Prix de la remarque conformiste

  • Auteur de la discussion Anonymous
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Cet ete j'ai eu droit deux, trois fois a des "tu vas peut-être bien finir par te marier, quand mm" (par ma soeur a 2 doigts du divorce. c'est sûr que le mariage qd on va chez elle, ca fait trop envie...) ou "je te souhaite d'avoir une femme et des enfants".

Et je passe sur les recurrents "t'es homo, non? Je t'ai jamais vu avec une fille." non les gens, c'est si on m'avait vu avec un mec qu'on peut déduire que je suis homo... <br /:><:br /> — Le 21 Sep 2014, 00:57, fusion automatique du message précédent — <br /:><:br /> Et aussi : tu peux pas manger de la viande, comme tout le monde ?
 
Alors il y a les généralités indémodables :

"Faut un peu de tout dans la vie."
"L'essentiel c'est d'être modéré."
"Tous les extrêmes sont mauvais."
"La colère ne résoud rien".
"Laissons tomber nos différences et aimons-nous les uns les autres."


Et puis des plus spécifiques :

"l'important c'est de bien choisir sa viande"
"Y en a plus que pour les [Arabes, Noirs, gays, jeunes, vieux, meufs, handicapé-es]. Moi mon grand-père il était dans la Résistance, tout le monde l'oublie ?"
"Du travail, y en a quand on cherche."
"Tu as vu cette mère ? Pas étonnant que son mari l'ait quitté et que son enfant soit comme ça."
 
Aujourd'hui, cela n'a pas été une remarque, mais une attitude conformiste qui m'a fortement agacée. Dans ma formation, nous travaillons sur des projets en groupe. Il fallait découper une forme dans une plaque de dibon avec une scie sauteuse. Une partie de mes collègues n'étant pas arrivée, j'ai décidé de commencer le boulot sans eux et j'ai commencé à couper, en me faisant aider par un de mes camarades. Sur ce, les deux autres arrivent. L'un d'entre eux décidant que je ne tenait pas la scie assez fermement me prends la main et me fait faire la découpe comme ça... Il me l'a tenue jusqu'à ce que je décide de lui céder la place.
C'est vrai que je n'avais jamais fait de découpe avant ma formation, et bien sûr ce que je faisais n'était pas parfait. Mais dans ce cas, je veux qu'on me le dise, pas qu'on me prenne la main comme à une enfant de cinq ans. Si j'avais été un mec, on n'aurait jamais remis en cause mes capacités à ce point, et on ne m'aurait jamais infantilisée de la sorte. Ce mec n'était pas mal intentionné, mais il n'avait pas très bien intégré que nous exercerons le même métier à la fin. Nous exécuterons tous les mêmes tâches, et ce n'est ni parce que je suis une fille, ni parce que je suis plus jeune que lui, qu'il avait le droit d'avoir ce comportement avec moi.
Cela dit, j'en ai reparlé avec lui après, et il a fait mine de comprendre, j'espère que ce sera effectivement le cas.
 
C'est une anecdote que je ressers souvent lorsque je veux illustrer que les « artistes » et les « intellectuels » sont souvent tout autant conformistes que le reste de la société, mais de façon différente.

Il y a 3 ans -- ou plutôt, il y a 6 à 3 ans de cela --, j'ai fait des études universitaires en littérature et en études culturelles. C'était au moment où la mode hipster était à son apogée (je pense). Le 3/4 de ma classe était hypster. Illes étaient tous et toues habillés-es de la même façon : pantalon serré, chemise à carreaux, coupes excentriques, grosses lunettes à monture noire et parfois un bonnet aux couleurs fluo. Illes avaient tous les mêmes idées, les mêmes lectures, les mêmes goûts et s'exprimaient tous à l'identique. Leur idole à tous était Arcade Fire et Xavier Dolan. Bien entendu, illes pensaient tous être originals-es et uniques en leur genre. Illes prétendaient tous être « anti-coformistes ».

Mais encore, le plus drôle était leur travaux scolaires : des copies identiques à ce que le-la prof disait lors des cours. Jamais une réflexion de côté à ce qui était enseigné.

Toute leur attitude était consacré au « paraitre ». Du genre : je lis tel livre pour bien montrer que je féministe, et je reproche aux autres de ne pas le faire. Comme s'il n'y avait qu'une seule et unique vision du féminisme... : la leur.

Pareil pour le végétarisme. Illes étaient végé en public, mais non en privé. Un jour, une d'elles est venue me dire qu'elle a déjà été végétarienne (quelques semaines plus tôt...), mais avait laissé tombé parce qu'elle trouvait cela « plate ». :mmm:


L'anecdote en question, donc, s'est produit lors de la troisième année d'études, le jour de la rentrée. Nous attendions devant le local de cours inscrit sur notre horaire. Le prof était en retard d'une dizaine de minutes, ce qui ne lui ressemblait pas. Soudain, on le voit arriver, un air d'incompréhension sur le visage. Ils nous dit qu'ils nous attendaient à un autre local, à un autre étage. Nous nous y rendons, en groupe. Une fois sur place, le prof est incapable d'ouvrir la porte. Sa clé n'est pas la bonne. Il contacte une dame de l'administration, qui lui dit qu'il y a une erreur sur son horaire, et que notre cours se déroule effectivement au tout premier où nous nous trouvions. Nous retournons donc au premier local, toujours en groupe.

Et là, j'entends plein de voix dans le groupe. Des hipsters se parle entre eux, et se disent des choses du genre : « beurk! Nous marchons comme un troupeau de moutons. Comme des conformistes! ».

Je me souviens m'être dit : WTF? Marcher en compagnie des gens de ta classe en direction d'un local ne te rendra pas conformiste ou quoi que ce soit d'autre. À quel point faut-il être incertain de son anticonformisme pour craindre de marcher en compagnie d'autres gens?

:facepalm:

Mais le plus drôle dans toute cette histoire, c'est qu'aucun d'eux ne voulait me parler, parce qu'ils me trouvaient trop « bizarre ». C'est sûr, je n'ai ni tatouage ni fringue excentrique neuve achetée à haut prix parce que je venais d'un milieu très défavorisée. Ma coupe de cheveux était banale, et je ne me suis jamais soucié du « qu'en dira-t-on ». Pire : j'aimais vraiment la lecture. Eux, illes lisaient pour critiquer et affirmer à la face du monde qu'ils détestaient l'auteur-e qu'illes venaient de lire pour X ou X raisons. Pas moi. Je faisais confiance à mes profs pour me donner de bonnes suggestions. J'étais modeste, et je préférais me faire une opinion par moi-même tout en prenant en compte les avis de ceux qui m'avaient précédés. Je ne décidais pas de haïr ou d'aimer une oeuvre avant même de l'avoir lu. Un comble pour ces gens. Du coup, j'étais aussi isolée durant ces études universitaires que je l'avais été au primaire, au secondaire et au Cégep.... la joie! :(

Savez-vous quoi? Ma « bizarrerie » m'a toujours faite souffrir. Depuis la plus tendre enfance. J'ai toujours été cette fille bizarre à qui personne ne veut jamais parler, que personne ne prend au sérieux, même à 26 ans. Pourtant, je n'ai jamais recherché cette excentricitée. JAMAIS. J'ai souvent rêvé d'être comme tout le monde afin de ne plus souffrir. Mais j'ai toujours trouvé le prix à payer trop élevé : celui de ne plus être moi-même. Je ne pense pas avoir un égo démesuré, mais je refuse de renier qui je suis. Je n'ai pas de tatouage ni de vêtements bizarre ; j'aime la lecture et le métal sympho démodé ; je suis végane, féministe, pansexuelle ; d'abord involontaire puis devenu volontairement pauvre. Je n'ai pas de permis de conduire (un comble en Amérique). Pas de téléviseur. Je suis par moment athée, par moment agnostique, par moment une païenne qui ne crois pas aux archétypes genrées, mais je travaille dans un couvent catholique. Je suis excessivement timide et bègue. Je ne me maquille pas, ne m'épile pas, ne me coiffe pas et j'ai l'air 12 ans plus jeune que mon âge. J'ai un air faussement naïf qui cache une réflexion constante sur le monde. Tout cela fait partie de moi, et je ne le sacrifierais pour rien au monde. Mais tout cela a toujours repoussé les gens. :(
Je ne me plains pas cela dit. J'ai un merveilleux conjoint et de proches amies. Je suis heureuse, maintenant. Mais, à l'époque, j'étais seule. Je n'avais qu'une amie à l'université, et je la connaissais depuis la première semaine du Cégep. Elle aussi, elle était un peu comme moi, quoique très différente en même temps.

Waouh, je sens que je défoule. :red: Ça fait du bien.

C'est que j'en ai un peu marre d'observer autour de moi des gens qui se prétendent anti-conformiste alors qu'ils ne font que suivre un schéma bien défini par leur tribu sociale. J'ai remarqué qu'une vraie personne anti-conformiste ne s'en vantera pas. Souvent, elle ignore que tel comportement ou telle idée l'est. Lorsqu'elle en a conscience, elle peut en souffrir ou l'accepter pour son propre bonheur. Peu importe l'image sociale que cela dégage. ;)
 
Tu as été forte de passer par toutes ces années, Mascha. Je compatis.

Les conformistes de la fac, je crois que je m'en fais une bonne idée, et c'est vrai qu'ils sont graves. ^^" C'est un gros paradoxe qu'un milieu fait pour développer une réflexion personnelle attire autant de gens comme ça. Et en même temps ça ne m'étonne pas, c'est un peu pareil partout : on va faire du sport pour se défouler, pour créer un lien plus fort avec son propre corps, certes, mais aussi beaucoup pour montrer qu'on en fait, qu'on prend soin de soi, qu'on est pas un traîne-savate qui ruine sa santé (ouh, pas bien)(je trouve intéressant de constater comment, aujourd'hui encore, on tend à juger les gens via une application assez linéaire, assez mot-à-mot, des 7 péchés capitaux). On va à la campagne, soi-disant pour l'amour des grands espaces, mais aussi parce qu'il faut montrer qu'on ne se satisfait pas de l'air pollué des villes - surtout si on a des enfants. Quand on réserve des places de concert, on prend soin d'y incorporer du classique même si on n'y pige pas grand-chose, qu'on sait qu'on passera probablement un moment moyen, et qu'on en sortira sans être beaucoup plus éclairé-e.

Dans Little Miss Sunshine, à la fin, il y a deux personnages qui discutent du fait que la vie nous est présentée comme un grand concours de beauté. Ici c'est comme si l'intitulé était "prix du/de la citoyenne éduquée qui aime les choses saines et variées et peut montrer à tout le monde comment s'y prendre".

(Vous avez vu comment je finis ma dissertation sur une référence originale, admirez-moi, ma façon de penser est unique ^^)
 
Nan mais, y a aussi des différences, hein... j'aime les vêtements qui sortent de l'ordinaire (ça doit être pour ça que j'aime faire les miens :D). Plutôt dans le parcours "impression d'être seule au monde parce que trop bizarre pour les autres". ;)
 
Clawa":wv13ydka a dit:
Tu as été forte de passer par toutes ces années, Mascha. Je compatis.

Merci. :kiss:
Peu de gens s'en doutent en me voyant, mais je suis une grande entêtée lorsqu'il s'agit de rester moi-même. C'est non-négociable. Je présume qu'effectivement, ça demande du courage. Mais, heureusement, je ne suis pas la seule! Juste pour être végéta*ien, il faut de cette force de caractère pour tenir le coup face aux autres! ;)
C'est cette même force que je mets dans chacune de mes convictions. C'est aussi simple que cela. ^^
Je présume qu'il y a beaucoup de personnes comme cela sur ce forum. Sinon, je n'aurais jamais osé me confier.

Tout ce que tu dis est bien vrai à propos de ces paradoxes. Lorsqu'on prend le temps d'observer les gens, ça saute aux yeux! :facepalm:
Je n'avais jamais remarqué pour la campagne, mais maintenant que tu en parles... j'en ai vu des gens comme cela!

J'imagine que c'est d'une part, l'égo qui demande à être satisfait, et, d'autre part, le désir d'appartenance qui se manisfeste. Si je trouve souvent l'égocentrisme mauvais, le désir d'appartenance, lui, je le trouve très sain, mais à l'unique condition qu'il ne gomme pas la personnalité de la personne en question. Au contraire, pour moi, un groupe doit servir à l'épanouissement de l'individu, et non à son enchaînement. Un peu comme la communauté végé m'a beaucoup aidé à progresser.

:zen:

(je fais mon maître Zen)

Nan mais, y a aussi des différences, hein... j'aime les vêtements qui sortent de l'ordinaire (ça doit être pour ça que j'aime faire les miens
:D ). Plutôt dans le parcours "impression d'être seule au monde parce que trop bizarre pour les autres".
;)

Je m'en doute bien, hi hi! Non mais, il ne faut pas se méprendre : J'ADORE les vêtements qui sortent des sentiers battus J'ai juste été trop pauvre les 26 premières années de ma vie pour pouvoir me constituer un vrai look. :red:
Ç'a changé depuis peu. Je fréquente les friperies un peu plus souvent depuis que j'ai un emploi qui a de l'allure!
 
Mascha":2v70slzl a dit:
J'ai souvent rêvé d'être comme tout le monde afin de ne plus souffrir. Mais j'ai toujours trouvé le prix à payer trop élevé : celui de ne plus être moi-même.
J'ai souvent ressenti ça aussi. :kiss:
 
Un message dans un autre sujet me rappelle une anecdote en cours de nutrition : la prof nous donne pour exercice de faire des menus pour une journée équilibrée, avec un petit-déjeuner, un déjeuner, un dîner, en nous basant sur nos habitudes. Un élève lui fait remarquer que ses repas ne rentrent pas dans les trois cases... "ah mais pour l'exercice, essayez quand même, de toute façon ce n'est pas bon de multiplier les prises alimentaires" :facepalm: . En fait, je crois qu'elle avait peur de devoir vérifier le résultat si le format ne correspondait pas à son schéma de référence (la référence, évidemment, c'était le PNNS).
Heureusement, quand est venu le moment de la correction, le gars n'avait pas cédé, et il a présenté son menu avec "petit-déjeuner, déjeuner, 1er dîner, 2nd dîner" :whistle:
 
Mascha : ah mais t'as tenu dans cette fac combien d'années ? :mmm:
Sinon j'ai pas compris ce que tu voulais dire par "volontairement pauvre"
 
SuperBulle":21mzpvcy a dit:
Mascha : ah mais t'as tenu dans cette fac combien d'années ? :mmm:
Sinon j'ai pas compris ce que tu voulais dire par "volontairement pauvre"

Trois ans. Et c'est partout pareil (toutes les universités québécoises ont le même niveau et le même type d'étudiant, nommé «clientèle»), alors aller dans une autre n'y aurait rien changé. ;)
Mais les profs étaient géniaux, eux.

C'est vrai que j'ai été peu précise. Je voulais dire que je vis de la simplicité volontaire. Avec le moins de matériel superflu possible. Par exemple, tous mes vêtements sont de seconde main, et je n'ai pas de téléphone portable ni de permis de conduire. ;)
 
J'en ai une bonne :D . De ma soeur, ce week end :
(elle)-...quand tu bois chez toi.
(moi)-Je bois pas chez moi, je ne bois presque jamais d'alcool.
-Quoi ? Mais ta vie doit être triste !
-Bah non j'ai juste pas besoin de boire de l'alcool pour être bien. On peut s'amuser sans, je vois pas en quoi c'est indispensable.
<br /:><:br /> — Le 14 Oct 2014, 23:21, fusion automatique du message précédent — <br /:><:br /> Si pour elle l'alcool est sa joie de vivre, moi c'est le rire. ça va plus vite, et mon but devient mon moyen par la même occasion.

(faut que je m'arrête :whistle: )
 
Ahah, ce genre de réflexion je l'ai eu trouzmillions de fois.

"Tu ne bois pas ?", "Tu ne sors pas en boîte ?"
-> "Tu ne sais pas profiter de la vie."

...

JE ne sais pas profiter de la vie ? Mécréant !
Non en fait je ne répondais pas, je ne voyais pas de dialogue possible et je ne me sentais absolument pas obligé de me justifier ou de me défendre.


Sinon plus récemment, je me suis fait tomber dessus par tout le bureau parce qu'ils ont découvert que je n'avais pas de smartphone mais simplement un vieux portable.

"Omagad, mais tu n'as pas de smartphone ? Pour un ingé informatique ça le fait pas."
"Non j'ai pas de smartphone et je vis très bien sans. Je programme sur mon ordinateur et il y a une pile de smartphones dans le tiroir pour faire des tests alors lâche moi la grappe !"


C'est là que je me rends compte mine de rien qu'il y a une certaine pression sociale par rapport à cet objet.
 
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