Frontière de la sentience

Picatau

Fait crier les carottes
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Voilà une question que je me pose à laquelle je n'ai pas trouvée de réponse.
Elle a peut-être été abordée sur le forum mais j'avoue ne pas avoir cherché.

Où placer la frontière de la sentience ?
Une plante est-elle sentiente (je dirais a priori que oui) et au delà, un micro-organisme est-il sentient ? Quid des bactéries, virus et autres organismes unicellulaires ?

Question purement philosophique même si on doit pouvoir y trouver des implications pour le véganisme.
 
Ce n'est pas une question philosophique, c'est de la biologie.
 
Mais vois-tu précisément ce que signifie sentience ? Si c'est la conscience d'avoir des sentiments, des sensations, des perceptions, notamment le plaisir et la peine, cela nécessite la présence d'un système nerveux. Biologiquement les plantes n'en ont pas. Si elles ont une forme de sensibilité ou de conscience, elle est entièrement différente de celle des animaux et pour l'instant nous n'avons aucun moyen de la connaître. Il est donc raisonnable de penser qu'elles sont dénuées de sensibilité et donc de sentience.

Voir cet article pour les plantes.
Voir cet article pour les bactéries et autres.
(N'ayant qu'un faible niveau en sciences je ne peux pas valider la qualité de ces liens mais ils m'ont l'air sérieux.)
 
Synae":1qvotitr a dit:
Mais vois-tu précisément ce que signifie sentience ? Si c'est la conscience d'avoir des sentiments, des sensations, des perceptions, notamment le plaisir et la peine, cela nécessite la présence d'un système nerveux. Biologiquement les plantes n'en ont pas. Si elles ont une forme de sensibilité ou de conscience, elle est entièrement différente de celle des animaux et pour l'instant nous n'avons aucun moyen de la connaître. Il est donc raisonnable de penser qu'elles sont dénuées de sensibilité et donc de sentience.

Voir cet article pour les plantes.
Voir cet article pour les bactéries et autres.
(N'ayant qu'un faible niveau en sciences je ne peux pas valider la qualité de ces liens mais ils m'ont l'air sérieux.)

Il faudrait en effet définir précisément la sentience. Si quelqu'un a un lien ?
Sinon, les plantes ne sont pas dénuées de ce qu'on peut nommer sensitivité me semble-t-il. Elles ne sont peut-être pas sentientes mais sensitives, non ? Un biologiste pourrait nous éclairer ?
Cela ne résout pas la question des micro-organismes.

Assia":1qvotitr a dit:
Ce n'est pas une question philosophique, c'est de la biologie.

Je ne suis pas convaincu que la biologie puisse résoudre la question radicalement. Une définition précise et partagée de le sentience serait toutefois un préalable souhaitable.
 
Picatau":2ix9ofmw a dit:
Assia":2ix9ofmw a dit:
Ce n'est pas une question philosophique, c'est de la biologie.

Je ne suis pas convaincu que la biologie puisse résoudre la question radicalement. Une définition précise et partagée de le sentience serait toutefois un préalable souhaitable.

A toi l'honneur, c'est toi qui a lancé le sujet.

Si la biologie ne résout pas le pb, la philo encore moins.
 
Picatau":z89n89ip a dit:
Il faudrait en effet définir précisément la sentience. Si quelqu'un a un lien ?
Sinon, les plantes ne sont pas dénuées de ce qu'on peut nommer sensitivité me semble-t-il. Elles ne sont peut-être pas sentientes mais sensitives, non ? Un biologiste pourrait nous éclairer ?
Cela ne résout pas la question des micro-organismes.

J'ai l'impression que tu n'as pas lu mes liens. Si mon niveau est faible en biologie, on trouvera difficilement meilleure référence sur la question que les Cahiers Antispécistes et David Olivier, qui sont les liens vers lesquels je te dirige... Et qui résolvent en effet la question des micro-organismes.

Pareil pour la définition de la sentience, pas mieux que les Cahiers Antispécistes :
http://www.cahiers-antispecistes.org/sp ... article281
Une autre référence majeure en anglais, Gary Francione :
http://www.abolitionistapproach.com/a-f ... S3ZezBri5I

Je pense qu'on peut le résumer comme la capacité à voir le monde d'un point de vue subjectif (avoir des désirs, des craintes, des préférences, avoir conscience de ses perceptions physiques...). Comment une plante pourrait-elle avoir une conscience subjective sans influx nerveux rapide ? Bref, voir liens donnés.

Ni dans l'intuition ni dans la science il n'y a quoi que ce soit qui puisse permettre de fonder rationnellement un devoir moral à l'égard des plantes en elles-mêmes. Il est donc cohérent aujourd'hui de ne pas les considérer de la même manière que les animaux. Après, chacun fait comme il le sent hein :whistle:...

 
Synae":2yr6tdol a dit:
Picatau":2yr6tdol a dit:
Il faudrait en effet définir précisément la sentience. Si quelqu'un a un lien ?
Sinon, les plantes ne sont pas dénuées de ce qu'on peut nommer sensitivité me semble-t-il. Elles ne sont peut-être pas sentientes mais sensitives, non ? Un biologiste pourrait nous éclairer ?
Cela ne résout pas la question des micro-organismes.

J'ai l'impression que tu n'as pas lu mes liens. Si mon niveau est faible en biologie, on trouvera difficilement meilleure référence sur la question que les Cahiers Antispécistes et David Olivier, qui sont les liens vers lesquels je te dirige... Et qui résolvent en effet la question des micro-organismes.

Pareil pour la définition de la sentience, pas mieux que les Cahiers Antispécistes :
http://www.cahiers-antispecistes.org/sp ... article281
Une autre référence majeure en anglais, Gary Francione :
http://www.abolitionistapproach.com/a-f ... S3ZezBri5I

Je pense qu'on peut le résumer comme la capacité à voir le monde d'un point de vue subjectif (avoir des désirs, des craintes, des préférences, avoir conscience de ses perceptions physiques...). Comment une plante pourrait-elle avoir une conscience subjective sans influx nerveux rapide ? Bref, voir liens donnés.

Ni dans l'intuition ni dans la science il n'y a quoi que ce soit qui puisse permettre de fonder rationnellement un devoir moral à l'égard des plantes en elles-mêmes. Il est donc cohérent aujourd'hui de ne pas les considérer de la même manière que les animaux. Après, chacun fait comme il le sent hein :whistle:...


Mea culpa, mea maxima culpa, je n'avais en effet pas vu les liens. Merci beaucoup, je vais lire avec attention.
Se poser la question de la "sensibilité" des plantes, ce n'est pas nier que la souffrance animale est d'un autre ordre. La question se pose lorsque des carnistes vous balance le fameux cri de la carotte. Le fait que les animaux possèdent un système nerveux est certes un donné majeur, cela n'empêche pas de se poser la question de la souffrance pour l'ensemble du vivant, non ?
 
Evidemment qu'on peut se poser la question. Perso j'en ai conclu que la souffrance végétale était peu plausible, parce qu'il n'y a aucune raison que l'évolution retienne un système aussi couteux et parfaitement inutiles pour les pauvres plantes qui ne peuvent pas se défendre. Mais sinon c'est une belle licence poétique.
 
Picatau":1smh1aow a dit:
Mea culpa, mea maxima culpa, je n'avais en effet pas vu les liens. Merci beaucoup, je vais lire avec attention.
Se poser la question de la "sensibilité" des plantes, ce n'est pas nier que la souffrance animale est d'un autre ordre. La question se pose lorsque des carnistes vous balance le fameux cri de la carotte. Le fait que les animaux possèdent un système nerveux est certes un donné majeur, cela n'empêche pas de se poser la question de la souffrance pour l'ensemble du vivant, non ?

Je n'essayais pas de dire qu'il ne faut pas se poser la question, je suis désolée si c'est ce que tu as compris. J'essayais plutôt de montrer que nous sommes surtout loin d'être les premiers à nous la poser :p. Ce qui permet de ne pas partir de rien.

barbux":1smh1aow a dit:
les plantes ont quand même des systèmes de défense très élaborés !

Mon corps aussi se défend super bien contre les infections, les virus, etc. Ces actions s'effectuent pourtant indépendamment de toute conscience et en particulier de la mienne. A moins que notre corps ne soit constitué d'un tas de petites consciences indépendantes et actuellement indétectables ? :p Pourquoi pas, après tout, mais en tout cas cet argument ne permet pas de trancher à mon avis.

Un dernier lien puisque l'article est complet :
http://lesquestionscomposent.fr/tag/sentience/

Et aussi, une dernière idée : même chez les humains la question de la conscience n'est pas tranchée. Après tout, qu'est ce qui me prouve vraiment que vous-mêmes humains autres que moi êtes des consciences sensibles ? :p Je ne le saurai jamais puisque je ne pourrai jamais entrer dans votre cerveau pour le constater en me mettant à votre place. Vous pourriez aussi bien être des robots super élaborés, des produits de mon imagination... En la matière, que ce soit chez les plantes ou les animaux, il n'y aura à mon avis jamais de vérité absolue puisque la conscience est ce qu'il y a de plus intime et inaccessible ; il ne peut y avoir que des probabilités basées sur des signes extérieurs (en l'occurrence une activité neuronale conjuguée à certains comportements ou discours). Puisque la vérité est inaccessible autant se contenter d'essayer d'être cohérent (on postule que la conscience a à voir avec le système nerveux, or les plantes n'en ont pas) et de faire usage de sa raison pratique...
 
OK, je te suis, mais faut-il vraiment avoir une conscience pour éprouver de la souffrance ?
 
http://lesquestionscomposent.fr/tag/sentience/

J'ai bien lu le texte du lien qui présente des arguments recevables pour la plupart. Je ne suis malgré tout pas entièrement convaincu par plusieurs points. Avant tout, je ne suis pas sûr qu'on puisse avancer assurément l'existence d'un siège strictement physique de la conscience, du moins, c'est une question qui n'a jamais été tranchée et la science n'est pas encore parvenue à mettre en évidence la conscience (on pourrait en discuter à n'en plus finir d'ailleurs). L'article adopte un point de vue scientiste et rationaliste qui se veut garant d'une logique de pensée absolue. Pourtant, c'est souvent aussi au nom de la science que les carnistes affirment la supériorité (en termes d'élaboration peut-être) de la conscience humaine sur celle des (autres) animaux, si tant est qu'ils leur reconnaissent une conscience.
Je suis très loin d'être anti-science, au contraire, mais je ne crois pas que la science puisse tout résoudre et expliquer.
Parmi les hommes, qui peut se targuer d'être un individu purement rationnel ? A mon sens, l'homme est capable de raison ce qui ne veut pas dire qu'il soit tout le temps raisonnable et raisonné. C'est vrai pour les carnistes mais c'est vrai aussi pour les veg-.

Merci néanmoins pour le lien vers cet article qui fait tout de même bien avancer la réflexion.
 
Picatau, si tu crains que les végétaux souffrent, tu peux favoriser la consommation de fruits qui n'impliquent pas de tuer la plante mère.
Je n'aime pas l'idée qu'on abatte un arbre, ou qu'on le saigne pour récolter du sirop d'érable par exemple mais je ne sais pas si il sent quelque chose. Mais dans le doute, je ne vais pas pour autant m'abstenir d'utiliser du papier ou refuser le sirop d'érable (encore que ça c'est facilement évitable).
La souffrance des animaux est évidente (moins pour certains fruits de mer), pour les plantes, beaucoup moins quand même. Je respecte toute forme de vie, mais si je me mets à penser à l'immoralité de tuer et d'utiliser des plantes et des micro-organismes, je ne vivrais plus !
 
Picatau":1j49i2k9 a dit:
L'article adopte un point de vue scientiste et rationaliste qui se veut garant d'une logique de pensée absolue. Pourtant, c'est souvent aussi au nom de la science que les carnistes affirment la supériorité (en termes d'élaboration peut-être) de la conscience humaine sur celle des (autres) animaux, si tant est qu'ils leur reconnaissent une conscience.
Je suis très loin d'être anti-science, au contraire, mais je ne crois pas que la science puisse tout résoudre et expliquer.

Parmi les hommes, qui peut se targuer d'être un individu purement rationnel ? A mon sens, l'homme est capable de raison ce qui ne veut pas dire qu'il soit tout le temps raisonnable et raisonné. C'est vrai pour les carnistes mais c'est vrai aussi pour les veg-.

Et pourtant, il faut bien se baser sur quelque chose si on veut bâtir une éthique ensemble. La science, qui fait d'énormes efforts pour justifier en permanence ses conclusions, qui n'existe pas sans l'aval d'une communauté internationale de chercheurs, me semble plus solide qu'un sentiment mystique tout personnel, qui ne cherche même pas à se justifier par autre chose que la puissance du sentiment lui-même. On peut parfaitement fonder sa vie sur des mythes qui nous semblent importants, mais on peut difficilement justifier de demander aux autres d'en faire de même.

Mais je suis d'accord pour dire que la science et la raison ne suffisent pas. Pour moi l'éthique vegan est indissociable d'un sentiment irrationnel, l'empathie pour ceux qui souffrent. Le fait est que cette empathie est largement répandue parmi la population occidentale, et que la science peut nous aider à la diriger de manière cohérente vers ceux qui la "méritent" (par exemple sans la science on ne saurait pas forcément que les poissons souffrent, mais une fois qu'on le sait on ne peut plus l'oublier et notre empathie s'applique également à eux).

Donc à mon avis pour fonder une éthique il faut à l'origine :
- soit une forte intuition que la chose (animal, plante, objet) souffre
- soit une affirmation par la science que, parfois malgré les apparences, elle souffre autant que les choses (humains par exemple) qui reçoivent déjà notre empathie

La plupart des mammifères remplissent les deux conditions. Les poissons et certains mollusques seulement la deuxième en général, ce qui suffit vu la confiance que nous accordons aujourd'hui à la science. Les plantes et les robots ne remplissent absolument pas le deuxième critère ; quant au premier, il n'est rempli que pour une infime minorité de la population qui a l'intuition que les plantes (ou les robots ?) souffrent, et ce critère reste faible sans confirmation rationnelle dans une société où l'intuition n'est pas très valorisée.

Quoi qu'il en soit un discours qui ne trouve aucune validation scientifique et qui n'a aucune résonance dans le coeur de la majorité des gens ne trouvera pratiquement aucun écho dans la société, alors à quoi bon en faire autre chose qu'une affaire personnelle...

Picatau":1j49i2k9 a dit:
OK, je te suis, mais faut-il vraiment avoir une conscience pour éprouver de la souffrance ?

S'il existait une souffrance dont aucune conscience n'aurait, justement, conscience, ce serait une souffrance dans le vide, une souffrance sans personne pour la recevoir, pour la vivre, qui n'aurait d'importance pour personne... :hein:

Mais comme le dit Karouba, fait en fonction de tes sentiments. Je n'essaie pas de te détourner de tes intuitions, j'explique juste pourquoi il m'est impossible de les partager.
 
Je penche plus vers les idée de Assia et de Karouba.

Puis la question a ces limites, comme pour un autre sujet, l'homme a t'il la possibilité de ne pas nuire au arbre par exemple, aux plantes ? J'en doute....

Après je pense que les plantes de souffre pas, mais on ne peut en être certain, donc on ne peux rien affirmer.

( Synae je m'en vais lire tes articles qui sont sur ton blog, surtout les articles sur Jacques Derrida qui m'on l'aire vraiment intéressant. :) )
 
Je suis d'accord avec tout ce que dit Synae.

J'ajoute que : Le sentience, la conscience + la sensibilité, personne n'est capable de la définir ni de donner la preuve de son existence. Je sais simplement que MOI, j'existe et je ressens. Si vous existez et ressentez, je ne peux pas vous prouver que j'existe et ressens. Et réciproquement, vous ne pouvez pas me le prouver non plus. Et ma conscience, ma sensibilité, je ne suis même pas capable d'en expliquer la cause ni de la décomposer pour en comprendre le principe. Je peux juste vaguement y réfléchir sans pouvoir y poser des termes concrets compréhensible (voir les qualias) Je sais que je suis, c'est tout. C'est une connaissance arbitraire, un postulat de base pour tout le reste de mes raisonnements. Mais vu que vous avez des comportements très similaires aux miens et que je comprends votre langage et les concepts que vous êtes censés me transmettre, j'en déduis que vous avez la même existence mentale que moi.
Vu que beaucoup d'animaux ont également des comportements très similaires, dans l'expression de leurs réactions et de leurs souffrances, j'en déduis également qu'ils ont une forme d'existence mentale, de ressenti.
Mais à aucun moment je ne suis capable de le démontrer.
La science semble prouver et décortiquer les principes de raisonnement, l'élaboration des pensées et des ressentis, par l'étude du système nerveux et du cerveau. Mais malgré tout, si nos pensées et ressentis dépendent bien de la matière, ça donne toujours pas une explication absolue parfaitement compréhensible. Un système logique qui analyse des données et actionne les membres et les mécanismes d'un ensemble de moteur pour se préserver n'a aucune raison d'être doté d'une existence mentale. Le tout n'est qu'un ensemble d'échanges électriques, de calculs binaires (ajouts ou suppressions des flux). Ça explique la complexité des traitements et des réactions, mais peu importe la complexité de la chose, ça ne justifie toujours pas "l'existence mentale" (voir La chambre Chinoise).
Malheureusement, même en postulant que la conscience, la sensibilité, la sentience, ont une nature immatérielle, ça ne résout pas non plus le problème : Ça n'explique rien. La matière, la biologie ont bel et bien une incidence sur mes capacités de réflexions, sur ma mémoire, sur ma personnalité, sur ma perception. Postuler l'immatériel ne fait que déplacer le problème, puisqu'on suppose un autre domaine dimensionnel, alors que ce qui caractérise mon existence, c'est d'être unique, insécable, ponctuelle, et distincte de tout.

De toute façon, étudier la conscience, la nature de la conscience/sentience, sa cause est voué à l'échec, simplement par le fait que c'est un cercle vicieux. Un cerveau qui s'étudie soi-même. On peut étudier ce qu'on peut observer qui est extérieur à soi, on peut étudier un système fini, on peut étudier une chose plus petite que soi. On ne peut pas étudier ce qui nous englobe, ce qui nous produit ou ce qui nous détermine. La logique ne peut pas prouver elle-même que la logique est toujours vraie. On ne peut pas définir le terme "être". On ne peut pas définir le terme "vérité". On ne peut pas définir "je". On ne peut pas étudier "la conscience", parce que pour étudier la conscience on fait appel à la conscience. Du moins, on peut l'étudier éternellement, par approximations scientifiques probabilistes, mais pas l'expliquer de manière absolue.

"j'existe" est un postulat pour toute réflexion, c'est ce qui permet de définir le mot "être", c'est ce qui permet tout le reste. Et donc en tant que postulat de base, "j'existe" n'est pas décomposable, démontrable, explicable. L'impossibilité de cette explication est tout simplement logique.

Donc, je pose que les autres existent, ont une conscience, une sensibilité, une sentience, par analogie avec ma propre existence. Et visiblement le système nerveux n'y est pas pour rien. Puisque visiblement, la capacité de traitement d'informations joue un rôle dans l'élaboration de la pensée, et dans la conscience. Et les plantes n'ont pas de capacité de traitement de l'information. Elles ont des réflexes, des réactions chimiques, tout comme mon système immunitaire a des réactions chimiques, ou comme un membre séparé de mon corps peut encore rester en vie et réagir à certains stimuli extérieurs. Séparé de mon corps, l'ensemble de ses cellules continueront à vivre et à réagir. (Si on l'entretient avec un afflux sanguin, par exemple). Est-ce que je dois mettre une sentience dans chaque cellule ? Dans chaque atome ? Dans chaque gluon ?...

Mais la conscience, la sentience, la sensibilité sont étroitement liées à l'individualité.. Pour être un individu, il faut avoir un système de traitement d'informations centralisé, il faut une "localisation de l'individu", un centre qui récupère toutes les informations collectées de l'extérieur. Le cerveau, ou un centre nerveux.

Sans ça, on peut poser "la conscience" absolument n'importe où. Et la conscience n'est alors plus liée à rien de biologique, pas même à la sensibilité. On peut mettre mille consciences dans une pierre, et ces consciences passeront leur existence dans un grand vide noir et silencieux dénué du moindre stimuli et du moindre souvenir... Ce qui n'a pas grand sens. Et la question éthique ne se poserait alors même pas puisque rien de ce qu'on pourrait faire subir à cette pierre n'aurait de conséquence pour ces consciences... Elles resteraient dans leur grand vide noir et silencieux, quoi qu'il arrive. Les localiser dans une pierre ou dans quoi que ce soit n'apporterait absolument rien : Elles n'auraient jamais aucune interaction avec quoi que ce soit. Leur "localisation" ne serait que virtuelle.

Les plantes ne collectent pas les informations, elles ne les centralisent pas, elles n'ont pas de système de traitement de ces informations. Les plantes n'ont même pas de forme définie, elles fonctionnent par fractales, survivent en se séparant d'une partie de leur corps (à moins que les graines aient une individualité propre ?). Et surtout, elles se bouturent. Il y a autant d'individualités hypothétiques qu'il y a de morceaux susceptibles d'être bouturés...
Et bien sûr, rien dans le métabolisme des plantes ne nécessite de traitement d'information centralisé, de sensibilité, de sentience... Ça n'est tout simplement pas leur mode de fonctionnement, ça n'est pas quelque chose qui augmenterait leurs atouts pour survivre, se reproduire, se multiplier.
Pas d'individualité, pas de système de traitement d'informations centralisé complexe => pas de sentience.
 
Synae":18yt4orc a dit:
S'il existait une souffrance dont aucune conscience n'aurait, justement, conscience, ce serait une souffrance dans le vide, une souffrance sans personne pour la recevoir, pour la vivre, qui n'aurait d'importance pour personne... :hein:

Mais comme le dit Karouba, fait en fonction de tes sentiments. Je n'essaie pas de te détourner de tes intuitions, j'explique juste pourquoi il m'est impossible de les partager.

Merci pour ta réponse Synae mais dis-moi, de quelles intuitions parles-tu ?
Je n'ai, me semble-t-il, aucune intuition, je m'interroge, et n'avance aucune conclusion. Désolé si j'ai pu laisser penser le contraire.

Pour résumé, la question était en fait la suivante : les plantes et les petits/micro-organismes sont-elles/ils sensibles ?
Il a été démontré scientifiquement que les plantes sont sensibles/réceptives à des stimuli, comme les arbres d'ailleurs (on peut même le mesurer mais me demandez pas comment, je ne sais plus). A partir de là, peut-on s'interroger sur leur sensibilité ou leur sentience ?
Vous avez tous apporté plusieurs éléments de réflexion, c'est une bonne chose et je vous en remercie, ça me permet de développer ma propre compréhension.

Après, il est vrai que je ne crois guère en aucune vérité absolue. Je m'efforce de procéder par tâtonnements, en évitant de partir de tout a priori. La science apporte en effet des éléments de réponse sur la sensibilité des animaux comparée à celle des végétaux.

Pour ma part, je ne cherche pas à prouver quoi que ce soit et certainement pas que la souffrance des végétaux serait comparable à celle des animaux, ne serait-ce qu'en raison de la complexité de l'organisme de ces derniers. Je cherche juste à savoir s'il est possible de fixer une frontière de la sentience ou de la sensibilité. La question est en définitive épistémique. Il ne s'agit pas pour moi de savoir s'il faut éviter de consommer des légumes, tubercules etc... Je sais déjà que la souffrance animale est manifestement bien plus considérable que celle des végétaux sinon je ne serais pas végétalien.

Vous me suivez ?

Si j'admettais avoir une conviction, intuition (?), ce serait sans doute que tout souffre, d'une manière ou d'une autre, en ce monde. La science va plutôt dans mon sens (cf. mesure de la réactivité/sensitivité des végétaux) même s'il existe très clairement une gradation dans la souffrance. Cela ne me semble pas franchement mystique mais c'est comme vous voudrez, après tout, ce n'est pas une insulte.
Merci encore pour vos réponses enrichissantes.

Ah, j'oubliais, l'empathie, que l'on a tous en commun (en théorie), je suis en accord parfait avec cette idée. L'empathie est pour moi connaissance, du moins expérience.
 
Picatau":2p1z8atx a dit:
Merci pour ta réponse Synae mais dis-moi, de quelles intuitions parles-tu ?
Je n'ai, me semble-t-il, aucune intuition, je m'interroge, et n'avance aucune conclusion. Désolé si j'ai pu laisser penser le contraire.

J'avais eu cette impression à cause de ce que tu as affirmé au début :

Picatau":2p1z8atx a dit:
Une plante est-elle sentiente (je dirais a priori que oui)

Et tu le confirmes avec ton idée que "tout souffre". Mais "souffrir" et "réagir à un stimuli" me semblent extrêmement différents. Pour moi, l'un implique une subjectivité, une conscience, et pas l'autre. Il n'y a pas d'enjeu moral dans une simple réaction chimique en dehors de toute conscience.

Pour moi la frontière de la sentience se pose à l'intérieur même du règne animal, comme le dit David Olivier à la fin du lien fourni précédemment. Pour les insectes par exemple. En ce qui concerne les insectes, j'ai l'intuition qu'ils sont sentients lorsque je les regarde se mouvoir et interagir, mais la science, pour l'instant, n'apporte pas vraiment d'éléments confirmant cette intuition à ma connaissance.

Yola":2p1z8atx a dit:
( Synae je m'en vais lire tes articles qui sont sur ton blog, surtout les articles sur Jacques Derrida qui m'on l'aire vraiment intéressant. :) )

Bonne lecture alors, Yola, même si je doute en permanence de la pertinence de ce que j'arrive à comprendre de Derrida et qu'il ne faut donc pas prendre pour argent comptant ce que j'écris, mais ce n'est pas à un végé que je vais apprendre l'esprit critique de toute façon... ;)
 
Merci Pers0nne, c'est passionnant. Quelques remarques et questions.

Pers0nne":2s0hfmr9 a dit:
J'ajoute que : Le sentience, la conscience + la sensibilité, personne n'est capable de la définir ni de donner la preuve de son existence. Je sais simplement que MOI, j'existe et je ressens. Si vous existez et ressentez, je ne peux pas vous prouver que j'existe et ressens. Et réciproquement, vous ne pouvez pas me le prouver non plus. Et ma conscience, ma sensibilité, je ne suis même pas capable d'en expliquer la cause ni de la décomposer pour en comprendre le principe. Je peux juste vaguement y réfléchir sans pouvoir y poser des termes concrets compréhensible (voir les qualias) Je sais que je suis, c'est tout. C'est une connaissance arbitraire, un postulat de base pour tout le reste de mes raisonnements. Mais vu que vous avez des comportements très similaires aux miens et que je comprends votre langage et les concepts que vous êtes censés me transmettre, j'en déduis que vous avez la même existence mentale que moi.

Bien mais il m'arrive de douter de mon existence. Suis-je le seul ? Quant à autrui, en effet, je le projette à partir de "moi", de ce que je connais.

Vu que beaucoup d'animaux ont également des comportements très similaires, dans l'expression de leurs réactions et de leurs souffrances, j'en déduis également qu'ils ont une forme d'existence mentale, de ressenti.
Mais à aucun moment je ne suis capable de le démontrer.
La science semble prouver et décortiquer les principes de raisonnement, l'élaboration des pensées et des ressentis, par l'étude du système nerveux et du cerveau. Mais malgré tout, si nos pensées et ressentis dépendent bien de la matière, ça donne toujours pas une explication absolue parfaitement compréhensible.

Je te suis sur ce point, c'est très clair.


Un système logique qui analyse des données et actionne les membres et les mécanismes d'un ensemble de moteur pour se préserver n'a aucune raison d'être doté d'une existence mentale. Le tout n'est qu'un ensemble d'échanges électriques, de calculs binaires (ajouts ou suppressions des flux). Ça explique la complexité des traitements et des réactions, mais peu importe la complexité de la chose, ça ne justifie toujours pas "l'existence mentale" (voir La chambre Chinoise).

J'ai pas tout compris à la chambre chinoise mais il faudra que je relise plus lentement.

Malheureusement, même en postulant que la conscience, la sensibilité, la sentience, ont une nature immatérielle, ça ne résout pas non plus le problème : Ça n'explique rien. La matière, la biologie ont bel et bien une incidence sur mes capacités de réflexions, sur ma mémoire, sur ma personnalité, sur ma perception. Postuler l'immatériel ne fait que déplacer le problème, puisqu'on suppose un autre domaine dimensionnel, alors que ce qui caractérise mon existence, c'est d'être unique, insécable, ponctuelle, et distincte de tout.

Entièrement d'accord sauf sur l'idée que "je" suis insécable et distinct de tout, même si je l'expérimente ainsi, en ce sens que mes atomes trouvent leur origine dans les composants même de l'univers primordial entre autre. L'impression d'un moi séparé me semble une élaboration, un système défensif, de la personnalité. Je ne développerai pas, ça nous écarterait trop du sujet.

De toute façon, étudier la conscience, la nature de la conscience/sentience, sa cause est voué à l'échec, simplement par le fait que c'est un cercle vicieux. Un cerveau qui s'étudie soi-même. On peut étudier ce qu'on peut observer qui est extérieur à soi, on peut étudier un système fini, on peut étudier une chose plus petite que soi. On ne peut pas étudier ce qui nous englobe, ce qui nous produit ou ce qui nous détermine. La logique ne peut pas prouver elle-même que la logique est toujours vraie. On ne peut pas définir le terme "être". On ne peut pas définir le terme "vérité". On ne peut pas définir "je". On ne peut pas étudier "la conscience", parce que pour étudier la conscience on fait appel à la conscience. Du moins, on peut l'étudier éternellement, par approximations scientifiques probabilistes, mais pas l'expliquer de manière absolue.

Oui, cela reste du domaine de l'expérience personnelle et justement, à ce sujet, il m'est arrivé d'avoir l'impression de m'observer comme une tierce personne. Je ne détaille pas, vous diriez que je consomme je ne sais quoi... C'est une histoire de présence à soi-même dirais-je.

"j'existe" est un postulat pour toute réflexion, c'est ce qui permet de définir le mot "être", c'est ce qui permet tout le reste. Et donc en tant que postulat de base, "j'existe" n'est pas décomposable, démontrable, explicable. L'impossibilité de cette explication est tout simplement logique.

Et "je n'existe pas" ou mieux "je ne suis pas" ou "je ne suis pas vraiment", comment le prendre en compte ? Les philosophies orientales sont à l'opposé de "je pense donc je suis", ce serait plutôt "je pense donc je ne suis pas vraiment".

Donc, je pose que les autres existent, ont une conscience, une sensibilité, une sentience, par analogie avec ma propre existence. Et visiblement le système nerveux n'y est pas pour rien. Puisque visiblement, la capacité de traitement d'informations joue un rôle dans l'élaboration de la pensée, et dans la conscience. Et les plantes n'ont pas de capacité de traitement de l'information. Elles ont des réflexes, des réactions chimiques, tout comme mon système immunitaire a des réactions chimiques, ou comme un membre séparé de mon corps peut encore rester en vie et réagir à certains stimuli extérieurs. Séparé de mon corps, l'ensemble de ses cellules continueront à vivre et à réagir. (Si on l'entretient avec un afflux sanguin, par exemple). Est-ce que je dois mettre une sentience dans chaque cellule ? Dans chaque atome ? Dans chaque gluon ?...

En effet, tout ça me semble plutôt logique. Cela fait-il néanmoins de la plante l'équivalent d'un "robot" ou "automate "?

Mais la conscience, la sentience, la sensibilité sont étroitement liées à l'individualité.. Pour être un individu, il faut avoir un système de traitement d'informations centralisé, il faut une "localisation de l'individu", un centre qui récupère toutes les informations collectées de l'extérieur. Le cerveau, ou un centre nerveux.

Sans ça, on peut poser "la conscience" absolument n'importe où. Et la conscience n'est alors plus liée à rien de biologique, pas même à la sensibilité. On peut mettre mille consciences dans une pierre, et ces consciences passeront leur existence dans un grand vide noir et silencieux dénué du moindre stimuli et du moindre souvenir... Ce qui n'a pas grand sens. Et la question éthique ne se poserait alors même pas puisque rien de ce qu'on pourrait faire subir à cette pierre n'aurait de conséquence pour ces consciences... Elles resteraient dans leur grand vide noir et silencieux, quoi qu'il arrive. Les localiser dans une pierre ou dans quoi que ce soit n'apporterait absolument rien : Elles n'auraient jamais aucune interaction avec quoi que ce soit. Leur "localisation" ne serait que virtuelle.

Toutes les civilisations ne situaient pas la conscience au même endroit, parfois dans le coeur, parfois dans le foie... mais elles n'avaient néanmoins pas toutes les données scientifiques d'aujourd'hui.
En guise de clin d'oeil, une poète paysanne limousine décédée il y a 15 ans à peu près a écrit un magnifique poème qui s'appelle le sang des pierres où elle parle de la souffrance des pierres mais on entre alors sans doute dans un vécu quasi mystique, je vous l'accorde.

Les plantes ne collectent pas les informations, elles ne les centralisent pas, elles n'ont pas de système de traitement de ces informations. Les plantes n'ont même pas de forme définie, elles fonctionnent par fractales, survivent en se séparant d'une partie de leur corps (à moins que les graines aient une individualité propre ?). Et surtout, elles se bouturent. Il y a autant d'individualités hypothétiques qu'il y a de morceaux susceptibles d'être bouturés...
Et bien sûr, rien dans le métabolisme des plantes ne nécessite de traitement d'information centralisé, de sensibilité, de sentience... Ça n'est tout simplement pas leur mode de fonctionnement, ça n'est pas quelque chose qui augmenterait leurs atouts pour survivre, se reproduire, se multiplier.
Pas d'individualité, pas de système de traitement d'informations centralisé complexe => pas de sentience.

Oui, une autre forme de vie en somme, peut-être aussi une autre forme de sensibilité ?

Je comprends bien tout ce que tu dis, c'est passionnant et, ce qui ne gâche rien, soulève de nombreuses autres interrogations.

Synae":2s0hfmr9 a dit:
J'avais eu cette impression à cause de ce que tu as affirmé au début :

Picatau":2s0hfmr9 a dit:
Une plante est-elle sentiente (je dirais a priori que oui)

Excellent, je suis pris en flagrant délit d'a priori ! Merci de me mettre face à mes contradictions.

Et tu le confirmes avec ton idée que "tout souffre". Mais "souffrir" et "réagir à un stimuli" me semblent extrêmement différents. Pour moi, l'un implique une subjectivité, une conscience, et pas l'autre. Il n'y a pas d'enjeu moral dans une simple réaction chimique en dehors de toute conscience.

La souffrance, une grande question. Sentir, n'est-ce pas souffrir ?
 
Picatau":2a786jm3 a dit:
La souffrance, une grande question. Sentir, n'est-ce pas souffrir ?

Sentir permet certainement de souffrir. Mais ici la question me semble plutôt être : réagir implique-t-il de sentir ? Auquel cas chaque molécule de l'univers pouvant interagir avec une autre molécule serait sensible.

Sinon je suis tellement d'accord avec ça :

Pers0nne":2a786jm3 a dit:
ce qui caractérise mon existence, c'est d'être unique, insécable, ponctuelle, et distincte de tout

... que j'ai beaucoup de mal à comprendre comment tu peux penser ça, Picatau :

Picatau":2a786jm3 a dit:
Entièrement d'accord sauf sur l'idée que "je" suis insécable et distinct de tout, même si je l'expérimente ainsi, en ce sens que mes atomes trouvent leur origine dans les composants même de l'univers primordial entre autre. L'impression d'un moi séparé me semble une élaboration, un système défensif, de la personnalité.

J'ai déjà essayé de réfléchir à la remise en question de l'identité personnelle à cause de David Olivier mais je n'ai vraiment pas réussi à trouver ses démonstrations sur le sujet convaincantes...

Pour moi, mon identité personnelle consiste en ce que je suis un unique flux d'énergie consciente ininterrompu. Comme une décharge d'énergie consciente dans l'univers, une étincelle unique et éphémère. Chaque étincelle a sa propre émergence, son propre parcours et sa propre extinction, quand bien même elle serait faite de la même matière que toutes les autres étincelles. Le pire des comas ne l'interrompt pas totalement, seule la mort cérébrale l'interrompt de manière absolument irréversible. Que des flux de conscience continuent ailleurs ne me concerne absolument pas puisqu'il aura suffi d'une interruption totale pour que le mien s'éteigne et ait disparu à jamais.
 
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