Je vois que certain.e.s parlent des images qui leur viennent spontanément à l'esprit et qu'iels n'arrivent pas à repousser... Personnellement, c'est l'inverse, je crois. Voir la viande, ça m'emmerde, parce que je sais ce qu'il y a derrière. Mais je n'ai pas l'impression de voir les images spontanément, j'ai plutôt l'impression de me forcer à me souvenir, pour ne pas oublier pourquoi je le fais. J'ai beau avoir vu Earthlings (et je sais que j'ai eu du mal à regarder... et d'ailleurs, j'évitais surtout de regarder totalement l'écran, je cachais à moitié avec la main, je me concentrais sur les sous-titres) et d'autres docus, les images ne se "jettent" pas sur moi, je vais les chercher. (Plus des idées que des images, d'ailleurs.) Pour moi, ça n'est pas le fait que ça soit un morceau d'animal qui est important, c'est le fait que ça soit le résultat d'une injustice et qu'il faut se souvenir de cette injustice. Donc je n'ai jamais vraiment ressenti ce dégoût profond et incontrôlable, je crois. Ça m'emmerde, ça me fait chier de voir de la viande, et de voir que personne n'a (l'air d'avoir) envie de changer pour épargner toute cette souffrance, mais je peux quand même passer le plat de viande (tant qu'on me demande pas de le cuisiner, ni de le servir)... En fait, c'est peut-être le fait d'avoir conscience de toute les souffrances et morts qui existent constamment et qui sont totalement impossibles à percevoir dans leur globalité tellement elles sont écrasantes, qui ne me fait pas ressentir les choses de manière aussi aigüe quand je suis devant l'un des cadavres (parmi des milliards). De la même manière, je n'ai pas ressenti d'envie de pleurer aux enterrements auxquels j'ai assistés, y compris ceux de mes grands-parents. Ça n'était pas des gens méchants, je les aimais bien, mais je ne voyais pas ce que ça apporterait de pleurer, ce que ça changerait, et je me disais que c'était vraiment une goutte d'eau dans l'immensité d'horreur du monde à laquelle ils avaient eux-mêmes participé. J'étais surtout triste de la tristesse des gens présents.
Je suis un végétarien un peu bizarre, peut-être.
(Par contre, quand j'écrase un escargot par inattention, ça me met dans un sale état...)
Au fond, c'est peut-être aussi parce que je me dis que cette absence de conscience des zoophages est du même ordre que l'absence d'empathie des prédateurs non-humains pour leurs proies. Il n'y a pas de cruauté, juste de la bêtise. La différence, bien sûr, c'est que les humains, on peut discuter avec eux pour les pousser à réfléchir et leur faire prendre conscience...