien le verbe mais elle a une vision sinon parcellaire, au pire complètement fantasmée des végétariens et des antispécistes, et c'est assez "drôle" de se dire que c'est une collègue de boulot de Florence Burgat à l'INRA... C'est son parfait opposé question éthique animale.

Porcher est juste anti indus et pro ptits élevages bucoliques aux animaux heureux (des "partenaires" comme elle se plait à le marteler) d'il y a 100 ans...

(ya un superbe plateau dans cet épisode de France Culture, donc les 2 sus-citées, je m'empresse d'écouter et archiver ça :))
 
Merci pour le pdf, V3nom !
Mais, Ouhlà, je n'ai lu qu'une page et déjà ça m'agace trop, ce mépris condescendant, ramassis de foutaises...
Arrrrrrrrgh :anger: :bink:
je me garde ça pour une autre fois, sinon je vais encore devoir tuer une demi tablette de chocolat pour me passer les nerfs (chuis un homme un vrai, incontrôlablement soumis à mes hormones)
 
Ce pdf est un condensé de son discours à la fois mensonger, fantasmé et oui condescendant en plus d'être ignorant, mais c'est pas mal de connaitre sa position aussi "extrême" envers les végé avant d'écouter son discours vachement plus vague et consensuel dans le liens de Pers0nne sur France Culture... (où super Florence parle vraiment très très peu et c'est bien dommage, en plus de la non moins dommage absence de Marcela)
 
V3nom":qlsng6ym a dit:
Porcher est à vrai dire fermement anti-végé, qu'elle considère comme des pro-industrie de droite (ce son ses mots xD)

J'en ai fait un pdf assez remarquable de conneries, elle va bien avec Lestel et sa vision du bon sauvage amérindien disant pardon aux bête qu'il tue xD

http://www.myupload.dk/showfile/1vXqPnSqt

(en plus mon pdf est plus joli que la page internet d'origine, j'y a passé 3h de remise en page xD)

Wouh... Effectivement, c'est dense... Pfiou... Aaaah... C'est insupportable...

(Lestel, je l'ai jamais lu dans le texte, ça risque de me rendre fou. J'ai juste lu des compte-rendus, c'était déjà bien.)

Bon, sinon, moi, personnellement, je suis un peu phobique social, donc j'ai vraiment pas énormément de contacts avec les gens, et notamment avec mes voisins, qui sont noirs. (Tout ceci est la stricte vérité.) On ne pourrait pas rétablir l'esclavage pour que je reconstruise le lien avec eux ? Merci.
Je pense aussi à nos colonies, qu'on a été tellement idiots d'abandonner, en coupant ainsi nos relations si enrichissantes et joyeuses avec ces bons sauvages.

Et puis aussi, j'ai pas bien compris en quoi le fait de faire disparaître l'élevage nous empêcherait d'héberger dans notre jardin un ou deux corbeaux, hérissons, canards, lapins, chats ou chiens, qu'on n'aurait ni besoin ni envie de tuer...
A noter, également, que les quelques chevreuils et sanglier que j'ai croisés ces derniers mois m'ont chaque fois fourni un sentiment de pur ravissement pendant de longues minutes (voire heures), ce que je ne m'explique pas puisqu'ils n'étaient pas attachés, et que je n'ai donc pu ni les traire ni les manger.
Elle m'expliquera encore comment font les réalisateurs de documentaires animaliers et autres observateurs scientifiques pour faire leur travail, malgré l'incroyable contrainte de ne jamais attraper ni tuer les animaux qu'ils étudient. Ça doit être un véritable calvaire.

(Bon sang, j'en suis qu'à la moitié du texte, et j'ai déjà eux cinquante fois envie de lui faire manger mes rognures d'ongles de pieds...)

Le rapport à la mort... Ben tu sais, Jocelyne, t'as qu'à faire une fausse couche une fois dans ta vie, tu l'auras. Ou bien étouffer mémé avec un coussin dès qu'elle aura perdu la boule. C'est bien aussi, comme rapport à la mort. Ou te suicider.
Moins tendancieux, tu peux aussi prendre quelques heures de ton temps pour faire de l'accompagnement bénévole de personnes mourantes. Ça enrichira ton rapport à la mort, et ça donnera un peu de paix à quelqu'un qui en a encore besoin. Tu vois, c'est possible, Jojo !

Ah oui, à l'entendre, j'ai aussi un peu l'impression que TOUS les Français doivent avoir l'obligation absolue de devenir des éleveurs, pour rétablir ce lien psychologique si nécessaire à tout un chacun, ce lien si tellement beau avec notre part d'animalité d'élevage. Je ne sais pas si ça va tenir, économiquement parlant.

Mon dieu, le passage poétique en prose... Paraît que le gros défaut des véganes, c'est de manquer de sensibilité et d'amour pour les animaux. (Je confirme : C'est complètement ce qu'on leur reproche constamment.)... Vous en voulez de la sensibilité ? Allez, on va plonger dans le puits de pathos !... L'hypersensibilité des végétariens ? NON ! Jojo est capable de mille fois pire !

Gaaaaah...

Pfou... J'ai fini le texte. J'ai souffert. Atrocement.
:mmm:
 
V3nom":1b8escfs a dit:
Ce pdf est un condensé de son discours à la fois mensonger, fantasmé et oui condescendant en plus d'être ignorant, mais c'est pas mal de connaitre sa position aussi "extrême" envers les végé avant d'écouter son discours vachement plus vague et consensuel dans le liens de Pers0nne sur France Culture... (où super Florence parle vraiment très très peu et c'est bien dommage, en plus de la non moins dommage absence de Marcela)
C'est vrai qu'elle était beaucoup plus mesurée. J'avais presque l'impression qu'elle n'était pas pour le végétarisme, mais à contrecœur.
 
Complètement d'accord avec la critique de PersOnne.
Je vais lire le PDF de V3nom.
Par contre, je ne trouve pas que Porcher manie bien le verbe, du point de vue des sciences sociales j'entends. L'écriture oscille entre le normatif (militantisme) et l'impressionnisme descriptif. Il n'y a pas d'appareil probatoire, pas de propos construits sur des faits mis en série qui soient vérifiables, pas d'analyse sérieuse de discours (dans sa critique de l'éthique animale par ex.), pas de reconstruction de l'espace des positions (pour comprendre, et pas seulement dénoncer, cette fameuse "compromission" des spécialistes de l'éthique animale). On est loin de l'enquête et on est plus proche de l'essayisme fondé sur une expérience personnelle. Mais je ne dis pas que ce n'est pas intéressant puisque ça suscite des réactions.
 
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