Connaitre l'ennemi...

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@Nicollas: Merci pour ce début de retour ^^

J'ai lu une de ses interviews, et j'ai l'impression qu'il mélange du réel et de l'hypothétique d'une façon qui sème la confusion chez le "lecteur lambda", et fournit sans (j'espère) vraiment le vouloir de faux arguments aux industriels de la viande.

Il dit par exemple ceci:

Scientists have calculated that globally the ratio between the amounts of useful plant food used to produce meat is about 5 to 1. If you feed animals only food that humans can eat — which is, indeed, largely the case in the Western world — that may be true. But animals also eat food we can't eat, such as grass. So the real conversion figure is 1.4 to 1.
(source: interview de Fairlie sur Time.com: http://www.time.com/time/health/article/0,8599,2024133,00.html

traduction pour les non-anglophones:

"Des scientifiques ont calculé qu'à l'échelle mondiale le ratio entre les quantités nourricières de plantes utilisées pour produire de la viande [AdT: et celles qu'il faut pour nourrir les humains] est environ 5 pour 1. Si vous nourrissez les animaux uniquement avec des aliments que les humains peuvent manger - ce qui est, effectivement, largement le cas dans le monde occidental - cela peut être vrai. Mais les animaux consomment également de la nourriture que nous ne pouvons manger, comme l'herbe. Donc le ratio réel est 1,4 pour 1."
Il se mélange dans son propos. Il nous dit que le chiffre est largement correct "dans le monde occidental" (les plus gros consommateurs à l'heure actuelle...), mais qu'au final non, parce que par un tour de passe-passe tous les élevages de son argumentaire se sont transformés en élevages non-industriels... Son "donc", comme si son paragraphe était une construction logique irréfutable, me fait rire jaune. Au final, on ne sait pas ce qui relève du calcul réel sur la situation actuelle ou du calcul sur une situation hypothétique idéale.
Ainsi, les industriels vont utiliser son bouquin en disant "voyez, il l'a dit, on a pas tant d'impact!" alors que ce n'est pas ce qu'il raconte.

Autre paragraphe de l'interview:

What are the most sustainable types of meat to eat?

Pigs fed off food waste, whey and other forms of garden and agricultural waste. Dairy cows that are eating grass and clover as part of mixed-arable rotation. They have very little toll on the environment and are, on balance, benign. The way forward is to switch to organic farming. We would have to cut meat consumption by half, but our dairy intake would remain about the same.
Et traduction:

Quels sont les types de viande les plus viables à la consommation?

Des porcs nourris de déchets alimentaires, de lactoserum et d'autres formes de déchets issus du jardinage ou de l'agriculture. Des vaches laitières qui mangent de l'herbe et du trèfle comme part d'une exploitation mixte [NdT: fait d'alterner pour un champ l'état cultivé/utilisé comme pâture], ils ont un très faible coût pour l'environnement et sont, tout compte fait, bénins. La voie à suivre pour aller de l'avant est de passer à l'agriculture biologique. Nous aurions à réduire de moitié notre consommation de viande, mais notre consommation laitière resterait à peu près la même.
Il met de côté ici tellement de facteurs ecolo-socio-économiques que ça en devient ridicule. Déjà, il part sur l'hypothèse que le nombre de consommateurs de viande et de produits laitiers n'augmente pas, alors que la Chine, par exemple, est de plus en plus demandeuse... près d'un milliard et demi de consommateurs potentiels supplémentaires, ça risque de changer ses calculs...

Allez, un petit dernier qui en dit, je trouve, long sur le bonhomme:

You describe yourself as a born-again carnivore. How did that happen?
I was a vegetarian from 18 to 24 years old, and I gave up meat partly because I had misgivings about the cruelty to animals. But I began eating meat again when I moved to the [English] countryside and started keeping goats. I had to do something with the male goats. They wouldn't produce milk or offspring, so I started eating them. At 59, I now eat meat twice a week. I still to this day have some misgivings about killing animals for food. But intellectually, I know it is the right thing to do.
trad:

Vous vous décrivez comme un carnivore régénéré. Comment est-ce arrivé?

J'ai été végétarien de mes 18 à mes 24 ans, et j'ai laissé tomber la viande en partie parce que j'avais des scrupules vis à vis de la cruauté envers les animaux. Mais j'ai recommencé à manger de la viande lorsque j'ai déménagé àdans la campagne [anglaise] et commencé à élever des chèvres. Il fallait que je fasse quelque chose des mâles. Ils n'auraient jamais produit de lait ni de petits, alors j'ai commencé à les manger. À 59 ans, je consomme désormais de la viande deux fois par semaine. J'ai toujours des scrupules sur le fait de tuer des animaux pour les manger. Mais intellectuellement [NdT: employé ici comme opposition à "émotionnellement"], je sais que c'est la bonne chose à faire.
Aaaaah, tout s'explique n'est-ce pas? Comme tout le monde, il prêche pour sa paroisse et compense sa culpabilité en montant des justifications...

Un ajout au pavé, parce qu'il y a eu des interventions le temps que j'écrive xD

Nicollas":2wq8jat9 a dit:
L'efficacité en protéine sert dans le débat écologique et social à dire "regardez comme les animaux d'élevage sont inefficaces à produire ce dont on a besoin (ici les protéines), passons nous d'eux et nous profiterons directement de leur alimentation, sans passer par cette conversion énergétique"

donc tout ce qui n'est pas consommé par les humains dans le régime alimentaire d'un animal d'élevage ne devrait pas entrer en compte.

(je ne dis pas que cette mesure et la seule pertinente ou suffisante)
D'un point de vue biochimique, le calcul d'efficacité en protéines est ridicule. Un aliment ne se réduit pas à une quantité d'un type de nutriments. Une même plante peut par exemple couvrir à la fois les besoins protéiques et glucidiques. Le ratio "efficacité protéique" ne bougera alors pas, mais il faudra prendre en compte le fait que la quantité de viande considérée ne couvre pas les glucides que la plante, elle, couvre, et donc ajouter au ratio pour obtenir l'équivalence une quantité de plante à la quantité de viande... ah ben wé, mais les protéines, elles peuvent être converties en glucides... et vice-versa, mis à part pour les "acides aminés essentiels". Et les graisses alors...?
Pour avoir des chiffres un tant soit peu significatifs, il faut choisir un ensemble complet de nutriments à apporter, et comparer différentes façons d'obtenir le résultat. À partie de là, on peut calculer l'impact environnemental de chaque régime (et non de chaque aliment, ce qui n'a aucun sens. ), en se référant à la situation globale et aux pratiques actuelles, et non à "une agriculture idéale hypothétique" qui n'a aucune valeur.

@barbux: désolé de relancer, j'ai mis le temps à écrire ça et faire les traductions tout en bossant ^^'
 
Hebi":1o68eskz a dit:
@barbux: désolé de relancer, j'ai mis le temps à écrire ça et faire les traductions tout en bossant ^^'
Ben soit pas désolé, c'est intéressant ce que tu dis. Je comptais même envoyer un message pour te remercier pour les efforts (j'ai un peu de mal avec l'anglais et tes traductions sont bienvenues) avant de lire cette phrase.
 
Je ne peux présumer du livre de Fairlie, mais au lû de ces passages, il ne raisonne pas faussement malgré tout. En effet, le végétarisme pèche souvent par son propre discours en se référant aux tableaux nutritifs établis par et pour des omnis. Ainsi beaucoup veulent un bon équilibre protéique proche de la viande et de ce fait recherchent dans des protéines végétales un équivalent aux protéines animales. Comme les protéines végétales ne se trouvent pas en équivalent dans les végés, il faut alors consommer plus des protéines végétales (comme par exemple deux légumineuses différentes ou une légumineuse +une céréale) pour retrouver une équivalence. Donc plus de culture, plus d’engrais, plus de transport, etc… Par ailleurs certains pâturages ne peuvent être convertis (à moindres frais) en surfaces cultivables. Mais le défaut, entre autres, de son raisonnement semble être de comparer : élevage « familial » et élevage industriel.
Donc en supposant même que le ratio 5/1 ou 10/1 soit exagéré le bénéfice global reste donc largement au profit du végéta*isme.
 
sqoia":24mzil21 a dit:
Un autre lobby groupe d'influence de la viande :
- Académie de la viande : http://www.academiedelaviande.net/index.php

Ils ont l'air assez concernés par la montée des affreux terroristes du bien être animal :whistle:
- Dernier article : « Les adversaires, non les ennemis de la viande sont nombreux, riches, agressifs. Soyons-le autant qu'eux, et plus intelligents aussi ! »
- Thème de la prochaine assemblée générale : « Un monde sans élevage, vraiment ? » qui va lister tous les bienfaits de l'élevage.
Un ramassis de conneries et de bêtise :'(
Franchement, on devrait les emprisonner pour divulgation de faits mensongers et désinformation (m'enfin c'est aussi le cas de certains végétarien, hein ...)
 
Hebi":3s73xbex a dit:
@Nicollas: Merci pour ce début de retour ^^

J'ai lu une de ses interviews, et j'ai l'impression qu'il mélange du réel et de l'hypothétique d'une façon qui sème la confusion chez le "lecteur lambda", et fournit sans (j'espère) vraiment le vouloir de faux arguments aux industriels de la viande.
Je pense que l'auteur est sincère. Dans le livre il démonte un argumentaire d'un lobby de la viande qui utilisait les résultats de l'étude de la FAO pour faire une propagande sur des conclusions douteuses.

Après bien sûr que les propagandistes s'en donneront à coeur joie en déformant les chiffres ou les propos, mais ce n'est pas la faute de l'auteur.

Concernant tes remarques, il ne transforme pas les types d'élevages, il parle des élevages occidentaux (5:1), puis de tous les élevages (1.4:1). Ce n'est pas pour justifier les élevages industriels, mais pour dire qu'un élevage efficace est possible, puisque la moyenne mondiale est proche de 1 (alors que c'est plombé par l'élevage occidental).

Concernant les consommateurs, oui il augmentent, mais l'auteur offre un instantané avec les chiffres qu'il a, il ne veut pas dire que ça ne bougera jamais.

Enfin bref je suis pas là pour défendre l'auteur.
 
janic":1puc7xcr a dit:
Je ne peux présumer du livre de Fairlie, mais au lû de ces passages, il ne raisonne pas faussement malgré tout. En effet, le végétarisme pèche souvent par son propre discours en se référant aux tableaux nutritifs établis par et pour des omnis. Ainsi beaucoup veulent un bon équilibre protéique proche de la viande et de ce fait recherchent dans des protéines végétales un équivalent aux protéines animales. Comme les protéines végétales ne se trouvent pas en équivalent dans les végés, il faut alors consommer plus des protéines végétales (comme par exemple deux légumineuses différentes ou une légumineuse +une céréale) pour retrouver une équivalence. Donc plus de culture, plus d’engrais, plus de transport, etc… Par ailleurs certains pâturages ne peuvent être convertis (à moindres frais) en surfaces cultivables. Mais le défaut, entre autres, de son raisonnement semble être de comparer : élevage « familial » et élevage industriel.
Donc en supposant même que le ratio 5/1 ou 10/1 soit exagéré le bénéfice global reste donc largement au profit du végéta*isme.
Je suis d'accord. Et j'ai également l'impression, que ce soit dans son cas ou dans le cas des végés utilisant l'argument écologique à outrance [je parle de ceux, et il y en a, qui assènent des chiffres trouvés au détour du net sans avoir au préalable vérifié leurs sources ou s'être intéressé à la façon dont les chiffres ont été obtenus], qu'il manque une étude vraiment complète de l'impact écologique comparée de différents régimes [par "complète", comprendre multi-dimensionnelle et ne mettant pas de côté les facteurs qui arrangent les uns ou les autres]. L'écologie, c'est complexe et très difficile à appréhender, et il est rapide de "zapper" quelques variables essentielles et de fausser les résultats d'une analyse.

[HS]
Ainsi beaucoup veulent un bon équilibre protéique proche de la viande et de ce fait recherchent dans des protéines végétales un équivalent aux protéines animales. Comme les protéines végétales ne se trouvent pas en équivalent dans les végés, il faut alors consommer plus des protéines végétales
Conversation de ce midi au boulot:

- Mais, tu ne manges que des salades depuis quelques temps, tu es malade? Au régime?
- Non, je ne mange plus de viande.
- T'es fou, tu vas mourir, regarde ton plat, y a pas de protéines!
- Ben si, regarde, riz+semoules+lentilles. Et du choux pour le calcium. Et pour le reste des carottes, du concombre, des raisins secs...
- Mais y a pas assez voyons! Il te faut au quotidien 2g de protéines par kilo!
- Heu... je fais pas du body-building moi hein...

^^' [/HS]

[edit]@Nicollas: Je vois ce que tu veux dire, mais la façon dont il explique les choses reste hyper confuse (en tout cas dans ses propos en-dehors du bouquin). Je crois qu'il faudra que je le lise.[/edit]
 
Ce contre argument (utilisé notamment dans les rapports de la FAO) qui veut que détruire l'industrie de la viande pour que les pauvres est à manger n'est pas viable car les céréales nécessaires aux animaux ne seront alors tout simplement pas produites est dingue de cynisme et de mauvaise foi.
De cynisme car évidemment, c'est admettre que la production massive de viande ne sert qu'à autoengraisser le marché et les profits, quitte à transformer une partie du monde en bonhomme michelin et faire crever l'autre de faim.
Et c'est ne pas tenir compte du fait que l'agriculture d'une façon globale est à transformer en profondeur. On ne donnera évidemment pas le mais et le même soja à manger aux humains, mais on produira beaucoup plus de variétés de ceréales et de légumineuses, plus de légumes et surtout de façon différente.
Quand on parle de suppression de l'élevage industriel, on parle évidemment de métamorphose du système agricole...
 
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