"Oui Christiane Taubira est un singe. Et moi aussi."

Ah oui, c'est vrai, j'ai deux trucs à répondre :
1 : je sais que je ne suis pas du tout irréprochable et j'espère n'avoir vexé personne en abrégeant les pseudos, si c'est le cas j'en suis désolée, j'ai pris conscience que ça pouvait être mal pris pas mal de temps après avoir commencé à poster régulièrement (donc il y a certainement d'autres exemples).
2 : on n'était pas dans un contexte de dispute à ce moment-là, ce qui change quand même pas mal la donne (Fushichô en avait déjà parlé).

Sinon je rejoins totalement ce que dit Numa : tu te positionnes en tant que personne attachée à parler du fond, rationnellement, mais tu tiens absolument à répondre à toutes les phrases que tu prends mal (en ne te gênant pas, toi, pour prêter des intentions malveillantes à leurs auteurices), tandis que tu (et pas seulement toi d'ailleurs, mais aussi Ravelle/Ellerav et peut-être d'autres) ne réponds pas à certaines questions de fond qui te sont pourtant posées tout à fait au premier degré.

Sur la question de comparer différentes oppressions en termes de nombre de morts (ou de victimes), plusieurs personnes ont répondu différents trucs, auxquels j'ai peu de souvenirs de réponses :

- Watermelon avait questionné la validité de mesurer la souffrance de manière linéaire : est-ce qu'une oppression qui fait deux fois plus de victimes est deux fois plus grave ? Ça me paraît très pertinent comme question : elle disait, par exemple, que si elle mourrait dans un accident de bus, ça ne changeait rien pour elle de mourir en même temps que 5 ou 15 autres personnes. Comment on quantifie la souffrance ? (En admettant que se poser la question soit une manière pertinente de raisonner, ce qui ne me paraît pas du tout évident.)

- Je ne crois pas avoir vu beaucoup de fois cette volonté de placer sa lutte en premier chez les féministes ou les antiracistes, mais j'ai l'impression qu'en général, les anticapitalistes et les anarchistes le font beaucoup, en disant qu'iels s'attaquent à quelque chose de vraiment structurel (à chaque fois que j'en ai parlé avec un.e militant.e communiste, iel me répondait que pour iel, se battre pour les droits des femmes, ou des animaux, revenait à pédaler dans la semoule, s'attaquer à des conséquences et non à la cause de tout ça, qui est le capitalisme). Bon, je dis pas ça en mode c'est plus intelligent hein, ça me paraît tout aussi contestable, mais juste pour dire : comment tu compares les dégâts du spécisme et les dégâts du capitalisme ? Sans le capitalisme, il y aurait certainement beaucoup moins d'animaux dans les abattoirs. Pourquoi serait-il prioritaire de lutter contre le spécisme ?

- Et puis surtout : pourquoi cette question ? Admettons (ce qui est un gros admettons, mais bref) qu'il y ait consensus pour dire que le spécisme est prioritaire. Bon, qu'est-ce qu'on fait ? On abandonne toutes les autres luttes jusqu'à ce qu'il n'y ait plus un animal en cage ? Ou jusqu'à ce que le nombre d'animaux dans les abattoirs soit égal au nombre d'humain.e.s opprimé.e.s dans le monde ? Moi je préfère qu'il y ait des gens partout, qui s'occupent de toutes les luttes. Et tout ça, ça part juste d'une critique sur le fait de véhiculer du racisme au sein de l'antispécisme : pourquoi il faudrait absolument faire un concours de bites (désolée, mais c'est tout ce qui me vient en tête) entre spécisme et racisme ? On peut pas juste choisir de militer pour la lutte qui nous tient le plus à coeur en faisant gaffe de pas participer à d'autres oppressions en même temps ?
 
Ça devient vraiment lourd, alors je vais me concentrer d'abord à répondre au message de Fabicha, en m'en tenant au fond, qui est à propos de l'article de Dominic qui constitue le sujet initial de ce fil.

J'avais parlé du fait que de manière répétée, on avait accusé Dominic d'être venu exploiter une affaire qui ne concernait pas.

Fabicha":2sxlz5a6 a dit:
Twizzle":2sxlz5a6 a dit:
J'avais fait la comparaison avec les insultes homophobes qu'on trouvait en abondance dans les commentaires concernant l'affaire du chaton. Le sujet de ces commentaires, c'était la maltraitance, pas l'homophobie. Leurs auteurs ont certainement dit "pédé" et "enculé" parce que pour eux ce sont des insultes banales. Aurais-tu dit qu'il n'y a pas dans l'emploi de ces mots et venant de ces personnes de volonté ou d'intention homophobe?

Pour ton exemple concret, je ne sais rien, je n’y étais pas. Je ne suis pas à l’aise pour parler du terme « pédé » spécifiquement car plutôt hétéro mal finie moi-même. Mais, par exemple, j’emploie très régulièrement moi-même le terme « putain ». Ce n’est pas « bien », mais je le fais et je ne reprends pas quelqu’un disant « putain, fais chier ». Et j’estime qu’il y a une différence avec quelqu’un traitant de « sale pute » une prostituée par exemple, où là, c'est clairement sexiste.
Ceci dit, je ne vois vraiment pas le lien avec le jugement du tribunal qui était un acte anti-raciste fort (pas un commentaire Facebook ou une réflexion de mon voisin de palier) déjà pas mal attaqué de toute part.

Fabicha, j'aurais peut-être tout de suite dû faire un tableau, pour rendre ma comparaison claire.

tableau_Taubira-chaton.png



Le fait d'injurier quelqu'un en le traitant de "pédé" ou d''enculé" n'a rien à voir avec le fait d'utiliser "putain!" comme interjection. La comparaison est plutôt avec le fait d'utiliser "putain" comme insulte; et dans ce cas, tu acceptes que c'est clairement sexiste, et tu sembles justifier d'intervenir (en opposant, dans ta phrase, ce cas au cas de l'interjection, où tu dis "je ne reprends pas quelqu’un"). D'ailleurs, la comparaison exacte est non avec le fait d'insulter une prostituée en la traitant de "putain", mais d'insulter, par exemple, Marine Le Pen comme "putain". Même dans ce cas, je pense que toi, et la majorité des gens ici, trouveraient bon d'intervenir contre le sexisme que traduit le choix de ce terme. Ce n'est pas parce qu'on est contre Marine Le Pen qu'on doit s'interdire d'objecter à l'utilisation d'une insulte sexiste. Personne ne va dire que ce faisant on "minimise" la juste lutte contre Marine Le Pen. Personne ne dira qu'on fait "de la récup, du parasitage" (cf. ton message du 26 juillet).

Dans mon exemple à moi, des personnes s'insurgeaient contre des sévices commis sur un chaton, en proférant une insulte fortement homophobe. Ta réponse - "Pour ton exemple concret, je ne sais rien, je n’y étais pas" - est bizarre. Si quelqu'un insulte quelqu'un en le traitant de "pédé" et d'"enculé", il n'y a pas besoin d'y être pour savoir que c'est homophobe. Même si tu supposes que mon histoire est inventée - elle ne l'est pas - la question n'est pas là. Je cherche simplement à mettre en lumière le fait que quand quelqu'un lance des insultes homophobes, même quand c'est "pour la bonne cause", on trouve bien d'intervenir. On ne vient pas dire que c'est hors sujet et que c'est du détournement. En objectant aux insultes homophobes, je ne minimisais pas le mal infligé au chaton, ou l'oppression des chatons en général. Et je ne vois pas le rapport avec le fait que tu puisses être "plutôt hétéro mal finie" toi-même. Comme le disait Félidée, "pas besoin d'être directement concerné-e par une discrimination ou une oppression pour la combattre.".

Tu objecteras peut-être à nouveau que je parle de "on" ou que je t'attribue des positions. Tant pis si ce ne sont pas les tiennes. Mais depuis le début de ce fil, on reproche à répétition aux organisateurs des Estivales et à moi en particulier de vouloir tolérer, dans le cadre des Estivales (qui sont centrées sur la question animale) des propos racistes, sexistes, homophobes, etc. Style:

Grussie":2sxlz5a6 a dit:
je rentre des estivales (...) et franchement, il y a un gros problème dans le mouvement animaliste. (...) j'ai entendu pas mal d'horreurs racistes, et, surtout, une bonne bonne moitié des gens ne relevaient pas le problème.

ou encore:

kindy":2sxlz5a6 a dit:
Concernant les propos/attitudes discriminatoires (sexisme, racisme, autre?) qui ont eu lieu aux Estivales (...) je pense avoir malheureusement bien compris qu'il y a eu des comportements inacceptables et j'ai (comme d'autres personnes) laissé un petit messagede protestation sur le site, car Non on ne peut pas tolérer de telles choses.

(Non seulement, dit cindy, il fallait objecter aux dits propos/attitudes sexistes, etc., mais on ne devait pas les tolérer. C'est dire si sur ce point il fallait était justifié à ses yeux d'intervenir.)

Voire:

Grussie":2sxlz5a6 a dit:
Pour la grève des cheminots, pareil, ce n'est pas le sujet, mais si jamais une personne avait dit aux estivales "pfff fait chier ces grévistes qui cherchent toutes les raisons de pas bosser", j'aurais réagi aussi. :)

Il y a même eu aux Estivales la création d'un "comité de vigilance" contre tout propos pas bien sur d'autres sujets.

Quoi qu'il en soit des Estivales, il me semble clair ici que la plupart des personnes ici qui critiquent l'article de Dominic (qui le critiquent sur le fond, pas juste sur l'image ou d'autres éléments secondaires) sont pour ce qu'elles appellent "l'intersectionalité des luttes", et au nom de cette notion sont opposées au fait de laisser passer sans contradiction des propos racistes, sexistes, homophobes, etc. "au nom de la bonne cause".

Or, je l'ai dit, dans le cas du jugement du tribunal, la phrase citée - "le fait d’assimiler une personne humaine, quelle qu’elle soit, à un animal, constitue une injure, faite à l’humanité entière"* - est lourdement spéciste. Elle n'est pas juste spéciste de manière anecdotique - contrairement à ce que tu affirmes ici. Elle est présentée par le tribunal comme le fondement du jugement. Je l'ai déjà dit, et tu continues à me présenter des exemples qui n'ont rien à voir**. Cette phrase est pire que des propos racistes, sexistes, etc. tenus en passant aux Estivales. C'est pire que les insultes homophobes dans l'affaire du chaton. C'est plutôt comme si quelqu'un prétendait fonder la condamnation du spécisme sur une base raciste ou sexiste.

Enfin, tu dis: "je ne vois vraiment pas le lien avec le jugement du tribunal qui était un acte anti-raciste fort (pas un commentaire Facebook ou une réflexion de mon voisin de palier) déjà pas mal attaqué de toute part". Les propos que je rapportais étaient perdus au milieu d'un sujet Facebook, et j'y ai répondu sur Facebook. Les propos du tribunal de Cayenne avaient un retentissement public, et Dominic leur a répondu en public.

D'ailleurs, globalement, le concert de protestation contre les sévices commis dans l'affaire du chaton ont eux aussi à la fois constitué un temps fort dans l'opposition à la maltraitance animale, aboutissant à une peine de prison exemplaire, et un moment fort en ambiguïté. Il y a eu beaucoup de réactions parmi les animalistes critiquant cette ambiguïté - non seulement le racisme, l'homophobie et la violence de tant de réactions, mais aussi leur sélectivité. Là encore, ce n'est pas parce que la cause initiale est juste qu'on doit s'interdire de critiquer la manière dont elle est soutenue.

Par contre, mon sentiment est fort que sur ce forum, de la part d'un nombre impressionnant de personnes, quand la cause initiale c'est la dénonciation du racisme, on se fiche sur quelle base elle est menée; et tout particulièrement, on se fiche du fait qu'elle soit menée en enfonçant les animaux non humains.

David

P.S. Tu dis que le jugement de Cayenne était attaqué de toute part. Personnellement, j'imagine que c'est le cas sur les sites genre fdesouche; je ne suis pas allé voir. Mais ce que j'ai surtout entendu est un concert de louanges, les seules critiques étaient que le tribunal avait eu la main lourde. Dominic ne critique en rien la sentence. Je ne comprends franchement pas comment on peut confondre sa critique avec celle venue de la droite dure. Ou alors, c'est qu'on n'a rien lu à l'article, rien compris. J'ai l'impression qu'on prend vraiment les gens pour plus stupides qu'ils ne le sont.

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* Merci au passage d'avoir trouvé ces attendus, c'est un élément important du débat. On peut noter que dans la phrase telle que la citait Dominic, "le fait d'assimiler une personne quelle qu'elle soit, à un animal, constitue une injure, faite à l'humanité entière", il manque la précision "personne humaine" - ce qui rend sans objet une part du raisonnement de Dominic. A la décharge de Dominic, je note que la phrase dans sa version fautive se trouve abondamment sur le Web, et que les attendus n'étaient pas faciles à trouver.

** Genre l'emploi dans les attendus du terme "homme" pour désigner les humain-e-s. Cet emploi n'est en rien présenté comme fondant le jugement.

Grussie, sur la question des pseudos, j'aimerais bien que ce soit terminé. J'ai pointé le fait que le prénom d'Emy_Spheres avait été utilisé avant moi, par diverses personnes dont toi-même, parce que tu me reprochais d'avoir divulgué son prénom, reproche qui ne tient pas debout. Je ne l'ai pas non plus utilisé dans une intention agressive, et d'ailleurs la personne concernée ne m'a pas (ne m'a pas encore?) fait le moindre reproche à ce sujet.

Les autres questions que tu poses sont intéressantes, comme celles posées par Numa (sincèrement). Certaines sont à mon avis franchement hors sujet, comme celle sur le décompte des morts; des débats pour/contre l'utilitarisme, l'addition des plaisirs, la commensurabilité des expériences personnelles, l'existence de l'identité personnelle sont selon moi essentielles mais ce fil n'est franchement pas le lieu, surtout vu l'état des choses.

Sur la priorité à donner ou non au spécisme, je me permets simplement de m'auto-citer à 20 ans de distance:

(Vous êtes pas obligés de lire, hein, c'est juste en passant.)

l'AIDA nous dit: «les souffrances infligées aux animaux sont incomparablement plus nombreuses et intenses que celles des humains.» Plus nombreuses, oui, mais plus intenses, non. Il n'y a aucune raison d'affirmer que les souffrances infligées aux individus non-humains sont toujours plus intenses que celles des individus humains. J'aimerais largement mieux naître éléphant en Afrique, même destiné à être abattu par un braconnier après un temps de vie tranquille, que gamin mourant de malnutrition, voire que gamin riche myopathe. (...); ce n'est pas parce que je suis militant de la libération animale que je devrais automatiquement choisir, entre améliorer le sort de ces éléphants et celui de ces humains, de favoriser les éléphants.
Il est par contre vrai comme le dit l'AIDA que les souffrances infligées aux non-humains sont, globalement, bien plus nombreuses (...), et leur intensité est souvent comparable aux souffrances humaines les plus graves. Cela serait bien une raison pour choisir, s'il fallait faire ce choix, de donner la priorité à la libération des animaux non humains. Mais j'insiste qu'il s'agit d'un jugement global. Les individus, eux, sont égaux, c'est-à-dire qu'une souffrance égale de l'un ou de l'autre a la même importance, indépendamment du groupe auquel il appartient. S'il faut choisir d'aider l'un ou l'autre de deux groupes donnés, le nombre doit être pris en compte; mais le nombre est une caractéristique du groupe, pas des individus. On a pas à dire que la souffrance d'un individu est plus importante que celle d'un autre quand ils souffrent autant. Ce n'est pas parce qu'il y a dix fois plus de porcs abattus que de veaux que la souffrance d'un veau serait moins importante que celle d'un porc!

La lutte contre l'oppression dont souffrent les humains a donc pour moi outre son importance directe - l'importance de cette souffrance elle-même -, une importance indirecte, du fait de sa nécessité pour la libération animale. Je tendrais parfois à me dire que, pour faire avancer à long terme la libération animale, le mieux serait, aujourd'hui, de l'oublier, et de se consacrer à l'amélioration de la condition des humains. Mais ce serait là encore une erreur; car je pense aussi que, réciproquement, une des meilleures choses à faire aujourd'hui pour la libération humaine, c'est de lutter pour la libération animale: pour employer une formule qui, certes, ne prouve rien, mais qui sonne bien et résume la chose, je dirais qu'une espèce qui en opprime d'autres ne peut elle-même être libre. Le spécisme est un mensonge que les humains se font à eux-mêmes, et dénoncer ce mensonge ne peut que les aider à progresser. Et comme nous sommes encore très peu à dénoncer ce mensonge, c'est certainement là que nous pouvons avoir le plus d'impact.
On me dira que cela est bien compliqué, voire cynique. La libération humaine ne serait qu'un moyen pour la libération animale, et la libération animale, réciproquement... C'est que, contrairement à une tradition politique bien ancrée, aussi bien chez les «gauchistes» auxquels s'opposent l'AIDA que chez l'AIDA elle-même, je ne pense pas que la libération, ni humaine ni animale, ce soit pour demain5. Entre aujourd'hui et ce jour-là, il y a beaucoup de progrès intermédiaires à faire. Si on veut se rendre à pied en un endroit, que le but «prioritaire» soit d'y amener le pied gauche ou le pied droit, ce sont les deux qu'il faut avancer. On n'ira pas loin si on suit l'AIDA qui nous dit, «il faut d'abord y mettre le pied gauche, pour le pied droit ça attendra6».
Cela n'interdit pas de redire à l'occasion, en tant que position de principe, que, puisque la souffrance d'un non-humain est aussi importante que celle d'un humain, et que les premiers sont bien plus nombreux que les seconds, la libération des premiers est en soi plus importante; cela interdit par contre de considérer comme allant dans le même sens que son propre combat l'action en faveur des animaux de ceux qui considèrent que certains individus - parce qu'ils sont humains et juifs ou arabes ou noirs ou autre, méritent, eux, d'être opprimés. Je n'ai pas de haine pour les militants d'extrême-droite, mais je ne vois pas comment on peut penser avancer la lutte pour l'égalité de tous les individus en s'associant avec eux. Je ne vois pas ce qu'on y gagne, concrètement. Je ne vois pas comment on peut attendre du public qu'il comprenne quoi que ce soit au message de la libération animale si nous n'avons pas comme principe répété que l'oppression d'un individu humain est grave autant, ni plus ni moins, que celle d'un non-humain. Il ne s'agit pas de dire si on a des préférences personnelles pour un vivisecteur antiraciste ou un végétarien de droite - pour un paralysé du pied gauche ou du pied droit - il s'agit de savoir avec qui on pourra cheminer en direction du but recherché7.
 
J'avoue avoir lâché au tableau de la comparaison car je ne comprends pas pourquoi choisir de retenir l'accusaion officielle du tribunal pour l'affaire "Leclere", et l'accusation d'internautes sur facebook pour l'affaire "Farid Ghilas" (j'ai supposé que c'était de ça qu'il s'agissait), alors qu'il me semble que Farid est passé en jugement, qu'une sentence a été rendue, et que même si je n'ai pas vérifié, il doit bien y avoir des commentaires déplorant ce jugement anti-spéciste (toutes proportions gardées, disons profitant à un chat) à l'encontre d'une personne minorée.

ça m'aurait semblé plus pertinent comme comparaison, encore que les deux affaires et leurs remouds et portées médiatiques ne sont pas vraiment comparables encore une fois je trouve. (même si j'entends bien de quoi il s'agit à propos des insultes homophobes, et dont je suis d'accord pour s'indigner publiquement et les condamner)
 
J'ai pas lu tout ton message Twizzle (je lirai la suite plus tard) mais je réagis tellement ça m'énerve de minimiser les souffrances animales.

Je remets un truc que j'écrivais l'année dernière :
"quand je regarde le monde, la nature, je ne vois qu'entredestruction où tout se mange, se dévore, un univers de souffrance infinie, un univers apocalyptique qui ne peut décemment avoir un sens en soi, une sorte d'enfer qui ne laisse pas de place au plus faible, d'ailleurs, je serai mort depuis longtemps si j'étais livré strictement à la nature. Je plains les animaux, je souffre énormément de leur condition."

Et malgré tout , oui, c'est important pour moi, de constater une souffrance animale incommensurablement plus grande, au moins à l'état de nature, à celle de mes congénères humains, privilégiés sur bien des aspects, notamment celui de n'être plus soumis entièrement à la cruelle et insupportable nature (allez-y vivre à l'état de nature et on en reparle après), ça ne m'empêche en rien, oui, en rien, d'éprouver de la compassion, à l'égard de groupes humains, d'individus, discriminés, souffrants !

Je remets le lien vers le magnifique texte de Dino Buzzati qui évoque de manière si juste la cruauté réelle du merveilleux monde de la nature.

http://www.science-et-magie.com/ETRANGE ... cenuit.htm
 
Picatau":1gdpjggt a dit:
constater une souffrance animale incommensurablement plus grande, au moins à l'état de nature, à celle de mes congénères humains

C'est le genre de discours qui me pose problème quand on parle de souffrance. (et il y a des humains qui vivent encore à l'état de nature, ils n'ont pas l'air malheureux, et d'ailleurs c'est quoi l'état de "nature" encore et toujours ? Nos maisons sont hyper évoluées, mais pourquoi ne seraient-elles plus issue de la "nature" ?)

On est tous à peu près d'accord pour dire que la souffrance n'est pas qualifiable ni quantifiable, étant donné que chaque individu est son propre référend de de gré de souffrance selon son vécu, son quotidien, son endurcissement ou son adaptation. (c'est pour ça qu'on demande dans les hopitaux de plus en plus aux malades d'indiquer ce qu'ils estiment être leur degré de souffrance)

Je ne serais pas surpris que si nous pouvions un jour "mesurer" les souffrances (physiques, morales, et d'autres qu'on ne connait pas encore peut-être) et donc les comparer, on trouverait un enfant d'une famille de la haute bougeoisie souffrant plus qu'un enfant soldat d'Afganistan, ou une chienne dans une bonne famille qui prend soin d'elle souffrir plus de ne s'être jamais remis de la perte d'un petit qu'un ouvrier chez Michelin, ou qu'une jeune noire d'une citée violée souffre plus qu'un cochon (mâle) d'élevage concentrationnaire... Et inversement !

Et puis encore, cumuler la souffrance sur toute la durée de vie ? A un instant T ? Quels instants à ce moment-là ?

Je crois qu'il y a une grosse confusion entre une souffrance réellement vécu et "pesée" par l'individu qui l'a subit, et la souffrance que nous éprouvons, nous, observateurs, en empathie. (qui peut très bien être disproportionnée, car nous devenons le référent d'une souffrance que nous ne vivons pas, ou que nous n'avons pas vécu pareil)

Je crois, encore et toujours, que comparer les souffrance pour trouver la plus urgente, la plus importante, la plus légitime ou la plus horrible, est une impasse et un piège.

Chacun est libre de s'occuper des luttes qui lui semblent les plus urgentes, utiles ou de son registre de compétences et de sensibilités, et c'est une chance primordiale. Sinon on en revient à une question purement rationnelle, qui sous couvert d'éfficacité risque de devenir binaire et qui équivaut à celle-ci qu'on connait bien pour beaucoup d'entre nous : Vaut-il mieux privilégier le welfarisme pure et se préoccuper des animaux qui souffrent maintenant au risque que leur situation n'évolue jamais, ou bien tous les oublier pour se concentrer sur l'abolitionnisme qui viendra plus tard ? (je schématise et suis un peu réducteur, mais elle a été redondante pendant un moment sur végéweb celle-là)

Ceci dit Pïcatau, encore une fois, ton sentiment, je l'ai partagé durant les 3 - 4 premières années de mon véganisme, et j'ai lutté pour m'en défaire, car il ne m'appelait toujours qu'au désemparement le plus formidable, et à l'inaction, du coup. (Et il me rappelle ceci, je sais que tu t'en souviens.)
 
V3nom, j'ai pas encore lu mais ne pas voir la souffrance inhérente à ce monde à l'état sauvage, ne serait-ce que par le fait de devoir combler sans répit les besoins primaires, ça ne passe pas pour moi, c'est vraiment ne pas voir que nous sommes privilégiés, c'est anthropocentré.

Et ce n'est pas chercher la souffrance la plus urgente que de le constater. Je ne comprendrai jamais cette incapacité des humains de penser la différence sans hiérarchiser. Je constate la souffrance animale, cela ne m'empêche pas le moins du monde de penser aux humains souffrants. Et ouvrir les yeux sur le vivant, ce n'est pas nécessairement se condamner à ne rien faire, à ne pas agir, à se morfondre etc. De toutes façons, je n'ai pas besoin d'espérer pour faire quoi que ce soit, je fais juste ce que je crois juste de faire, sans illusion, sans espoir aucun, et je ne m'apitoie pas sur moi pour autant.

Je remets ci-après un message que j'avais écrit l'année dernière :

"Ça me touche beaucoup la souffrance des animaux à l'état sauvage. Je voudrais pouvoir tous les sauver mais en suis incapable malheureusement. Je considère mes petits rescapés comme des amis. Un profond lien d'amitié m'unit à eux et je crois que c'est réciproque. Je tiens à leur apporter tout ce que je peux et je vous raconte pas les pieds et les mains que j'ai fait pour certains. Il sont tous stérilisés sauf ceux pour lesquels ça ne risque rien comme notre chien qui est toujours collé à nous et ne va pas courir les chiennes. On est certes un peu surprotecteurs avec nos animaux et on est très inquiets quand l'un de nos chats ne rentre pas le soir particulièrement l'été quand il fait beau. Nous leur apportons autant de soins que nous pouvons. Leur vie est sans doute dépendante de la nôtre mais quel autre choix serait-il possible pour ces animaux sélectionnés par les hommes qui ne survivraient pas longtemps dans la nature et comme je le disais, la condition sauvage est pour moi un univers de prédation où chaque animal est voué au danger permanent, soumis à ses pulsions, à la peur permanente, toujours sur le qui vive, sans soin possible lorsqu'ils sont malades. Et les plus faibles ne vivent pas longtemps dans la loi de la jungle.
Evidemment, il y a plus ou moins pire mais c'est une vie minimaliste, une vie de survie. Pour moi, une vie digne de ce nom passe par un juste équilibre entre liberté et sécurité. Les animaux sauvages n'ont guère le choix ni de l'un ni de l'autre finalement. Ils sont certes "libres" de leur mouvement, en fait c'est même pas tout à fait vrai car ils sont soumis aux conditions naturelles (prédateurs, intempéries, blessures, maladies), mais ils ne sont pas libres de choisir de leur plein gré ce qu'ils veulent faire car ils sont dans l'obligation permanente de satisfaire leurs besoins primaires : boire, manger, se protéger.
Alors certaines espèces s'en sortent mieux que d'autres, c'est vrai, souvent les carnivores d'ailleurs, en haut de la chaîne alimentaire. L'ours blanc a-t-il des prédateurs ? mais il doit lui aussi la majeure partie de son temps subvenir à ses besoins et ils ne peut pas se soigner non plus. Souvent je croise des cadavres d'animaux sur la route : hérissons, écureuils, blaireaux, belettes, oiseaux... je vois aussi tous ces insectes écrasés sur la calandre et je me dis quel gâchis... je pense à ces tortues qui éclosent sur les plages dont moins de la moitié rejoignent la mer car de multiples prédateurs sont là aux aguets... je pense aussi aux orangs-outans en train de disparaître à cause de la déforestation ou aux pandas qui disparaissent à cause de la raréfaction des bambouseraies, bref, au gâchis énorme dans la Nature où l'individu finalement n'a pas sa place, où seule l'espèce compte et doit se perpétuer éventuellement... ces milliers ou millions d'individus qui à peine arrivés sont mangés ou meurent... un chaos finalement."
 
Bin lis vite parce-que je crois que tu te méprends à priori sur mon message.

Quand je te lis j'entends quelqu'un qui voudrait libérer tout animal (humain ou non) de toute souffrance, mais comme c'est impossible (retirez les proies aux prédateurs et ce sont les prédateurs qui souffrent, rien que pour ne parler de ça), alors l'impasse qui se présente et son caractère indépassable est d'une angoisse et d'une douleur qui effectivement peut être intenable pour toi, moi ou quiconque.

MAIS, qu'est-ce qui te permet de croire qu'un quelconque "animal à l'état de nature" a conscience de ce "poids" injuste du fait d'évoluer enh permanence sous un milliard de menaces ? Les animaux tout comme les humains, quand ils ont une vie simple et peu ou prou "de nature", cette vie est abordée sous son jour le plus primaire également, au jour le jour et fait de joies et de peines qui n'ont rien à voir avec nos vies citadines et employées. Ils ne passent pas leur moindre temps libre à se lamenter "mais bon sang pourquoi suis-je qu'un pauvre rat et pas un cadre chez Monsanto ?", il n'a pas conscience de sa position méta-physique ou philosophique. (il a mieux à faire j'ai envie de dire)

Je n'ai jamais dis qu'il ne fallait pas tenir compte des souffrances des animaux sauvages, sinon je n'aurais jamais sauvé de souries, oiseaux, insectes, mouches, araignées et même cafards des gueules de mes chats.
Mais 2 choses :

-Je pense qu'il faudrait arrêter d'imaginer ce que vivent "les autres" à leur place, ce que soient des femmes, des noirs ou des animaux. (Félidée en a fait la remarque à son propos ici-même d'ailleurs)

-Et ici il n'est nullement question d'animaux sauvages dans l'anti-spécisme et dans le véganisme. (et même si ça l'était, alors quoi ? On éradiques les prédateurs ? On oublie les chiens et chats battus ? on divise un peu plus les maigres ressources qui sont déjà pas toujours bien employées ?)
 
Bon, on est hors sujet mais j'ai tout lu.

Je dirais donc uniquement ceci. Je fais juste des constats : les besoins primaires des animaux sauvages ne sont pas comblés, c'est la lutte permanente pour les satisfaire sans se faire manger, les animaux vivent dans la peur (cela pourrait sans doute être mesuré par des taux de je ne sais quoi, cortisol ou autre (?), et tout simplement observé par des faits comportementaux), ils subissent la loi de la jungle et il n'y a pas besoin de savoir qu'on la subit pour en souffrir sinon, c'est simple, on pourrait tout aussi bien dire qu'ils ne souffrent pas du tout, et surtout les anhs n'ont pas, sauf exception, la capacité de SE raisonner, non pas de raisonner (ça je ne doute aucunement qu'ils l'ont bien sûr), tout simplement parce qu'ils n'ont pas eu le loisir (car prisonniers de la contingence) de développer cette acuité. Les humains ont, eux, en théorie, la capacité de se raisonner et de donner un sens à leur souffrance, et surtout ont accès aux soins, à la nourriture et à une certaine sécurité (ne subissent pas la loi de la jungle), ce que les anhs n'ont pas non plus ou pas aussi facilement.
Etre animal en pleine nature, c'est vivre un enfer, mais c'est sans doute parce que j'ai côtoyé cet enfer d'une autre manière que j'ai développé cette compréhension.

Donc, je ne vois pas le rapport avec le "cadre de je ne sais quelle boîte" et je n'oppose pas à proprement parler la nature à la culture dans le sens où la culture ne serait pas issue de la nature, bien au contraire, mais je reconnais une différence de qualité et d'expérience entre la vie en milieu sauvage et la vie en milieu social/favorisé (moins dépendant de la contingence). Ne pas reconnaître cet avantage est pour moi se voiler la face, ne pas vouloir voir la misère où elle se trouve car ce serait trop douloureux.

Mais je te rassure, cela ne m'empêche pas d'être, d'agir, parce que, dans ma façon de penser plutôt influencée par l'Orient, nul besoin de "positiver" pour continuer de vivre, juste être lucide et cela n'empêche pas d'être joyeux (parce que ce n'est pas parce qu'on est malheureux que la souffrance d'autrui est atténuée) mais c'est dur à comprendre pour les Occidentaux.

Désolé pour le hors-sujet. Ceci n'est pas destiné à offenser qui que ce soit, c'est juste l'expression de ce que j'ai sur le coeur.
Et je le répète, cela ne m'empêche en rien de reconnaître les souffrances du monde humain.

Quant à soulager les souffrances de tous les êtres, c'est un souhait en effet, un souhait sans doute irréalisable, mais une magnifique orientation d'esprit loin de pousser au découragement.

Y a un ouvrage de vulgarisation qui vient de sortir, que je n'ai pas lu, mais qui a l'air de correspondre à ce que je vis.
http://www.laffont.fr/site/more_informa ... 37079.html
 
Picatau":3syaypxs a dit:
Je dirais donc uniquement ceci. Je fais juste des constats : les besoins primaires des animaux sauvages ne sont pas comblés, c'est la lutte permanente pour les satisfaire sans se faire manger, les animaux vivent dans la peur (cela pourrait sans doute être mesuré par des taux de je ne sais quoi, cortisol ou autre (?), et tout simplement observé par des faits comportementaux), ils subissent la loi de la jungle et il n'y a pas besoin de savoir qu'on la subit pour en souffrir sinon, c'est simple, on pourrait tout aussi bien dire qu'ils ne souffrent pas du tout, et surtout les anhs n'ont pas, sauf exception, la capacité de SE raisonner, non pas de raisonner (ça je ne doute aucunement qu'ils l'ont bien sûr), tout simplement parce qu'ils n'ont pas eu le loisir (car prisonniers de la contingence) de développer cette acuité. Les humains ont, eux, en théorie, la capacité de se raisonner et de donner un sens à leur souffrance, et surtout ont accès aux soins, à la nourriture et à une certaine sécurité (ne subissent pas la loi de la jungle), ce que les anhs n'ont pas non plus ou pas aussi facilement.

Je suis complètement d'accord avec tout ce que tu décris, c'est du factuel pur et dur.

Picatau":3syaypxs a dit:
Etre animal en pleine nature, c'est vivre un enfer, mais c'est sans doute parce que j'ai côtoyé cet enfer d'une autre manière que j'ai développé cette compréhension.

ça par contre c'est de l'ordre du sentiment, selon tes références, ta culture, ton.tes vécus, ta conception de "l'enfer", et surtout (le plus important) ce que tu va mettre de souffrances hypothétiquement ressenties en imaginant leurs intensités pour les animaux là dedans. (au fond, personne n'en sait rien, en tout cas sur ce topic)

Des souffrances, tous les être vivants en ressentent en permanence (faim, solitude, peur, blessure, péril), et leurs intensités correspondent à un tas de choses dont nous n'avons pas toujours notions ou capacité d'en rendre compte (l'adaptation notamment, mais également les capacités de détachement, les capacités physiologiques, psychologiques aussi, qu'on porte également, et j'en passe et des plus nombreuses)

N.B. : je ne parle pas d'abscence de souffrance pour les animaux quels qu'ils soient, dans quelque contexte que ce soit hein, je parle de surinterprétation de ces souffrances de nos yeux complètement extérieurs à nous. En particulier en ce qui concerne ce que tu as listé : une vie somme toute normale (= habituelle, pas "sans crainte ni danger") pour un animale dont lui et toute son espèce ont évolué, muté et se sont adaptés pour justement répondre de la façon la plus optimale, adaptée et économique possible à ce que tu liste.
Et j'irais même plus loin en disant que ce qu'on partage le plus avec les autres animaux, c'est la recherche du bien être, et étant donné que ce bien être est encore une fois basé sur l'échelle propre à chaque individu et ce qu'il vit, je ne doute pas qu'à part les malchanceux (et il y en a plein, je ne le nie pas), des moments d'accalmie, de sérénité ou de joie ponctuent aussi leur quotidien.

Et quand tu parles d'avantages à vivre en milieu social, civilisé, urbain, je ne suis pas certain que les animaux d'exploitations seraient d'accord avec toi vis à vis de leurs cousins "sauvages". Ni des enfants naissant dans des familles qui abusent d'eux. Ni des enfants vivant dans des pays en guerre depuis avant leur naissance. Les "besoins primaires" d'un tas d'humains ne sont pas comblés tous les jours et par millions ! (cf mon post concernant Ebola ou la faim en Afrique il y a quelques jours)
Faut-il catégoriser "humains aux besoins comblés" et "humains aux besoins non comblés" ?
Considères-tu que les enfants qui sont à cette minutes en train de mourir de faim ou de soif à même pas 2, 3 ou 4 ans sont "avantagés" vis à vis de... l'animal sauvage "à l'état de nature" que tu veux ? (ça va virer au concours stupide)

En fait j'ai peur que ton discours soit exactement un des reflets de ce qui est dénoncé en tant que discours antispéciste occidentalo-centré : une position suffisemment confortable pour décréter que la place de l'humain (sous entendu n'importe quel humain (*)) est quand même vachement enviable par rapport à n'importe quel animal, et que les luttes intra-humaines sont un ptit peu moins importantes...

C'est aussi un peu comme en tant qu'humain doué de parole, décider qu'un animal souffrirait du fait de ne pas avoir la parole articulée du fait de vivre avec nous et nous entendre dialoguer sans pouvoir nous répondre.
Mais du coup, un humain souffrant de ça reste un humain forcément avantagé ?

Il me vient aussi un autre point : en écologie toujours, j'ai entre autre choses appris que la notion de réserve naturelle est aussi sympatique que fragile. Y comprit ce label quasi sacralisé de l'UNESCO.
Imaginez donc qu'en cas de conflit militaire, les soldats ou populations luttant pour leur survie n'en on plus grand chose à foutre d'éviter de marcher sur des drosera ou de saccager une mare servant de réserve de ponte à des salamandres... (et ils seraient en plus dans leur plein droit)

J'ai peut-être tort, mais je me dis que dans cette perspective d'humains tellement laissés à se haïr sans retenue (n'importe quel pays en guerre tiens actuellement), aller leur dire que ça serait "en attendant que le spécisme gagne en ampleur pour invalider toute espèce de déshumanisation par l'association avec un animal" je ne suis pas certain que ça n'aide qui que ce soit (non humains y comprit).

(*) Et je crois qu'on retombe exactement à ce qui a fait mal dans le texte de Dominic : l'impression de niveler les conditions de tous les humains, et de les placer selon le point de vue d'un homme blanc, en dessous de la nécessité de lutter en faveur des animaux. (que ça soit involontaire de la part de l'auteur ou pas, que ce soit une mauvaise interprétation ou pas, le fait est qu'on y est)
 
Je n'aurai a priori qu'une chose à dire, je suis un animal.

Quant à la condition sociale, je ne l'envisageais pas pour les animaux sauvages puisqu'elle ne leur correspond pas. C'est leur condition que d'être en pleine contingence, je le constate, c'est tout, et je déplore leur souffrance point, pour les humains par contre, il ne fait aucun doute que la condition sociale (je ne parle pas spécificiquement de la condition occidentale mais de tout humain sur cette Terre car il n'y a pas d'humains sauvages) est meilleure que la condition sauvage à moins de croire encore au mythe du bon sauvage et du retour à la nature.

Pour moi, c'est clair, se dire que les animaux ne souffrent pas plus que nous, c'est se voiler les yeux. Facile de sortir l'argument du "discours occidentalo-centré antispéciste" comme si les Noirs, Jaunes ou n'importe qui d'autres ne tenaient jamais le même discours. Du coup, ta vision V3nom est occidentalo-centrée car ce que j'énonce, c'est une pensée qui me vient d'Orient, pas de l'Occident, je l'ai pourtant dit, et une fois de plus, le fait que je clame haut et fort que de reconnaître l'extrême rudesse de la vie animale sauvage ne m'empêche en rien de comprendre et d'appréhender les souffrances des groupes humains, des individus, au contraire même, je ne hiérarchise pas les luttes, je comprends ô combien les raisons d'Emy_Sphère ou de Félidée d'avoir le sentiment d'être niées dans leur chair. Je lis dans tes propos un discours analogue à celui des carnistes qui disent "vous feriez mieux de vous occuper des humains".

Franchement, je préfère mille fois ma condition, quand bien même elle est pourrie (oui, oui, j'ai beau être blanc cis hétéro... toutes les étiquettes que vous voudrez bien me coller sans rien connaître de moi, je souffre profondément pour plein de raisons mais je n'ai pas le coeur de les exposer ici) plutôt que celle de n'importe quel animal sauvage.

C'est si difficile d'admettre l'extrême souffrance des animaux sauvages ? et domestiques, et d'élevage aussi d'ailleurs, mais avec des nuances ? Qu'est-ce qui vous fait peur là dedans ?
 
Picatau et V3nom
Si je puis me permettre, il y a plus que probablement tout un éventail de situation différentes concernant les animaux sauvages et la rudesse de leur vie. Elle est clairement difficile parce que pour beaucoup le risque de mort "prématurée" est grand, mais je pense aussi qu'il y en a pas mal qui ont leurs habitudes, qui gèrent plutôt bien leur environnement/territoire, savent où trouver à manger, où se cacher, etc. Du coup le terme "enfer" me parait exagéré (il me parait tout à fait adapté pour les animaux en élevage industriel par contre).
Twizzle mon pseudo c'est Kindy (mais peu importe).
Je ne crois pas me contredire et je ne crois pas que les autres intervenant-e-s qui critiquent l'article plus que moi se contredisent non plus (j'ai un ressenti plus modéré mais je continue d'y réfléchir en lisant ce topic).
 
Merci Kindy pour ce message apaisant, je m'emporte je m'emporte, c'est que ça va pas ce soir même si sur le fond, je pense en effet que les anhs souffrent incommensurablement.
 
Picatau":3mr32eiv a dit:
Franchement, je préfère mille fois ma condition, quand bien même elle est pourrie (oui, oui, j'ai beau être blanc cis hétéro... toutes les étiquettes que vous voudrez bien me coller sans rien connaître de moi, je souffre profondément pour plein de raisons mais je n'ai pas le coeur de les exposer ici) plutôt que celle de n'importe quel animal sauvage.

N'importe qui sur ce forum pourrait en dire autant et c'est précisément le fond de mon post, dans lequel je mêlais humains et non humains sans aucune distinction justement.

Tu sous entends que j'aurais des propos tendant vers le carnisme, faisant une coupe franche entre les humains et les animaux, quand j'exprime (sans doute mal) en quoi on ne peut pas plus présumer de la façon dont un individu vit sa souffrance ni ce degré de souffrance, qu'il soit humain ou non-humain. (je m'évertue à écrire non humain et pas animal car j'ai pris ta toute première ligne comme un reproche à cet égard, comme si tu doutais que sois du même avis)

Alors que tu nous explique précisément en quoi les animaux souffrent forcément plus que n'importe quel humain (séparation nette pour moi) de part leurs conditions "limitée" (c'est ce que j'en ai comprit), en tout cas tellement différente au point qu'aucun humain ne pourrait jamais rendre compte (sauf toi ?), avec un point de référence du coup qui ressemblent quand même vachement au référent humain pour juger de tout ça.

Là où tu as cru m'entendre dire "les animaux ne souffrent pas plus que les humains, peut-être même moins, alors occupons-nous des humains d'abord", je me suis évertué (mal, probablement) à dire "les individus, humains ou non, souffrent selons leurs propres sensibilités individuelles, et préjuger du degré de souffrance qu'on imagine pour (à la place fonctionne aussi) d'un autre que soi me semble à la fois présomptueux voire condescendant sinon méprisant. ("je décide de ton degré de souffrance à ta place")

En fait plus ça va et plus ce terme de "souffrance" me semble aussi universel, fourre-tout et du coup dénué de sens que "la nature"...

J'ai envie de dire : qu'est-ce qu'on s'en fout si tel non humain souffre moins ou plus que tel humain, faut aider les deux, point !
On est pas devant un dilemne à la Siperman à devoir choisir entre Mary-Jane ou un bus d'enfants là. (et ça n'était vraiment pas la question non plus au sujet de l'affaire Leclere)

Je ne pige rien à l'existence même de ce genre de débat métaphysique, confortablement assis sur nos chaises devant nos ordis (je crois que je le dis depuis que je suis sur végéweb ça), c'est vraiment dérangeant à la longue...

Ok tu souffre entre autre parce-que tu as un chat très malade, et tout un tas d'autres raisons surement, mais bon sang... Quand je parlais de m'être détaché de cette façon de penser, c'était pour entre autre éviter ça justement : le sentiment de souffrir incommensurablement (ce qui est sans doute vrai, je l'ai vécu aussi) tout en étant un mec assis dans une maison confortable et devant un ordi. A la réflexion, je trouvais cette posture encore plus intolérable que cette souffrance qui, à mon avis, était montée de toute pièce et n'avait plus grand-chose à voir avec de la compassion... (je parle pour mon vécu, mais ce que tu témoigne de tout ça me le rappelle fortement)

Je n'ai pas les mots pour la décrire, mais j'ai appris depuis un autre schéma qui lui ressemble : celui de l'homme qui souffre affreusement de l'agression/viol/ce que vous voulez de sa compagne, peut-être même plus qu'elle n'en souffre elle-même. Je sais pas, il y a un truc qui me dérange là dedans...

Et puis même si on admettait comme fait établit et irréfutable que n'importe quel animal sauvage souffre forcément plus que n'importe quel être humain. Bien, on en fait quoi de cette information ? Elle nous est utile en quoi ? Peut-on la transposer pour servir les animaux domestiques ?

En fait ton post m'a donné un sentiment de "TEST your anti-speciesism !" et je commence à croire que cette histoire de savoir qui des humains ou des animaux souffrent le plus pourrait finir par se tranformer en ceci : qui est vraiment anti-spéciste, et qui fait semblant. J'ai peur en tout cas qu'une dérive pareille finisse par apparaitre, et je crains que le débat sur le degré de souffrance ne soit une voie d'encouragement. (nous parlions et avons ouvert un topic à propos de l'identitarisme et des dérives élitistes et puristes...)
 
V3nom, je me suis emporté, voilà tout. J'espère que tu n'es pas trop blessé et que tu voudras bien me pardonner.
Par contre, je sais pas comment il faut que je le dise, ma pensée ne me fait pas le moins du monde hiérarchiser ou prioriser les luttes pour les conditions humaine et animale.
 
J'ai modéré mes propos qui étaient déplacés même pour moi, je ne t'en tiens pas rigueur du tout ne t'en fais pas, et j'en ai vu d'autres ^^

Crois bien que je me concentre à débattre bien plus sur le message que sur ta personne ;)

Et je te crois quand tu me dis ne pas vouloir hiérarchiser, mais j'ai peur que le rapprochement avec ça soit tellement ténu, subtile (et peut-être définitivement propre à toi et chacun qui ressent de même) que la limite n'en soit transparente pour d'autres (partageant ou réfutant cette distinction)

edit : Rha et puis ça m'agace de sans arrêt poster le mesage qui fait changer de page ! :anger:
J'ai à chaque fois l'impression de foutre les postes et leurs auteurs précédents à la porte à coup de pied au cul. U_U
 
Twizzle, je trouve que ta comparaison ne tient pas sur plusieurs points (pour simplifier, je vais appeler A le cas de l'insulte faite à Taubira et de son jugement, et B celui des commentaires dans l'affaire du chaton).

1. Dans le cas B, il s'agit si j'ai bien compris de répondre directement au message problématique, sur le même medium et dans la continuité de la conversation. Les personnes qui liront ta réaction aux insultes homophobes seront à peu près les mêmes que celles qui avaient lu les insultes. Dans le cas A, c'est très différent : la réaction est dans la presse, et les personnes qui la liront n'avaient pas nécessairement lu les attendus du jugement ou cette phrase en particulier.

2. Dans le cas B, tu réponds directement à l'insulte elle-même, et ta critique est donc perçue comme s'adressant à la personne qui a utilisé l'insulte. Dans le cas A, la critique telle qu'elle a été faite est dirigée vers l'entité qui a condamné l'insulte (par pour le fait qu'elle l'a condamné, on est d'accord, mais quand même).

3. Dans le cas B, l'insulte homophobe est susceptible de toucher directement des personnes homosexuelles qui participent à la conversation, intervenir peut constituer un soutien direct pour elles. Dans le cas A, cette phrase n'envoie pas directement des poissons mourrir lentement asphyxiés, même si elle participe d'une idéologie spéciste décomplexée (on peut d'ailleurs se demander combien d'humains l'auront vraiment lue). Attention, je ne suis pas du tout en train de dire qu'il ne faut pas relever ce genre de trucs, je pense qu'il faut le faire (sauf bonne raison de ne pas le faire), juste que sur ce point la comparaison entre spécisme et oppressions intra-humaines est très limitée.

Par ailleurs, je vais me permettre de supposer certaines réponses plausibles à des questions que j'ai posées pour développer quelques arguments, que je retirerai ou modifierai si je m'étais trompé.

4. En supposant donc que le « coût » de ne pas réagir dans la presse générale aux propos du tribunal est lié à la médiatisation de l'affaire, le point 1 ci-dessus devient encore plus fort : dans le cas A, il s'agit de profiter d'une audience, ça n'a plus rien à voir avec le cas B.

(Et si le « coût » de ne pas réagir ici n'est pas lié à la médiatisation de l'affaire, j'aimerais qu'on m'explique pourquoi il fallait absolument intervenir à ce moment sur cette affaire, j'imagine qu'il y a quand même des tas d'autres phrases horriblement spécistes à relever ailleurs que dans ce jugement. (S'il n'y en a pas, j'en serais heureusement surpris.))

5. En supposant qu'il n'y avait pas eu de réaction directe à l'insulte elle-même plutôt qu'au jugement la condamnant, d'une part cf point 2, d'autre part ton argument comme quoi il s'agirait de dénoncer systématiquement les propos spécistes même dans un contexte centré sur une autre oppression (de la même manière que certain-e-s aimeraient voir les propos renforçant les oppressions intra-humaines dénoncés plus systématiquements même dans un contexte centré sur les animaux non-humains) ne tient pas, car l'insulte elle-même était également spéciste.
 
And it goes on, and on, and on...

Twizzle, j'ai en effet dit que suivant les retours de personnes de confiance que j'ai eu concernant les Estivales, il y a eu des propos qui semblent aberrants, notamment en ce qui concerne le fait que des racistes puissent être admis dans les actions, du moment qu'ils amènent un soutien aux mouvements animalistes.
Il s'y est passé des choses violentes et je suis complètement solidaires avec les gens qui se sont sentis blessés, discriminés et qui ont vécu tout cela violamment.
Voilà, je te réponds, ça va mieux ?

Vegan, toujours, pour les animaux, mais les échanges comme ceux ci, no more.
Simple. Simepole.
 
Félidée":1sxv3iqk a dit:
And it goes on, and on, and on...

Twizzle, j'ai en effet dit que suivant les retours de personnes de confiance que j'ai eu concernant les Estivales, il y a eu des propos qui semblent aberrants, notamment en ce qui concerne le fait que des racistes puissent être admis dans les actions, du moment qu'ils amènent un soutien aux mouvements animalistes.
Oui, je confirme.
Mais laisse tomber, Félidée (enfin, c'est mon conseil perso, tu fais ce que tu veux), sur mon blog où je parle du fait que beaucoup de militants de différentes luttes semblent avoir le besoin de défendre que leur cause est la cause prioritaire, et où j'explique pourquoi je pense que c'est très dommage et absurde (au sens premier du mot "absurde", dénué de sens, et non "débile"), je me prends des "tu généralises à partir de tes expériences personnelles" et des "tu ne peux pas raisonner à partir d'expériences que tu n'as pas directement vécues" (c'est pratique, entre ces deux trucs, ya plus beaucoup de place pour l'analyse), "tu n'as aucune légitimité pour parler"...
Pourtant, je dis bien que je parle d'un ensemble de tendances, que mon article a valeur de témoignage/analyse et pas de preuve scientifique (de toute façon, il n'y a pas de telle chose, mais bref), mais rien à faire.
Et puis à la fin je lis des magnifiques "pourtant, c'est dommage, tes conclusions sont justes" (arf, j'ai eu du bol d'y arriver par pure chance !).
 
Emy_Spheres":15rmw9pg a dit:
Autre chose maintenant.
yvesantisp":15rmw9pg a dit:
Nos analyses de l'époque dans les Cahiers éclairent aussi pourquoi, en créant les Estivales, on a jugé important que l'on n'y puisse faire taire personne – que je juge cela important n'empêche pas que je trouve très important aussi, non seulement que personne ne soit "silencé", mais aussi que tout le monde se sente encouragé à parler. Et je veux réfléchir – avec d'autres, heureusement ! – aux moyens de favoriser l'expression de tous, et notamment des personnes minorisées qui se sentent blessé-es ou agressé-es par des propos et attitudes d'autres... Peut-être que ça ne résoudra pas les problèmes, mais je trouve la perspective d'aller dans ce sens plutôt excitante, politiquement !
Si nous avons raison, alors il vaut mieux discuter les arguments de nos adversaires que leur interdire de parler (ce qui ne peut que se retourner aussi un jour contre nous : si j'accepte de censurer quelqu'un, ou qu'une instance quelconque en censure un autre "pour mon bien", qu'est-ce que je répondrai à ceux qui voudront me censurer moi-même ?) ; l'art de la discussion et de l'argumentation se cultive... justement en discutant de façon contradictoire et en argumentant. On voit bien ici qu'on a du mal à se comprendre, mais j'imagine que cette difficulté, si on ne veut pas la lever en empoignant les couteaux, ne peut justement se résoudre qu'en retournant les problèmes à d'autres moments, sous d'autres angles, avec d'autres formulations peut-être, etc. En tout cas pas en évitant de l'aborder !
[…]
Je pense que c'est très important d'avoir des discussions sur les sujets qui nous divisent a priori, et c'est du coup crucial d'arriver à s'écouter les un-es les autres avec le plus de tact possible... On se blesse très vite mutuellement, et ensuite ce sont vite nos blessures qui parlent... et on perd l'occasion de s'enrichir mutuellement, et d'enrichir nos luttes aussi, qui en ont bien besoin. Peut-être ça vaudrait le coup de se pencher sur la CNV (communication non-violente), dont j'imagine qu'en outre, du fait même qu'elle nous oblige à reformuler ce qu'on dirait sinon spontanément, nous oblige aussi à tourner notre langue sept fois dans notre bouche ?

J'aimerais être d'accord avec ça mais je crois tout de même qu'il est hyper facile d'avoir ce genre de position quand on occupe une place comme la tienne, celle d'un homme blanc.
Moi, en tant que femme noire, ça ne m'excite pas le moins du monde, au contraire : ça me fait flipper comme pas permis !
On peut discuter, argumenter, se faire entendre bien plus facilement quand on est déjà dans un rapport d'égalité avec son interlocuteur. Parce qu'il ne s'agit pas là que de simples adversaires.
Il s'agit parfois d'agresseureuses. Les paroles racistes sont des agressions. La minimisation du racisme est une violence. Les mises en parallèlle plus que douteuses qui participent à cette minimisation sont autant de gifles aux personnes racisées (pour ne parler que de ce sujet précis). Donc non, je ne trouve pas que ce soit une idée super transcendante.

Du coup, s'entendre dire que la solution face à ça est d'argumenter et de faire dans la communication non-violente, c'est quand même "un peu" rude pour moi. Surtout quand il s'agit -comme ici- de la pratiquer avec quelqu'un qui n'écoute pas, qui déforme les propos d'autrui et qui n'a pas la moindre once de considération pour la ou les personnes à qui il s'adresse.
Alors merci mais je laisse ça à d'autres et continuerai à répondre aux agressions comme je peux (et comme je le sens) : par la confrontation directe ou par la fuite.

Oui ; autant pour moi... et désolé ! Je crois que je ne sais pas comment aborder le problème sans minimiser... :( parce que pour l'instant je n'ai pas de solution pratique à proposer... Je souhaite énormément trouver des solutions... même si ça peut sembler délirant que ce soit un homme blanc qui espère, en se penchant sur le problème, mettre en oeuvre quelque chose de neuf (bon, mais fort heureusement, je ne suis pas seul non plus).

Emy_Spheres":15rmw9pg a dit:
yvesantisp":15rmw9pg a dit:
Je voulais aussi dire que l’article de Dominic, indépendamment je crois de ce qu'on peut ou non lui reprocher, réaffirme en tout cas quelque chose qu'on est plusieurs à dire depuis des années et que je crois fondamental pour les luttes de libération sur le long terme : que la sécurité que donne l'humanisme aux catégories dominées de ne pas passer à la trappe à la première "crise" venue parce qu'elles sont reconnues humaines (bref, que l'humanisme est un rempart contre la barbarie si elles arrivent à être reconnues vraiment humaines) est en fait une illusion dangereuse, parce que c'est précisément l'humanisme, avec son partage du monde entre humanité et nature, et entre humanité et animalité, et ses différentes gradations d'humanité (de dignité, etc.) qui en découlent, qui donne les structures idéologiques du racisme, du spécisme, etc. (ou qu'en tout cas, pour le formuler peut-être autrement : humanisme, spécisme, sexisme, racisme, âgisme se sont co-construits de façon solidaire ; on pourrait certainement rajouter validisme à la liste). Et qu’on aurait intérêt, tous et toutes, à démolir ce cadre global, pour affirmer la valeur de la vie de chaque individu, et de ce qu’il vit (la valeur de ce qu’il estime avoir de la valeur dans sa vie), indépendamment de toute catégorisation… Ce qu'un antispéciste avait appelé "sensibilisme" (l'accent mis sur la sensibilité, la sentience des individus, et non plus leur humanité) ; tel que je le vois, c'est à un vrai changement de civilisation qu'il nous faut œuvrer ! Evidemment, on n'est pas tous placés pareils pour contester l'humanité, c'est ce qui a été réaffirmé à plusieurs reprises ici, et j'imagine que c'est là la meilleure approche du problème ; je trouve que ça vaudrait le coup de parler de ce sujet dans cette perspective, en lui accordant beaucoup d'importance, parce qu’il me semble que l’enjeu est potentiellement colossal si on arrive à donner à cette direction une (des ?) transcription(s) politique(s) efficace(s)… (ce qui ne me semble pas évident...)
Pour ma part, j'aimerais bien qu'on réfléchisse à ce thème-là précisément et qu'on en reparle un de ces jours sur le forum... mais sans doute plutôt après avoir laissé décanté. Peut-être qu'on pourrait y revenir d'ici un mois, lancer alors un fil de discussion là-dessus ?

Bon, en espérant ne pas être totalement à côté de la plaque ! :)

Amicalement tout le monde,

yves

Je dois être fatiguée mais j'ai l'impression de lire ici qu'en fait, c'est pas bien la peine de lutter contre le racisme, le sexismes, le validisme et toutes les autres formes de dominations/oppression interhumaines parce qu'il faut se concentrer en priorité sur l'abolition des catégories animales.

Ah, non ! J'espère bien que je n'ai pas dit ça ! (bon, je crois bien que je n'ai pas dit ça ! :) )
J'ai le sentiment depuis longtemps que le "paradigme humaniste" (qui valorise l'humanité, l'intelligence, le mérite, l'anti-nature... bref, qui est dans la hiérarchisation et dans la mythologie de ce qu'est l'humanité) fait que les luttes des groupes dominés, minorisés ou marginalisés pour être reconnus dans son cadre comme "humains" constituent une sorte de travail de Sisyphe, éreintant et toujours à recommencer – bien qu'il soit indéniable néanmoins que ça avance, parce que beaucoup de gens luttent pied à pied pour cela. Mais le cadre humaniste, qui conditionne le "respect" ou la considération que chacun-e est en droit d'attendre, à l'appartenance à une humanité mythique, est on ne peut plus propice à ce que certains défassent la nuit ce que d'autres ont réussi à tricoter le jour. On revendique d'être humain pour être considéré à l'égal des "vrais humains" (les hommes blancs adultes riches, tout particulièrement), mais justement, le mouvement qui nous "dés-humanise" est ancré dans l'humanisme, non seulement historiquement, mais aussi logiquement (comme une possibilité logique, en tout cas). Tandis que changer de cadre, pour un cadre sensibiliste qui considère vraiment les individus indépendamment de toute appartenance, en tant qu'individus vraiment (et non plus comme des représentants de l'Animal, de l'Humain, du Noir, de la Femme, etc.), ce serait casser définitivement (j'espère !) les grilles qui permettent les exclusions de la prise en considération égale... Hum... J'espère m'être mieux exprimé...
 
Tu penses vraiment, yvesantisp, qu'il sera plus difficiler de "dé-sentienciser" que de "dés-humaniser" ? On peut ne pas être considéré humain alors qu'on l'est, on peut de même ne pas être considéré sentient alors qu'on l'est... Est-ce que celui qui déshumanise a un réel doute scientifique sur la condition humaine de celui qu'il opprime, ou est-ce qu'il invente ce doute comme prétexte à une déshumanisation qui l'arrange bien ?

Est-ce que les oppresseurs ne trouveront pas tout aussi bien une échelle de sentience ? On dit parfois que les femmes sont insensibles, qu'elles n'ont pas conscience de la manière "instinctive" dont elles font certaines choses... Ceux qui disent ça ne pourront-ils pas alors prétexter : elles sont un peu moins sensibles, un peu moins conscientes que nous, alors nous pouvons les oppresser ?

A moins que finalement tu ne souhaites tout bonnement supprimer toutes les petites cases (Animal, Femme, Noir) pour n'en garder qu'une énorme (Sensible), ce qui honnêtement me semble impossible. Comment appréhender l'individualité des milliards d'individus sensibles qui peuplent la planète sans absolument jamais catégoriser ne serait-ce qu'un minimum ? Mentalement ça me semble impossible. Il me semble qu'être catégorisé n'est pas un problème en soi, c'est un outil pour penser les groupes et les sociétés ; mais c'est se servir du critère permettant de catégoriser pour établir une échelle de valeurs qui est problématique. On peut très bien être décrit comme Animal Sensible Humain Femme Noire sans que cela n'entraîne aucun jugement de valeur, aucune exclusion. Ce n'est pas le cadre qui fait l'exclusion, c'est la volonté d'exclure, non ? Il me semble que c'est plutôt sur cette dernière qu'il faut travailler. Au lieu de "casser les grilles" n'irions-nous pas plus vite à "casser" la volonté d'exclure ? Autrement dit appeler à l'ouverture et à la tolérance, de manière générale, et en insistant sur le cas de ceux qui sont particulièrement exclus ou oppressés (femmes, racisés, handicapés, anh...). Moi ça me semble plus simple :).

Mais peut-être que je rate quelque chose dans ton raisonnement. Moi j'ai l'impression qu'une fois qu'on a décidé d'exclure, l'exclusion s'auto-génère et s'auto-justifie, quitte à inventer un cadre, de fausses raisons, des prétextes... Et qu'ainsi une société "sensibiliste" ne serait pas forcément une société sans exclusion. On peut le justifier par des réflexions publiées dans vos Cahiers Antispé, par exemple ici :
La proposition « Les animaux sont sentients » n'est que descriptive ; elle n'est l'injonction de rien.
[...]
Reconnaître la sensibilité animale n'est certes pas tout. Avoir conscience de l'existence des besoins et aspirations de tous les êtres sentients ne nous dit pas quoi faire.
Il me semble que c'est une bonne illustration du fait que le cadre de pensée ne suffit pas et que c'est sur la volonté (d'exclure ou de tolérer) qu'il vaut mieux travailler. Donc oui, rendre les gens sensibles à la sentience de tout individu est important, mais il me semble que ça ne suffit pas, et que c'est déjà l'objet de l'humanisme, donc sur ce plan je crois que les humains ne gagneraient rien de particulier à échanger leur humanité pour leur sentience.

Bref, pour exclure, il suffit d'avoir le pouvoir ; les raisons, ça s'invente. Et sans doute que dans toute société il y aura toujours des différences de pouvoir... Ce qu'il faut c'est surtout appeler les gens à ne pas s'en servir pour exclure, non ?
 
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