Pers0nne
Pers0nne":3uuan8cb a dit:
Si la même chose était imposée par une espèce supérieurement intelligente, pour le bien du monde, on se sentirait sans doute obligés de fermer nos gueules.
Je ne suis pas sûre que nous "fermerions nos gueules" face à une espèce supérieurement intelligente. Soit elle nous explique et nous comprenons, auquel cas nous ne sommes pas moins intelligents mais peut-être juste plus lents, et on ne la "fermerait" pas, on serait juste d'accord ; soit elle nous explique et nous ne parvenons vraiment pas à comprendre pourquoi c'est mieux, auquel cas nous nous révolterions car sa dictature nous paraîtrait injuste. En effet quelle preuve aurions-nous qu'elle est vraiment plus intelligente que nous si nous ne comprenons pas pourquoi ? D'ailleurs, un animal qui se fait stériliser se révolterait s'il le pouvait, parce qu'il ne comprend pas le pourquoi de la chose, tout comme nous nous révolterions face à la dictature d'une autre espèce, ne comprenant pas ses raisons. Peut-être que dans l'absolu elle aurait raison et agirait pour notre bien, mais n'ayant pas la capacité de le comprendre, nous continuerions de nous révolter comme des idiots, comme des lapins qu'on attrape pour les mettre sur une table d'opération afin de leur sauver la vie, et qui ne peuvent même pas ensuite nous remercier de l'avoir fait (là par contre je pense que nous aurions suffisamment de capacité de réflexion pour nous dire avec du recul que l'espèce supérieure avait raison
ce coup-ci... Mais aura-t-elle encore raison la fois d'après ?). Bref tout ça c'est de la science-fiction.
Franchement si des E.T. débarquent et déclarent qu'il faut couper les jambes à tous les humains parce que c'est mieux et qu'ils savent mieux que nous, c'est clair que je vais pas fermer ma gueule tant que je comprends pas pourquoi c'est mieux exactement. La stérilisation des humains c'est pareil.
Mais sinon tu as raison, c'est toujours plus durable d'expliquer, d'éduquer, que d'imposer et de se retrouver avec une révolte sur les bras.
(Parce que si les humains sont "censés pouvoir faire un choix raisonnable", manifestement, ce choix raisonnable, ils ne le font pas... Donc on pourrait être en droit de douter de leur capacité ... Mais en le faisant, on se place alors arbitrairement dans une position d'être supérieur, ce qui est fort dangereux.)
Fort dangereux en effet, et surtout complètement infondé. On fait les choix que l'on peut faire en fonction de ce que l'on nous a appris, de la vision du monde qu'on nous a inculquée. Je pense qu'aucun humain "normalement constitué" n'est intrinsèquement incapable de faire un choix raisonnable.
A cela s'ajoute bien sûr le niveau de frustration de ne pas avoir de petits pour chaque espèce, qui reste difficile à évaluer. (On suppose qu'il y a moins de frustration/déprime pour ce genre de choses chez les autres animaux. Comment en être sûr ?)
Il y a une frustration sexuelle, physique, et la stérilisation vise justement à la soulager.
Mais tu parles d'une frustration sentimentale, celle de ne pas avoir d'enfant. Or, sans toute notre histoire culturelle concernant la sacro-sainte famille, la fierté de léguer son nom, ses biens, ses valeurs, la soi-disant beauté des naissances, le soi-disant plaisir d'avoir un bébé, bref sans toute cette pression culturelle, un humain lui-même aurait-il forcément envie de faire des
enfants ? (Envie de relations charnelles oui, mais d'enfant en soi... c'est moins sûr, non ?) Existerait-il un "besoin" d'enfant en dehors de tout impératif culturel ? A mon avis, non. Comment l'animal pourrait-il s'imaginer un "moi" hypothétique qui aurait des "enfants", notion parfaitement abstraite puisque ne s'appliquant à aucun individu existant ? Sans compter qu'un animal qui déprime, c'est, par exemple, un animal qui ne mange pas bien, or je n'ai pas l'impression que les animaux stérilisés soient plus malheureux ou prennent moins de plaisir à manger que les autres (même si je sais qu'ils sont plus gros pour des raisons simplement hormonales). Après si on se met à parler d'une hypothétique déprime sans aucun symptôme physique connu alors là... On ne peut en effet plus être sûr de rien. Mais je ne trouve pas ça assez pertinent pour continuer de priver de foyer tous les animaux actuels qui en manquent, en continuant de faire se reproduire les autres.
Tant qu'aucune donnée ne m'indique que les plantes souffrent, je continue d'en manger. Tant qu'aucune donnée ne m'indique que les animaux de compagnie sont tristes de ne pas avoir d'enfant, je continue d'être en faveur de la stérilisation. Sinon on rentre dans des croyances immatérielles et sans fondement argumentatif, ce qui n'est pas mon genre en tout cas.
Un très bon article sur la stérilisation des lapins mais dont certains arguments peuvent s'appliquer aux autres espèces :
http://www.margueritecie.com/sterilisation.php
La stérilisation rend le lapin malheureux. C'est FAUX. Elle contribue au contraire à son bien-être psychologique, après cette intervention le lapin est détendu et peut enfin se consacrer à autre chose qu'à grimper sur tout ce qui bouge, il profite de la vie ! Le lapin vivant en intérieur n'est pas soumis au stress (climatique ou alimentaire) qui limite naturellement le comportement sexuel du lapin sauvage. Il est soumis toute l'année à ses hormones ce qui peut rendre sa vie infernale. Même si ses danses amoureuses peuvent vous sembler mignonnes ou rigolotes, même si ses débordements d'affection vous attendrissent, il ne faut pas oublier que derrière ce comportement se cache un mal-être. La période de reproduction n'est pas une partie de plaisir pour un lapin sauvage qui a pourtant tout ce qu'il faut pour assouvir ses instincts, elle devient pénible et stressante pour un lapin de compagnie qui ne peut pas les assouvir. La stérilisation est vraiment la meilleure alternative pour le bien-être psychologique du lapin, mâle ou femelle.
Par ailleurs, pour certaines espèces modifiées (lapin nain notamment), la non-stérilisation en soi peut constituer un risque vital (
source /!\ avec photos d'opération) : "L'adénocarcinome utérin est très fréquent chez la lapine non stérilisée. Le risque s'élève à 80% chez les lapines de plus de 5 ans." A savoir...
Maintenant, il est clair que stériliser ses animaux de compagnie est une bonne chose, qui est nécessaire.
Mais dans l'absolu, de manière toute théorique et difficilement applicable (et comme je l'ai dit, "révoltante"), limiter les naissances humaines pourrait l'être aussi.
Et je ne dis pas le contraire. Je dis simplement que la seule manière "non-révoltante" de le faire, c'est par l'éducation, l'information. Et parfois ça ne marche pas. Mais au moins après avoir essayé on peut continuer de se regarder dans un miroir.
Xav
Xav":3uuan8cb a dit:
1. Les animaux humains ont tellement transformé la "nature" qu'il est quasiment impossible aujourd'hui de se référer à un état de nature initial, et de légitimer quoi que ce soit par celui-ci.
2. Le critère de jugement que l'on peut adopter est celui de la souffrance. Epargne-t-on une souffrance à un animal (ou à une espèce) en ayant recours à une stérilisation (ou une campagne de stérilisation) compte tenu des conditions dans lesquelles il vit? Il faut donc voir au cas par cas en prenant en compte les conditions locales (urbain/rural, surpopulation, conditions de vie et de survie, possibilité d'épanouissement de l'animal dans le cadre de la domesticité). Il nous faudrait bien sûr comprendre le point de vue de l'animal. Mais les sciences cognitives sont embryonnaires ne serait-ce que pour les humains. Je ne parle même pas de l'éthologie (et de ses ramifications actuelles).
Par rapport au 2., pour les animaux de compagnie, la question serait vite tranchée. C'est évidemment douloureux d'enfanter. C'est même douloureux d’allaiter. Et c'est fatiguant de faire la toilette de la progéniture, etc. Mais c'est aussi une douleur pour tous les animaux qui ne seront pas adoptés à cause de cette nouvelle progéniture. C'est aussi éventuellement douloureux pour la progéniture qui ne sera pas forcément bien soignée. En échange de toutes ces douleurs objectives, que savons-nous de l'éventuel plaisir conceptuel qu'aurait un individu animal non-humain à "avoir des enfants" ? Absolument rien. Alors objectivement est-ce que ça vaut le coup ? Je ne crois pas.
Xav":3uuan8cb a dit:
Sur les chiens de travail
Voici un point de vue:
http://www.hebdo.ch/klaus_petrus_il_fau ... 8304_.html
A titre personnel, je rejette par principe tout ce qui relève de l'exploitation animale. C'est pourquoi je tends sérieusement vers le végétalisme/véganisme. Mais un chien d'aveugle (pour m'en tenir à cet exemple) est-il exploité? Il m'est arrivé de voir des chiens guide d'aveugle rester dans la même position 1h30 voire 3h00 d'affilée. Ca me met très mal à l'aise. Ayant discuté avec des spécialistes du dressage pour comprendre, on m'a dit plusieurs choses. Les chiens sont conditionnés par le dressage pour supporter ce genre d'épreuve (et certains types de chiens s'y prêteraient mieux que d'autres). L'association qui s'occupe du dressage organise une sorte d'enquête durant plusieurs mois permettant de s'assurer de la compatibilité entre le chien et son adoptant. Leur relation doit être de totale réciprocité. Le chien est sollicité mais en retour est pleinement intégré affectivement. Lorsque le chien n'est plus à même de "remplir ses fonctions" il poursuit sa vie chez son adoptant ou est recueilli dans les meilleures conditions par un nouvel adoptant. Je me dis plusieurs choses. Ai-je affaire à une idéologie professionnelle (celle du dresseur)? S'agit-il vraiment d'une relation de réciprocité et non d'exploitation? Je n'ai pas de réponse.
Pour les chiens d'aveugles, il n'est pas impossible que le chien soit bien conditionné et ne souffre pas de sa condition actuelle. Mais est-ce que le processus n'implique pas au départ une forme de violence, de frustration imposée (ne pas courir partout, ne pas aboyer quand il en a envie) qui devient lentement habitude ? Que le chien n'en souffre plus ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu violence avant. Après honnêtement qui irait se battre pour cette cause là à l'heure actuelle où il y a tant à faire à plus grande échelle ? C'est peut-être quelque chose qui disparaîtra un peu tout seul si les futurs propriétaires sont sensibilisés à l'antispécisme et à la prise en compte des intérêts des autres êtres vivants, en réalisant que le confort de vie que cela leur apporte ne vaut peut-être pas de brider ainsi un autre être, et en commençant alors à accepter des alternatives. Finalement cela doit être une démarche personnelle de renoncement à un confort de vie et à un plaisir, un peu comme l'omnivore renonce à son plaisir gustatif et à un peu de son confort culinaire par conviction, renoncement qu'à mon avis nous ne sommes pas en droit d'imposer. Et je pense qu'en tant que voyants nous ne sommes pas forcément en mesure de comprendre l'importance de ce renoncement. Donc sensibiliser, pousser à la réflexion, oui, interdire et culpabiliser, non...