Acermendax : imposture d’une analyse
Cette critique porte donc sur l’article suivant :
http://menace-theoriste.fr/gary-yourofs ... imposture/
Ce texte est-il un exemple de pseudo-scepticisme ? Je suis curieux de connaître votre avis. l'objet de mon texte n'est pas l'analyse du texte de Gary yourovsky. Je me contenterai de critiquer l'analyse d'Acermendax.
Acermendax tout d’abord prétend qu’il ne jugera pas les « idéaux » vegans de Gary Yourovsky (GY). mais qu’il en critiquera le discours et la méthode. Cette affirmation faite a priori me semble un peu cavalière. Que je sache, c’est au lecteur de juger, à posteriori, si l’article d’Acermendax est impartial ou non. Je montrerai pour ma part d’une part qu’il ne l’est pas, qu’il est idéologique, et d’autre part qu’il contient de nombreuses erreurs d’analyse, beaucoup de sophismes et d’imprécisions scientifiques.
Le lecteur se réfèrera au divers paragraphes du texte d’Acermendax. J’en reprends les titres.
Les victimes
Tout d’abord Acermendax ne sachant pas ce qu’est une « question rhétorique », à défaut de se renseigner, ironise, semble-t-il ; puis il décide qu’il doit répondre. Or c’est justement usuel de parler de « rhetorical question » quand on n’est pas censé répondre…
La première grosse erreur d’analyse d’Acermendax vient du fait que cette question est mal traduite. Et il sait qu’il y a un problème puisque le mot « victime » est suivi d’un point d’interrogation. « L’esclavage, la possession, (les victimes ?) le profit, la domination sont-ils exclusifs à la race humaine ? » (3’45 » Mais au lieu de chercher à comprendre le sens de cette phrase Acermendax préfère ignorer le mot « victime ». Il est monstrueux méthodologiquement d’analyser quelque chose dont on sait qu’il y a des doutes quant à sa transcription et à sa traduction.
La réponse que donne Acermendax est que les fourmis commettent l’esclavage et il prétend que GY ignore que les animaux non humains le pratiquent aussi. Il s’agit d’un épouvantail : rien ne nous permet de prétendre que GY passe sciemment sous silence ou n’ait pas connaissance de ce fait zoologique. Il n’est en rien tenu de le présenter dans son discours. Il n’y a rien d’exceptionnaliste là dedans.
Cet argument d’Acermendax qu’on pourrait traduire par « ants slavery tho » se rapproche du « lion tho » (dans la nature les lions mangent de la viande donc les humains peuvent éthiquement le faire aussi), argument fallacieux qui est bien connu des vegans. Il s’agit d’un appel à la nature. Or les vegans, majoritairement, et parmi eux, je suppose, GY, considèrent que la nature ne doit pas influencer l’éthique. Peu importe ce que font les fourmis, nous devons nous comporter selon notre jugement.
Je cite Acermendax : « L’homme est un animal comme beaucoup d’autres, et ses qualités comme ses défauts se retrouvent chez d’autres espèces. » On notera les notions de « qualité » et de « défauts » ; la question est donc éthique et idéologique. S’il s’agissait d’une simple comparaison comportementale on ne portrait pas ces jugements de valeurs.
Rendons à GY ses propos et observons son discours sans en faire un épouvantail mal traduit. Pour que vous compreniez ce qu’il a voulu dire dans cette phrase : « L’esclavage, la possession, (les victimes ?) le profit, la domination sont-ils exclusifs à la race humaine ? », je vais la traduire comme ceci : « L’esclavage, la possession, les victimes, le profit, la domination existent-ils uniquement chez la race humaine ? » ; et pour plus de précision, il faudrait dire : « les concepts d’esclavage, de possession, de victimes, de profit, de domination ne sont-ils applicables qu’à la race humaine ? ». Vous verrez que de cette manière le reste du discours est parfaitement sensé : « Les noirs, les juifs, les femmes et les enfants ont-ils été les seules victimes de ces atrocités ? » Il s’agit des prémisses du discours antispéciste. La lutte éthique contre les discriminations humaines est étendue aux animaux non-humains.
Je note d’ailleurs qu’ironiquement, GY répond implicitement à sa première question par « non » tout comme Acermendax. Le fait qu’Acermendax prétende que GY répondrait par « oui » ou en tout cas voudrais ignorer ce « non » est bien un épouvantail.
Je note aussi qu’un sceptique qui a repris le discours d’Acermendax sans le critiquer va jusqu’à supprimer le mot « victime » de la phrase « L’esclavage, la possession, (les victimes?) le profit, la domination sont-ils exclusifs à la race humaine ? »
https://hitek.fr/actualite/homme-est-il-omnivore_7437
Je ne marcherai pas mes mots. C’est une honte que des prétendus sceptiques se permettent un tel acte de malhonnêteté.
Je ne vais pas analyser tous les propos d’Acermendax. On n’en finirait plus. Je me focaliserais sur ce qui me parait particulièrement contestable.
Je note rapidement que refuser que la notion d’esclavagisme soit étendue aux animaux parce que cette terminologie serait réservée à « l’Histoire » est profondément spéciste. Il s’agit d’une prise de position idéologique.
Je note aussi qu’un océan par synecdoque peut désigner les animaux qui l’habitent. Sincèrement, si un orateur ne peut plus user des figures de styles, et qu’il est tenu d’employer un langage mathématique, je ne sais pas où l’on va.
Sur les question de welfarisme et de « humain slaughter », Acermendax pinaille. Il écrit finalement : « À ce stade, on se demande s’il (GY) fait semblant de croire que quiconque puisse penser que tuer des animaux est un acte de gentillesse. » L’opposition des vegans au welfarisme n’a pas à être caricaturée de la sorte. A voir l’impact des vidéos d’abattoir sur le public, il est évident que la plupart des gens ignorent que la réalité est violente. Le constat doit être fait que la population idéalise l’abattage et les normes de bien-être animal.
Activisme
Acermendax répond à la revendication de désobéissance civile, fanfaronne peut être, de GY par « Un bon défenseur de la cause n’aurait pas besoin d’adopter la posture de l’activiste malmené ». Encore une fois, il s’agit d’une prise de position idéologique de la part d’Acermendax. Tiphaine Lagarde qui est militante abolitionniste et doctorante en droit, en France, a aussi pour position qu’il faut désobéir et qu’il faut se faire arrêter par la police et être jugé pour dénoncer le système coercitif qui protège l’exploitation animale. Il s’agit d’une stratégie de certains groupes animalistes.
Acermendax considère l’empathie des vegans et le désir de communiquer cette compassion comme « un appel aux émotions ». C’est sans doute vrai. La rhétorique a trois piliers ethos, pathos, logos. Dans un discours portant sur l’éthique, il est parfaitement sensé de ne pas se limiter au simple logos.
La preuve par l’enfant
Certes il ne faut pas idéaliser les enfants. Je fais remarquer d’ailleurs que contrairement à ce que pense Acermendax, les enfants de deux ans ont une sexualité.
Je conseil rapidement pour les personne persuadées comme lui que « l’amour du prochain n’est pas un instinct largement répandu chez les animaux adultes, contrairement à ce que le conférencier insinue lourdement » de lire Franz de Waal et les recherches contemporaines en éthologie sur l’empathie.
Le spécisme
Dans ce paragraphe Acermendax ose considérer que les images des abattoirs et des violences contre les animaux sont anecdotiques (qu’il ne s’agirait que « de crimes de certains ») et ne sont pas suffisantes pour dénoncer tout le système. Non ces images sont courantes et les pratiques usuelles de l’industrie animale sont violentes. On retrouve cet argument chez les négationnistes : d’après eux, le témoignage des victimes est anecdotique et doit être considéré insignifiant au regard de l’Histoire. Acermendax, ici, n’a pas volé bien haut.
La morale à toutes les sauces
GY étant américain, comme beaucoup d’anglo-saxons, il n’a pas de scrupules à parler de morale. En France, on préfèrerait le mot « éthique ». Peut être que cela vient du fait que la culture francophone est plutôt théorique quand les anglophones sont plus empiriques.
Acermendax, semble embarrassé par la comparaison du holocauste animal avec la Shoah. Je recommande ces vidéos sur ces questions :
https://www.youtube.com/watch?v=M02DZYKVgQQ
https://www.youtube.com/watch?v=gNV26q89zYg
https://www.youtube.com/watch?v=SuvdoSpN398
L’écueil du déni de la science
Les arguments de GY ne sont en effet pas corrects, mais cela n’invalide pas l’hypothèse que l’homme soit frugivore ou herbivore. Je conseille cette vidéo aux personnes qui sont intéressées par l’argument que l’homme est frugivore (et donc que physiologiquement il n’est adapté qu’à des très petites consommations de produits d’origine animale) :
https://www.youtube.com/watch?v=4ZEZYu_7zR4
J’aimerais bien voir un zététicien partisan d’un régime « omnivore » démonter cette vidéo, histoire qu’on s’amuse un peu. Cela nous changerait des sophistes qui basent leur défense d’un régime fortement carné sur la réfutation de GY. Force est de constater qu’en territoire sceptique on préfère attaquer les orateurs non qualifiés scientifiquement d’un mouvement pour le discréditer ; on a plus de mal à critiquer les scientifiques. A vos plumes !
Pourquoi ces mensonges ?
Acermendax nous donne son interprétation. Par rigueur, je dirais qu’il a peut-être raison ; mais peut-être pas. Il est fort probable que GY soit convaincu de son propos. Acermendax fait un procès d’intension, un sophisme de plus.
La preuve par l’absurde ?
Je n’aime pas tellement la licence poétique que nos ancêtres auraient été de « redoutables prédateurs ». La phantasme d’inspirer la terreur aux animaux me parait douteux. Il est néanmoins révélateur de la psychologie associée à la consommation de viande.
Le cas de l’Homo sapiens
Acermendax écrit : « Quand le régime alimentaire de nos ancêtres a commencé à contenir plus de viande, la taille du cerveau a augmenté, les deux évènements sont allés de paire qu’il y ait causalité ou non, ce qui fait que, historiquement, nous sommes devenus qui nous sommes en partie grâce à ce régime carné. Tels sont les faits. »
Cette phase est contradictoire : s’il n’y a pas causalité, à savoir si la viande n’a pas fait grossir nos cerveaux, alors, en ce qui concerne notre encéphale, nous ne sommes pas devenu ce que nous sommes « grâce » à ce régime carné. Nous sommes peut être devenus ce que nous sommes en dépit de ce régime carné. Et la causalité est peut être inverse. C’est peut être l’augmentation de la taille de notre cerveau qui a impliqué plus de facilité pour se procurer de la viande. Si l’association n’implique pas la causalité, il est inutile d’ajouter l’adverbe « historiquement » pour suggérer une causalité. A moins que le « ce que nous sommes » d’Acermendax, porte sur les questions culturelles et non pas physiologiques mais alors pourquoi « grâce » ? Vraiment il faudrait faire l’apologie du carnisme et de sa culture obsédée par le secret et la ritualisation de l’abattage ? Et pourquoi écrire une phrase aussi confuse qui met sur un même plan culture et morphologie ?
Ensuite Acermendax défend le régime omnivore flexitarien. Il faudrait qu’il précise s’il s’agit d’un régime comme à Okinawa, avec 1 ou 2% de produits d’origine animale ou d’un régime flexitarien occidentale où on se gave de fromage et où l’on consomme de la viande deux fois par semaine. Pendant l’antiquité ou au moyen âge, nous ne consommions pas autant de produits d’origine animale que les flexitariens occidentaux et ceux qui le faisaient, les puissants, avaient les mêmes maladies du life style que l’homme contemporain.
Je vous oriente sur cette étude qui montre que les régimes omnivores ou flexitariens occidentaux sont moins avantageux que des régimes sans viande, le végétalisme battant tous les records de longévité :
https://www.researchgate.net/publicatio ... _of_Choice
De plus Acermendax parle d’un régime « varié ». Il faudrait qu’il précise ce qu’il entend par là, car non, équilibrer un régime selon les secteurs de la production agricole comme il est souvent recommandé n’est pas avantageux. Je conseille vivement aux personnes qui ont ce genre de préjugés de se renseigner sur la recherche en nutrition. Et je recommande à Acermendax de cesser d’affirmer des vérités sur la nutrition sans citer aucune étude sérieuse.
Le défi de la pomme et du lapin
Je note brièvement que 50% des gens cesseraient de manger de la viande s’ils avaient à tuer l’animal eux même.
Pour ce qui est des questions de but développées par Acermendax, je pense qu’il s’agit d’une discussion théologique ou philosophique. Cela relève de la liberté de croyance et je n’ai rien à en dire.
Que nous dit notre instinct ?
Il n’est pas judicieux de minimiser l’importance du végétarisme dans l’humanité sous prétexte que le végétarisme strict serait rare. La question est celle des proportions de produits d’origine animale dans l’alimentation. Or majoritairement, cette proportion est faible, voire très faible. On citera les Massai ou les Inuits en contre-exemples. Mais leurs régimes ainsi que le régime occidental actuel sont des exceptions.
Le spectre de la maladie
« Gary Yourofsky brandit salmonelle et E.coli pour faire peur, mais on pourrait tout autant évoquer les toxines végétales. » On rapprochera ce sophisme de ceux du Dr Gaudry avec son plant paradox, un tissu d’inepties contraire à la science. On se réfèrera aussi aux positions du régime carnivore. Cet argument de toxicité serait vrai si l’on considérait toutes les plantes mais, dans le présent contexte, on ne parle que de celles qui sont utilisées dans notre alimentation.
Acermendax fait l’impasse sur les questions de cholestérol. C’est un peu léger mais nous lui sommes reconnaissant de ne pas avoir fait le coup de sortir un des arguments des cholesterol deniers. Je note que le régime végétalien est le seul dont on a prouvé qu’il permet de curer les artères obstruées :
https://dresselstyn.com/JFP_06307_Article1.pdf
Je recommande cette vidéo sur les questions d’acidité et de protéines :
https://www.youtube.com/watch?v=t-bgmubOUfI
Acermendax affirme que « les diététiciens s’accordent à dire que 50% des protéines devraient provenir des plantes et 50% des animaux. » Premièrement ce n’est pas le cas de tous les diététiciens. Deuxièmement, cette affirmation est en contradiction avec la recherche en nutrition. Eloignons nous de ce type d’argument d’autorité. Il suffit de regarder comment les diététiciens sont formés et en combien de temps (bac +2) pour comprendre qu’un diététicien est un coach de l’alimentation au service de la production agricole mais qu’il n’a aucune compétence en terme de science de la nutrition.
Pour ceux qui veulent s’amuser de la confrontation d’un sophiste corrompu omnivore avec un scientifique végétalien, je conseille le débat entre le nutritionniste omnivore Jeen-Michel Cohen et le docteur végétalien Jérôme Bernard-Pellet.
La radicalité sinon rien
Les vegans ne sont généralement pas favorable à l’argument flexitarien. Certains sont certes plus modérés comme, sur les questions d’alimentation, le médecin Pam Popper ou encore, L214 qui, bien que vegan, a parfois des arguments réductionnistes.
Il n’est pas acceptable de considérer que l’éthique vegan serait « radicale » si elle rejette le flexitarisme ou le réductionnisme. Il n’y a rien d’extrême à cela. Voici comment cette position s’argumente. Il est cohérent de considérer une binarité : on est soit mort, soit vivant. L’argument quantitatif (que manger un peu de viande est éthiquement acceptable) implique, s’il était transféré au viol, que l’on a le droit d’agresser sexuellement, à condition de le faire peu souvent. Donc le végétalisme strict est un impératif éthique. Le fait de considérer des binarités dans l’éthique n’implique pas que le monde soit fracturé entre le bien et le mal. Acermendax, ici, généralise, totalise même, de manière désagréable : quoi qu’il en dise, le rejet du flexitarisme n’implique pas un monde totalement manichéen. Cet épouvantail est ridicule.
Le véganisme n’induit pas plus de troubles du comportement alimentaire que le régime omnivore comme les démagogues le prétendent :
https://www.youtube.com/watch?v=4ivLFuKLyA0
Je veux bien qu’on affirme que certains vegans comme Freelee, par exemple, puisse impliquer des troubles du comportement alimentaire. J’ai des doutes quant au fait que ce soit le cas de GY. Je ne vois pas ce qui justifierait cette affirmation.
Acermendax affirme, commentant sur des images de personnes qui battent des animaux, que ces « pratiques sont punies par la justice ». Non, il n’y a pas de policiers qui veillent dans les élevages. Cet argument welfariste hypocrite relève d’une confiance disproportionnée dans l’autorité judiciaire. Ce qui est le plus triste là dedans, c’est que ces animaux battus ont moins souffert des coups que des conditions d’élevage et d’abattage. Ainsi GY finit sur de l’émotionnel ; ouf, j’ai moins peur, la justice dont parle Acermendax est là pour nous en protéger.
Un article qui n’est pas à la hauteur de la démarche zététique
Quel peer review pour cet article ? La zététique as-t-elle la capacité de se remettre en cause ?
Quels retours ai-je eu de la communauté sceptique ? On me dit, attaque personnelle, que GY est mon « gourou » et que je veux le défendre. C’est un épouvantail. Je me contente de critiquer les sophismes d’Acermendax. Je ne plaide pas pour GY.
Venez m’expliquer en quoi je me trompe sur ma critique au lieu de m’insulter. Quoi ? On n’a pas le droit de remettre en cause un zététicien sans se faire traiter de superstitieux ?
On me dit que « de toute façon on s’en fout » puisque les vegans sont des « extrémistes ». Mais oui, bien sûr… J’ai décidé de riposter après que j’ai fait le constat que l’article d’Acermendax constitue un argument pour des personnes qui prétendent que le véganisme est une secte. Ce n’est pas le cas (confer la MIVIDUDE). Ainsi avec des arguments douteux qui ne sont pas critiqués par la communauté sceptique, cet article a alimenté des sentiments de haine anti-vegan démagogiques et irrationnels.
Un des arguments d’Acermendax est que les erreurs de GY discréditent le véganisme. Les gens qui réfléchissent plus loin que le bout de son nez savent qu’un argument faux n’implique pas la fausseté du théorème. Ainsi les failles de GY ne discréditent le véganisme que chez les sophistes et les populistes haineux. Mais peut être que la communauté sceptique pourrait songer à calmer sa frange pseudo scientifique et démagogique. Cela nous soulagerait.