Par Marjolaine Jolicoeur (source)
Les végétariens qui consomment très peu ou pas du tout de produits animaux s’exposent à des carences graves en B12. Voilà la dernière marotte des nutritionnistes et du lobby de la viande, des oeufs et des produits laitiers. Après le culte de la protéine et l’adoration du calcium, place à la sacralisation de la B12. Ce mythe de la B12 est-il basé sur la peur ou sur une réelle compréhension de cette vitamine ?
La B12 est une molécule complexe appelée cobalamine à cause de son contenu en cobalt. Elle est synthétisée par des micro-organismes, des bactéries vivant dans le sol et le système digestif des humains ou des animaux. Elle provient donc de bactéries se développant sur les végétaux ou dans le système animal. Selon certains carnivores mal informés, les végétariens/végétaliens ne consommant que peu ou pas de viande ou de produits laitiers deviennent verts et anémiques, conduisant ces mangeurs de graines à une mort certaine. Quelle perception simpliste de la B12 et de ses sources actives pour l’humain. Tout ce qui entoure la B12 est vaste et va beaucoup plus loin que « hors des produits animaux point de salut », englobant tout un système de santé relié intimement à nos habitudes de vie, à certains facteurs nous permettant de bien assimiler la B12 et à la faculté qu’a notre corps de produire sa propre B12. Soulignons que nombre d’études sur la B12 furent effectuées sur des rats, une pratique absurde et incohérente, un humain n’étant pas un rongeur. D’autres études aux résultats alarmants proviennent de petites communautés macrobiotiques où des mères et leurs bébés avaient un taux de B12 sous les normes. Ces études faites sur quelques douzaines de personnes ne peuvent être représentatives de millions de végétariens ne consommant pas de produits animaux et ayant tout de même une bonne santé. Ces femmes macrobiotiques consommaient-elles du poisson (une source élevée de protéines et souvent contaminé par des parasites), avaient-elles des carences en acide folique (l’acide folique étant relié à la consommation de crudités), des carences en fer et en B6 (des éléments travaillant en synergie avec la B12 ) ou des problèmes d’assimilation liés à diverses maladies physiques ou psychiques ? D’autres études furent faites sur des groupes de végétaliens de Grande-Bretagne ou d’Iran. Après des années sans produits animaux ou de suppléments, ces végétaliens n’avaient aucune carence en B12 et jouissaient d’une santé supérieure à bien des carnivores. Si la B12 se retrouve seulement dans les produits animaux selon certains, comment expliquer que les végétaliens ne tombent pas tous raide-morts à cause d’une carence ? Une carence en B12 chez les végétariens/végétaliens en santé est donc extrêmement rare. Les innombrables cultures de l’Inde, de la Chine ou de l’Afrique ne consommant que très très peu ou pas de produits animaux et ayant une bonne santé confirment ce fait.
Gabriel Cousens, médecin et psychiatre, est un spécialiste de l’alimentation végétalienne. Végétalien depuis de longues années, se nourrissant surtout d’aliments crus, il a élaboré dans son livre « Conscious Eating » un dossier sur la B12, solidement documenté et s’appuyant sur des observations cliniques glanées lors de sa longue pratique de médecin. Selon son expérience, les végétariens/végétaliens en santé ayant de bonnes habitudes de vie (sans tabac ou alcool) n’ont pas à s’inquiéter de la B12. Il n’est pas nécessaire de prendre des suppléments, sauf dans des cas bien précis comme lors de la grossesse, de l’allaitement ou de certains désordres physiques ou psychiques. En fait, certaines personnes peuvent avoir besoin d’un supplément de B12, bien qu’elles consomment des produits animaux mais ayant des maladies - au foie, à l’intestin, à la thyroïde - ou des désordres mentaux. À titre d’exemple, le docteur Cousens a pu observer dans sa pratique de psychiatre que certains patients non-végétariens psychotiques ou « borderline » voyaient leur état mental s’améliorer après des injections de B12.
TAUX DE B12 DANS LE SANG
Un autre chercheur, le docteur Drbeker, a quant à lui suivi un groupe de végétariens du Sud de l’Inde dont le taux de B12 était considéré comme bas. Malgré ce fait, tous étaient en bonne santé et ne démontraient aucun symptôme d’une carence. Un taux même bas de B12 est-il nécessairement l’indice d’une carence ? Ces normes sont-elles établies pour la physiologie d’un végétarien fort différente de celle d’un carnivore ? Globalement, le sang d’un végétarien/végétalien diffère d’un carnivore. Son taux de cholestérol est bas, en moyenne de 3,5 un signe de santé pour les cardiologues. Pour la B12, la norme idéale pour la communauté scientifique est de 0,1 microgramme et plus, une norme pour les carnivores ayant une alimentation contenant beaucoup de protéines et de gras animal. Sachant que ces deux facteurs bloquent une assimilation optimale de la B12, les végétariens/végétaliens ont des besoins plus minimes : entre 0,5 et 0,05 microgramme selon diverses sources. La viande a un effet négatif sur le pancréas, le foie et la flore intestinale. La lenteur de sa digestion diminue la sécrétion du « facteur intrinsèque » provenant de l’estomac et nécessaire au transport de la B12. À cause de tous les effets perturbateurs de la viande, les carnivores prenant 10 microgrammes de B12 par jour en assimilent seulement 16% alors que les végétaliens qui n’en absorbe que 1 microgramme en assimilent plus de 70%.
PERSONNES À RISQUES
On clame souvent que les végétariens/végétaliens sont des personnes à risques pour une carence en B12. Pourtant, les femmes enceintes ou qui allaitent, carnivores ou végétariennes, peuvent avoir une carence en B12. Le fotus exige 50 microgrammes de B12 par jour pour son développement. Une femme végétalienne en santé aura assez de réserves de B12 pour elle et son bébé.
Selon les estimations du chercheur Robert Russell, 20% au moins des Américains âgés de 65 ans ont une carence en B12. En vieillissant, notre capacité d’assimiler la B12 diminue et ce phénomène touche des personnes consommant majoritairement de la viande et des produits animaux. Selon Russell, lorsqu’une personne âgée commence à éprouver, sans cause apparente, des problèmes neuropsychiatriques, il faut soupçonner avant tout autre cause, une carence en B12.
NOTRE USINE PERSONNELLE DE B12
Outre via l’alimentation, les micro-organismes se trouvant dans notre bouche, autour des dents et des gencives, dans le pharynx et les bronches nous apportent de la B12. La quantité de B12 produite par notre corps peut atteindre jusqu’à 0,5 microgramme, ce qui peut être suffisant pour nos besoins quotidiens. Certains chercheurs affirment que la B12 peut aussi être absorbée par inhalation. Les quantités de B12 libérées dans l’intestin par la bile sont presque entièrement réassimilées.
De faibles quantités de B12 s’avèrent donc suffisantes pour des végétaliens en santé car la vitamine est très bien entreposée par notre organisme. Nos réserves de B12 suffisent à nos besoins pendant trois ans ou plus. Puisque notre corps a la capacité de recycler la B12, on estime que certaines personnes ont des réserves pour plus de 20 ans.
DANS L’ALIMENTATION
La B12 ne se retrouve pas que dans les produits animaux. Les végétaux en absorbent et l’eau courante de même que l’eau de pluie en contiennent. À une époque, aux États-Unis, la B12 était extraite de l’eau des égouts et mélangée aux aliments concentrés pour animaux.
Les légumes-racines, à cause de leur étroit contact avec le sol, renferment de la B12. Cette vitamine étant élaborée par des micro-organismes venant d’un sol sain, amène un argument de plus en faveur de l’agriculture biologique. Une étude menée par le docteur A. Mozafor de Suisse et citée dans le « New Century Nutrition » par Collin Campbell, les sols fertilisés par du fumier d’animaux démontraient plus de B12 que ceux fertilisés à l’aide de produits chimiques. Les végétaux testés avaient donc un taux de B12 plus élevé que ceux de l’agriculture aux engrais synthétiques. Les épinards bio donnaient 17,8mcg/kg de B12 alors que les épinards chimiques n’en donnaient que 6,9mcg/kg. Les fèves de soja bio : 1,9mcg/kg - fèves de soja chimiques : 1,6mcg/kg.
Dans une autre étude, citée cette fois-ci par le docteur Cousens, une communauté végétalienne opta pour une méthode de fertilisation en vogue depuis des millénaires en Orient, des excréments humains compostés. Leurs végétaux démontraient un taux très élevé en B12. Plusieurs communautés végétaliennes à travers le monde (au Danemark, en Autriche, aux États-Unis) cultivent avec succès leurs potagers en employant du fumier humain-fèces et urine- ainsi que de l’engrais vert.
Si nous avons accès à des végétaux de culture biologique, le fait de ne pas trop les laver nous permet de retirer plus de B12. La germination accélère le processus aussi : au quatrième jour, 100g de lentilles germées=237 microgrammes de B12/100g, de pois=235 microgrammes de B12.
D’autres sources : 28 g de racine de poireaux ou de betteraves donnent 0,1 ou 0,3 mcg de B12. Avant que la B12 ne soit découverte, le célèbre docteur John Harvey Kellogg traitait, au début du siècle, l’anémie pernicieuse, avec du bouillon concentré de son de blé.
FAUSSE B12:LES ANALOGUES
La B12 contenue dans les aliments n’est pas toujours assimilable pour les humains. Les « analogues » de la B12 ressemblent à la vitamine mais ces substances ont une structure particulière leur conférant un rôle différent dans l’organisme. Cette « fausse » B12 apparaît selon certaines techniques pour mesurer la teneur en vitamine de différents aliments. Ces analogues ont pu apparaître dans le miso ou le tempeh lors d’études dans le passé, mais elles s’avèrent inactives pour l’humain. Dans les selles humaines par exemple, on retrouve 100 microgrammes de B12 ; 95% sont des analogues alors que 5% est une B12 active et assimilable pour l’humain.
CONCLUSION
Un végétarien ou végétalien en santé avec des habitudes de vie saine n’a pas à s’inquiéter d’une carence en B12 même s’il consomme très peu ou pas de produits animaux. Dans des cas précis lors de la grossesse, de maladies diverses-une foule de végétaux donnent de la B12 ainsi que plusieurs aliments enrichis avec de la B12 d’origine bactérienne:céréales, lait de soja ou levure alimentaire. Quelques cuillerées à thé d’algues par jour calmeront les inquiets. Un spécialiste de la B12, le docteur Herbert, croit que les végétariens/végétaliens assimilent leur B12 plus par la réabsorption de la bile que par les aliments qu’ils consomment.
Sachant qu’une soi-disant carence en B12 est plus une question d’assimilation que d’apport inadéquat, essayons de :
Préserver la santé de notre estomac Manger beaucoup d’aliments crus Avoir de bonnes habitudes de vie et diminuer notre consommation d’alcool, de café, de tabac, etc. Privilégier les sources naturelles de B12 (algues, germination, aliments enrichis, etc.) car les suppléments, surtout dans les multivitamines, contiennent un taux élevé d’analogues diminuant ainsi notre capacité d’assimiler la B12 active Puisque l’acide folique est étroitement apparenté à la B12, inclure dans notre alimentation-légumes verts, fruits, céréales, noix. Avoir confiance dans notre décision de ne consommer que peu ou pas de produits animaux. La réalité est simple : nul besoin d’exploiter, de tuer ou de dévorer des animaux pour bien assimiler la B12. Depuis des millénaires, la santé de millions de végétariens/végétaliens de par le monde entier en sont une preuve vivante.
ENNEMIS DE LA B12
Tabac
Sucre blanc
Alcool
Café
Contraceptifs oraux
Aspirine
Laxatifs
Antibiotiques
Médicaments traitant l’épilepsie
Somnifères
Un taux élevé de cholestérol
Insuffisance d’acidité gastrique
Une alimentation contenant trop de protéines, de gras animal ou d’aliments
cuits
Faible taux dans l’organisme de B6 ou de fer
Pancréas et foie assimilant mal la B12
Désordres de la thyroïde
Maladie de Crohn
Stress physique et psychique
Forte dose de vitamine C (+ 500 mg par jour)
EFFET S D’UNE CARENCE
Anémie
Anorexie
Troubles menstruels
Asthme
Zona
Fatigue et faiblesse intenses
Névralgie
Fourmillements ou sensations d’engourdissement dans les membres inférieurs
Troubles moteurs
Troubles de la personnalité-paranoïa, hallucinations, psychoses, névroses,
intolérance à la lumière et aux bruits, symptômes de la szhizophrénie.
Sources : "Végétarisme et non-violence", Marjolaine Jolicoeur, ed. Commensal « Nutrition for Optimum Health », Vidéo-Michael Klaper, m.d. « Why Do Vegeterians Eat Like That » -David A. Gable, Prime Imprints Ltd. « Conscious Eating »-Gabriel Cousens, m.d., Vision Books Int. « Vitamin B12 Breakthrough »-Jiv. Dayadigest, juin 1997, Vol. 1, No. 2. « Les hommes malades des bêtes » -Docteur Agatha Trash, m.d., Appendice D par D. Starenkyj. « A Vegetarian Source Book »-Keith Kers, Vegetarian Press. « Végétalisme »-Ass. Hollandaise pour le véganisme, traduit et édité par Walter Steinrüch.
Février 2001