On vit dans une société qui promeut l'alcool à tous les niveaux. Franchement, les gars et les filles, je tire mon chapeau à tous ceux et celles qui ont résisté à cette injonction
Quand aux plus jeunes qui nous lisent, sachez que l'alcool n'est en aucun cas un passge obligé, et qu'il n'y a rien de valeureux à se défoncer. On devient adulte en se responsabilisant, pas l'inverse.
Tout commence dès le baptême, où il est courant dans ma famille de faire sucer au nourrisson le bouchon d'une bouteille de champagne spécialement ouverte pour cette occasion.
Ma grand mère, infirmière de profession, me soutenait que le meilleur remède était le champagne. J'ai même eu droit à un fond de flûte lors d'une méchante fièvre...
Petits, nous avions droit à un fond de flute de champagne pour les occasions. Une de mes premières constatations de sexisme date de cette époque : mon frère avait droit à un mm du doux breuvage en plus sous prétexte qu'il est l'ainé ! Or, seulement 11 mois nous séparent, et ma soeur cadette de 3 longues années avait droit à exactement la même quantité que moi. J'en déduisais à l'époque que la vrai excuse était d'ordre sexiste.
Ceci dit, je me rattrapais en faisant les fonds de verre lors de soirées de famille arrosées.
Ado, je me disputais avec mon frère pour savoir qui aurait l'honneur d'ouvrire la bouteille.
Jeune adulte, et comme beaucoup je suppose, j'ai eu droit à quelques soirées de beuverie, où je me devais de tenir la bouteille, tout ça, pour prouver que oui, une femme sait boire autant qu'un homme ! C'est stupide, je sais... Mon record était de 11 verres d'alcool différent. Je me souviens que le lendemain, même l'eau ne passait pas
Adulte, je me suis drôlement calmée. Bon, j'apprécie réellement certains alcool, comme le champagne, le muscat, le martini, la leffe, la mort subite, la chimey... Vous noterez que j'ai des gouts de "luxe". Question d'éducation : on m'a toujours appris qu'il valait mieux savourer un verre d'un très bon alcool plutôt que vider un pack d'une mauvaise "bignouze". Parmi mes ascendants, figure une branche bourgeoise et une autre néo-bourgeoise (fils d'agriculteur deshérité ayant réussi dans les affaires).
Cette consommation devenue faible et irrégulière s'explique par une série d'expériences vécues indirectement, et qui ont peu à peu modifié ma vision de l'alcool.
Mon grand père paternel pour commencer. Je l'ai finalement peu connu, puisqu'il était déjà âgé et malade à ma naissance, maladies liées au tabac et à l'alcool. Il souffrait également d'Alzeimer. Il était connu entre autres pour avoir une très bonne descente. Tout le monde le craignait, et donc, je le craignais aussi en retour.
Mon ex-beau-père a développé une dépendance à l'alcool à partir d'une consommation qui paraissait banale et modérée : un demi après la journée de travail, le verre de vin à table. Et pourtant, il a fallu une restriction budgétaire pour découvrire qu'il souffrait du manque. C'est effrayant quand on se rend compte qu'il suffit de pas grand chose, juste une consommation régulière pour sombrer dans l'alcoolo-dépendance, et surtout, sans en douter une seule seconde pendant des années.
A l'enterrement de ma grand mère, pour lui rendre hommage, un de ses gendres a proposé de boire un verre à son honneur, et de préférence, un alcool qu'elle appréciait. Le choix s'était donc porté entre trois candidats : du champagne, de la leffe ou du baby (wisky avec glaçon). Je vous laisse deviner la boisson choisie... mais voilà, entre ma cousine, enceinte, qui se permet une coupe, et la desinhibation qui a entreiné les premières tractations concernant le partage des biens quelques heures à peine après l'office religieux, ces quelques coupes m'ont laissé un gout amère...
Depuis quelques mois déjà, une de mes amies souffre d'une addiction à l'alcool apparue dans un contexte de dépression nerveuse. L'alcool est un anti-dépresseur puissant. Ce qui est terrible, c'est qu'elle est devenue prisonnière d'un cycle infernal : sa dépression entretient son alcoolisme, qui lui entretient sa dépression.
Du coup, j'ai de moins en moins envie de boire, et vois de plus en plus cette boisson comme un poison.